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L'arrêt cardiaque - Prise en charge en réanimation
F. DUMAS, A. CARIOU (Hôpital Cochin ; CEMS) et N. LELLOUCHE (Cardiologie, Henri Mondor ; CEMS)

Le succès de la réanimation initiale de l’AC est jugé sur la capacité à obtenir, grâce aux manœuvres de réanimation, une reprise d’activité circulatoire spontanée.
Le succès initial n’est pas synonyme de succès ultérieur F. Dumas, A. Cariou (Hôpital Cochin ; CEMS) Le succès de la réanimation initiale de l’AC est jugé sur la capacité à obtenir, grâce aux manœuvres de réanimation, une reprise d’activité circulatoire spontanée. Malheureusement, ce succès initial n’est pas synonyme de succès ultérieur… Le taux d’admission à l’hôpital est d’environ 25 % mais le taux de survie à la sortie de l’hôpital ne dépasse pas 7 à 8 %. En effet, le phénomène d’ischémie-reperfusion globale (engendré par l’AC et sa réanimation) active une cascade de mécanismes physiopathologiques à l’origine du « syndrome post-AC », qui survient immédiatement au décours de l’AC et se prolonge habituellement jusqu’à 72 heures après l’événement. Ce syndrome comprend l’ensemble des manifestations cliniques et biologiques qui sont la conséquence de l’ischémie-reperfusion globale. Son traitement, qui constitue l’ultime maillon de la chaîne de survie, comporte un éventail large d’interventions diagnostiques et thérapeutiques visant d’une part à identifier et traiter la cause de l’AC dans les délais les plus brefs, et à limiter d’autre part l’aggravation des lésions engendrées par l’AC, notamment sur le cerveau et le myocarde [38]. Identification rapide de la cause : place de la coronarographie et du scanner Lorsqu’il n’existe pas de cause extra-cardiaque évidente (trauma, sepsis, intoxication, etc.), la stratégie incluant la pratique d’une coronarographie immédiate et systématique est couramment employée, car les résultats cliniques associés à cette stratégie sont très encourageants (figure 6). Ces résultats montrent que les causes coronaires sont très fréquentes, et que l’angioplastie immédiate réalisée avec succès est associée à une amélioration de la survie, et ceci quel que soit l’aspect de l’ECG initial [1,39]. Figure 6. Taux de survie observés chez les victimes d’AC explorés par coronarographie immédiate. De plus, l’influence positive de cette intervention n’est pas limitée à la phase initiale mais semble prolongée dans le temps [2]. L’importance du nombre d’études observationnelles à la fois prospectives et rétrospectives concernant à la fois des patients avec sus-décalage du segment ST et sans, des rythmes initiaux choquables et non choquables plaident globalement en faveur d’un bénéfice de l’angioplastie immédiate sur la survie des patients victimes d’AC. Dans la pratique, l’indication est retenue en prenant en compte le contexte : - si l’AC survient à l’évidence chez un patient présentant un syndrome coronarien aigu (douleur thoracique prolongée avant l’arrêt, électrocardiogramme retrouvant un sus-décalage du segment ST systématisé dans un territoire artériel coronaire), une revascularisation en urgence de l’artère responsable de l’infarctus est nécessaire, au mieux par intervention percutanée. En l’absence de structure proche permettant la réalisation d’une investigation coronarienne en urgence, l’administration d’un agent thrombolytique est acceptable et pourrait être une alternative malgré l’absence de preuve de son efficacité. - si l’AC ne survient pas dans un contexte évocateur d’infarctus du myocarde, la faible valeur prédictive des éléments cliniques et électrocardiographiques pour diagnostiquer un syndrome coronaire aigu comme cause d’AC plaide tout de même en faveur de la réalisation systématique d’une coronarographie dès l’admission du patient si celui-ci est proche d’une structure hospitalière adaptée [1,39]. Cette attitude pourrait cependant être réservée aux patients jeunes (moins de 75 ans), présentant des chances de survie raisonnables avec notamment un délai court (moins de 10 minutes) entre la survenue de l’arrêt et le début d’une réanimation efficace ( no flow). Un délai long entre le début d’une réanimation efficace et l’obtention d’une stabilité hémodynamique ( low flow ) ne doit pas contre-indiquer la réalisation d’une coronarographie : ce délai est en effet associé à l’apparition d’un état de choc précoce durant la phase hospitalière. En cas d’occlusion coronaire, la réouverture de l’artère responsable de l’infarctus pourrait atténuer l’intensité de ce choc. Dans cette situation, l’emploi systématique de la thrombolyse, qui a fait l’objet d’une étude prospective randomisée négative, n’est pas recommandé en présence d’arguments orientant vers une cause extra-cardiaque (prodromes respiratoires ou neurologiques), ou en cas de coronarographie normale, un scanner cérébral et un angioscanner thoracique doivent être réalisés. L’embolie pulmonaire, en particulier, concerne ainsi 2 à 10 % des AC et est accessible à un traitement curatif. Dans tous les cas, lorsque son indication est retenue, la coronarographie devrait être réalisée le plus tôt possible afin de réduire les délais de réouverture coronaire. En fonction du contexte, la