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La prise en charge des maladies cardiovasculaires pendant la grossesse*
F. DELAHAYE, hôpital Louis Pradel, Bion

La prise en charge doit concerner la mère et le fœtus. Les conseils aux patientes en âge de procréer et ayant une maladie cardiaque doivent être donnés bien en amont de la grossesse. La prise en charge doit être faite par une équipe pluridisciplinaire, et les patientes à haut risque doivent être traitées dans des centres spécialisés.
Conditions générales La prise en charge doit concerner la mère et le fœtus. Les conseils aux patientes en âge de procréer et ayant une maladie cardiaque doivent être donnés bien en amont de la grossesse. La prise en charge doit être faite par une équipe pluridisciplinaire, et les patientes à haut risque doivent être traitées dans des centres spécialisés. Épidémiologie Les troubles hypertensifs sont les évènements cardiovasculaires les plus fréquents pendant la grossesse, survenant chez 6 à 8 % des femmes enceintes. Dans les pays occidentaux, les cardiopathies congénitales sont la cause la plus fréquente de complications cardiovasculaires pendant la grossesse. Les cardiomyopathies sont rares mais sont causes de complications cardiovasculaires sévères. Conseil génétique Un conseil génétique doit être proposé à toute patiente ayant une cardiopathie congénitale, une arythmie congénitale, une cardiomyopathie, une maladie aortique ou des malformations génétiques associées à une maladie cardiovasculaire. Diagnostic d'une maladie cardiovasculaire pendant la grossesse Il repose sur l’interrogatoire, les investigations cliniques, l’électrocardiogramme, l’échocardiographie (y compris transœsophagienne) et l’épreuve d’effort (jusqu’à 80 % de la fréquence cardiaque maximale théorique). Les radiations ionisantes doivent être évitées. Durant les deux premières semaines après la fécondation, une survie intacte sans anomalie est le plus probable en cas d’irradiation supérieure à 50 mGray. Après les deux premières semaines, une exposition supérieure à 50 mGray peut être associée à un risque augmenté pour le fœtus. L’IRM sans gadolinium semble sans danger, mais les données disponibles sont limitées. La tomodensitométrie n’est pas recommandée du fait des doses élevées de radiations ionisantes. Évaluation du fœtus Elle repose surtout sur les ultrasons. Interventions Les interventions doivent être évitées mais sont possibles si elles sont absolument nécessaires. Le meilleur moment pour une intervention coronaire percutanée est après le 4e mois, pendant le 2 e trimestre. La chirurgie cardiaque peut être réalisée en cas de risque vital pour la mère, au mieux entre la 13 e et la 28 e semaine. Après la 28 e semaine, l’interruption de grossesse avant l’intervention chirurgicale doit être envisagée. Accouchement Les modalités doivent être décidées par une équipe expérimentée. Le mode préféré est l’accouchement par voie basse. Une analgésie péridurale est souvent recommandée, avec surveillance de la tension artérielle et de la fréquence cardiaque maternelles, car elle peut provoquer une hypotension. Endocardite infectieuse Les récentes modifications des recommandations s’appliquent aux patientes enceintes comme aux autres patients. La prophylaxie de l’endocardite infectieuse n’est désormais recommandée que chez les patients à haut risque d’endocardite infectieuse. L’antibioprophylaxie durant l’accouchement n’est pas recommandée. Évaluation du risque maternel Elle doit être faite selon la classification de l’OMS. Classification du risque cardiovasculaire maternel selon l'OMS (tableau 1) Contraception chez les patientes ayant une cardiopathie Les méthodes contraceptives incluent la contraception hormonale œstroprogestative, la contraception avec seulement des progestatifs, les dispositifs intra-utérins et la contraception d’urgence. À côté des préservatifs masculins, le stérilet intra-utérin est la méthode la plus sure et la plus efficace qui puisse être utilisée chez les patientes ayant une cardiopathie congénitale cyanogène et une maladie vasculaire pulmonaire. Les recommandations générales de classe I C sont : Une évaluation du risque et des conseils avant la grossesse sont indiqués chez toutes les femmes ayant une maladie cardiovasculaire ou aortique, congénitale ou acquise ; L’évaluation du risque doit être faite chez toutes les femmes ayant une maladie cardiaque et en âge de procréer, et après la conception ; Les patientes à haut risque doivent être traitées dans des centres spécialisés, par une équipe multidisciplinaire ; Un conseil génétique doit être proposé à toute femme ayant une cardiopathie congénitale, une arythmie congénitale, une cardiomyopathie, une maladie aortique ou des malformations génétiques associées à une maladie cardiovasculaire ; Une échocardiographie doit être réalisée chez toute patiente enceinte qui a des symptômes ou des signes cardiovasculaires inexpliqués ou nouveaux ; Avant chirurgie cardiaque, un traitement corticoïde doit être administré à la mère chaque fois que possible ; Pour la prévention de l’endocardite infectieuse pendant la grossesse, les mêmes mesures doivent être utilisées que chez les patientes non enceintes ; L’accouchement par voie basse est recommandé chez la plupart