mise en place d’une assistance mécanique circulatoire (éventuellement percutanée) peut également être discutée à ce stade. Pendant cette phase, tous les efforts doivent être entrepris pour parfaire la qualité de la prise en charge. C’est le cas en particulier en matière de neuroprotection par hypothermie, qui peut être débutée par différents moyens pendant cette période, sans risque supplémentaire particulier. Hypothermie thérapeutique De nombreuses données expérimentales montrent que l’hypothermie modérée permet d’exercer des effets neuroprotecteurs [40]. Ces arguments expérimentaux ont trouvé confirmation sous la forme de données d’efficacité clinique de très bon niveau méthodologique, publiées au début des années 2000. La publication de ces essais cliniques a été déterminante et a conduit à une modification rapide des recommandations internationales, portant sur la prise en charge des patients victimes d’un AC, recommandant désormais l’emploi systématique d’une hypothermie modérée (32 à 34°C) pendant 12 à 24 heures chez tout adulte comateux au décours d’une ressuscitation réalisée pour un arrêt cardiorespiratoire extra-hospitalier consécutif à une fibrillation ventriculaire. Chez les patients pris en charge avec un rythme initial non choquable, la démonstration n’est pas faite mais le rapport risque/bénéfice apparaît suffisamment favorable pour discuter l’indication du traitement au cas par cas [41]. Il existe de nombreuses méthodes de refroidissement qui peuvent être combinées entre elles, et qui peuvent être associées à l’usage de traitements médicamenteux antipyrétiques, en particulier lorsque la température-cible est difficile à atteindre. Appréciation du pronostic Chez les patients qui ont survécu à la phase initiale, les lésions neurologiques entraînent la majorité des décès ultérieurs. Une évaluation précise du pronostic est nécessaire afin d’identifier les patients qui sont réellement susceptibles de bénéficier de soins intensifs et pour éviter de prolonger des traitements inutiles chez ceux qui n’ont aucune chance raisonnable de récupération. L’exactitude des informations recueillies dans le contexte de l’urgence (durée de la réanimation, cause de l’AC) est souvent sujette à caution, ce qui limite d’autant leur portée pronostique. Les données disponibles à l’admission ne suffisent donc pas pour prédire de façon formelle le pronostic à titre individuel, mais permettent simplement l’identification des patients les plus à risque d’évoluer défavorablement. Sauf exception, la plus grande prudence s’impose lorsqu’il s’agit de limiter l’engagement thérapeutique sur la seule base de ces informations. Ainsi, chez un patient qui vient d’être réanimé d’un AC, il est le plus souvent nécessaire de laisser s’écouler un délai minimum avant de pouvoir considérer comme fiables les données enregistrables. Ce délai est variable mais il est habituel d’attendre au moins 72 heures après la cessation de tout phénomène susceptible d’interagir avec l’état neurologique. L’éveil survient au cours de cette période, et son absence doit toujours faire évoquer l’existence de lésions cérébrales. L’estimation du pronostic doit toujours être basée sur une évaluation clinique rigoureuse, comportant en particulier un examen neurologique détaillé. Ainsi, le pronostic est invariablement défavorable chez les patients qui demeurent comateux au-delà du 3 e jour, et chez lesquels on note une absence de réflexe pupillaire ou cornéen, une réponse motrice absente ou en extension. D’autres signes cliniques péjoratifs peuvent venir s’ajouter à ce signe essentiel, tels qu’un état de mal épileptique ou myoclonique. Outre l’examen clinique, différentes investigations complémentaires peuvent être pratiquées pour faciliter l’évaluation du pronostic. Il s’agit essentiellement des techniques de neuro-électrophysiologie (EEG, enregistrement des potentiels évoqués somesthésiques) et du dosage de certains marqueurs biochimiques (NSE, S-100). En conclusion Une meilleure connaissance du « syndrome post-AC » transforme incontestablement le dernier maillon de la chaîne de survie : d’une attitude d’observation, la prise en charge hospitalière est devenue active, conditionnant en partie l’évolution du patient à moyen et long terme. L’objectif prioritaire de ces soins post-AC réside bien sûr dans l’obtention d’une survie s’accompagnant de peu ou pas de séquelles cardiaques et neurologiques. L’ACEH vu par la lorgnette du cardiologue Application au coronarien connu N. Lellouche (Cardiologie, Henri Mondor ; CEMS) La majorité des morts subites est secondaire à une pathologie coronarienne sous-jacente (70 % des cas environ). Dans environ la moitie des cas, l’événement est inaugural de la maladie coronaire. Il est donc primordial d’améliorer la prévention de la maladie coronaire, mais également d’identifier au mieux les patients coronariens à risque de mort subite [41-46]. Physiopathologie de la mort subite chez le patient coronarien Le mécanisme principal de la mort subite chez le coronarien est la survenue d’une fibrillation ventriculaire (FV), éventuellement précédée d’une tachycardie ventriculaire (TV). Comme pour
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