des patientes. Une IRM sans gadolinium doit être envisagée si l’échocardiographie n’apporte pas suffisamment d’informations (classe IIa C) ; En cas d’HTA sévère, un accouchement par voie basse avec analgésie péridurale et accouchement instrumental doit être envisagé (classe IIa C) ; Lorsque l’âge gestationnel est d’au moins 28 semaines, l’accouchement avant une intervention chirurgicale nécessaire doit être envisagé (classe IIa C) ; Une césarienne doit être envisagée pour des raisons obstétricales ou chez les patientes avec calibre de l’aorte ascendante > 45 mm, sténose aortique sévère, travail avant terme alors qu’il y a encore un traitement anticoagulant oral, syndrome d’Eisenmenger ou insuffisance cardiaque sévère (classe IIa C) ; Une césarienne peut être envisagée chez les patientes ayant un syndrome de Marfan avec un calibre de l’aorte ascendante entre 40 et 45 mm (classe IIb C) ; Une radiographie thoracique, avec protection du fœtus, peut être envisagée si les autres méthodes n’ont pas permis de clarifier la cause d’une dyspnée (classe IIb C) ; Un cathétérisme cardiaque peut être envisagé, avec des indications très strictes et une protection du fœtus (classe IIb C) ; Une tomodensitométrie ou une étude électrophysiologique, avec protection du fœtus, peut être envisagée chez certaines patientes, pour des indications vitales (classe IIb C) ; Une intervention chirurgicale de pontage coronaire ou de geste valvulaire peut être envisagée lorsque les traitements conservateurs et médicaux ont échoué, dans des situations qui menacent la vie de la mère et qui ne peuvent pas être traitées par voie percutanée (classe IIb C) ; Une antibioprophylaxie pendant l’accouchement n’est pas recommandée (classe III C). Prise en charge d'une cardiopathie congénitale Les recommandations sont les suivantes (tableau 2). Prise en charge d'une atteinte aortique Les recommandations sont les suivantes et sont toutes de classe IC : Les patientes ayant un syndrome de Marfan ou une autre atteinte aortique connue doivent être informées du risque de dissection aortique pendant la grossesse et du risque de transmission à la progéniture ; Une imagerie de toute l’aorte (tomodensitométrie ou IRM) doit être faite avant une grossesse chez les patientes ayant un syndrome de Marfan ou une autre atteinte aortique connue ; Les patientes ayant un syndrome de Marfan et un calibre de l’aorte ascendante > 45 mm doivent être traitées chirurgicalement avant une grossesse ; Chez les patientes enceintes ayant une dilatation aortique connue, une (un antécédent de) dissection aortique de type B ou une prédisposition génétique à une dissection aortique, un contrôle strict de la tension artérielle est recommandé ; L’échocardiographie doit être répétée toutes les 4 à 8 semaines pendant la grossesse chez les patientes ayant une dilatation de l’aorte ascendante ; Pour l’imagerie, chez des patientes enceintes ayant une dilatation de l’aorte ascendante distale, de la crosse de l’aorte ou de l’aorte descendante, une IRM sans gadolinium est recommandée ; Chez les patientes ayant une bicuspidie aortique, une imagerie de l’aorte ascendante est recommandée ; Chez les patientes ayant une dilatation de l’aorte ascendante 40 mm, un accouchement par voie basse est préférable ; Les patientes ayant une dilatation de l’aorte ou une (un antécédent de) dissection aortique doivent accoucher dans un centre disposant de la chirurgie cardiothoracique ; Quand le calibre de l’aorte ascendante est > 45 mm, une césarienne doit être envisagée ; Le niveau de preuve est de II, voire de III pour les items suivants : Un traitement chirurgical avant une grossesse doit être envisagé chez les patientes ayant une atteinte aortique associée à une bicuspidie aortique lorsque le calibre de l’aorte ascendante est > 50 mm ou > 27 mm/m2 de surface corporelle (classe IIa C) ; Une intervention chirurgicale prophylactique doit être envisagée pendant la grossesse si le calibre de l’aorte ascendante est ≥ 50 mm et augmente rapidement (classe IIa C) ; Chez les patientes ayant un syndrome de Marfan ou une autre atteinte aortique avec un calibre de l’aorte ascendante entre 40 et 45 mm, un accouchement par voie basse, rapide, avec anesthésie péridurale doit être envisagé (classe IIa C) ; Chez les patientes ayant un syndrome de Marfan ou une autre atteinte aortique avec un calibre de l’aorte ascendante entre 40 et 45 mm, une césarienne peut être envisagée (classe IIb C) ; Chez les patientes ayant une (un antécédent de) dissection aortique de type B, la grossesse doit être déconseillée (classe III C). Prise en charge d'une valvulopathie Les recommandations figurent dans le tableau 3. Les régurgitations (IC) Les patientes qui ont une régurgitation mitrale ou aortique sévère et des symptômes ou une altération de la fonction ventriculaire gauche ou une dilatation ventriculaire gauche doivent avoir une intervention chirurgicale avant une grossesse et un traitement médicamenteux est recommandé lorsque des symptômes apparaissent chez les patientes enceintes ayant une régurgitation valvulaire. Prothèses valvulaires mécaniques La situation des patients ayant une prothèse mécanique est bien codifiée malgré un faible niveau de preuve (I C)
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