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Insuffisance cardiaque - Améliorer le pronostic est difficile
J. RONCALLI, A. PATHAK, M. GALINIER, CHU Rangueil, Toulouse

AHA
En matière d’insuffisance cardiaque, l’AHA 2008 a été dominée par les résultats décevants de l’étude I-PRESERVE et non concluant des études HF-ACTION et BONAMI, explorant trois voies thérapeutiques fondamentalement différentes, pharmacologique, hygiéno-diététique et cellulaire, mais l’espoir est venu de l’étude CUPID, premier essai clinique de thérapie génique.
I-PRESERVE : le traitement de l’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée en échec L’étude I-PRESERVE n’a mis en évidence aucun bénéfice d’un traitement par antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II (ARA II), l’irbésartan, dans le traitement de l’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée (ICFEP). Ainsi, après les échecs d’un inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC), le périndopril dans l’essai PEP-CHF, et d’un autre ARA II, le candésartan dans l’étude CHARM-Preserved, c’est la notion même d’ICFEP autant que son traitement qui sont en échec ! Il s’agit, en effet, d’un syndrome et non d’une maladie, dont la thérapeutique ne peut être uniciste. Il n’est d’ailleurs plus certain que cette pathologie complexe, évoluant le plus souvent par poussées congestives itératives, à l’occasion de facteurs déclenchants, nécessite en tant que telle un traitement de fond. Ainsi, en dehors des épisodes de décompensation, le traitement préventif d’un nouvel épisode aigu doit être avant tout étiologique. Fort des échecs préalables, l’étude I-PRESERVE avait pourtant inclus des patients présentant les caractéristiques cliniques des registres s’étant intéressés à l’ICFEP, avec un âge moyen de 72 ans, une prédominance de femmes (60 %), un surpoids ou une obésité particulièrement fréquent (83 %), une étiologie de l’insuffisance cardiaque dominée par la cardiopathie hypertensive (64 %) et non la maladie coronarienne (25 %), dont près de la moitié (44 %) avait été hospitalisés dans les 6 mois précédents pour insuffisance cardiaque. Cependant, un taux moyen de NT-proBNP de 340 pg/ml chez des patients de cet âge, s’il n’est pas bas, est relativement peu élevé chez des patients nettement symptomatiques, près de 80 % étant en stade III-IV de la NYHA, ce qui conduit à discuter une seule origine cardiaque dans la genèse de leur dyspnée. De plus, il est surprenant de ne retrouver une hypertrophie ventriculaire gauche, cause essentielle de la dysfonction diastolique au cours de l’HTA, que chez 30 % des patients alors que 88 % présentaient des antécédents d’HTA. Quant à la dose cible d’irbésartan de 300 mg/j, elle ne peut être en cause, tout à fait comparable aux doses élevées d’ARA II précédemment utilisées dans toutes les études concernant l’insuffisance cardiaque systolique ou non et la dysfonction ventriculaire gauche, et ayant été atteinte par la grande majorité des patients (84 %). Les résultats, totalement neutres, avec un odds ratio à près de 1, tant pour le critère primaire composite, associant les décès totaux et les hospitalisations pour pathologies cardiovasculaires, que pour les nombreux critères secondaires, après pourtant un long suivi de 49,5 mois en moyenne, sont ainsi éloquents. Même l’incidence des hospitalisations pour insuffisance cardiaque, dont l’étude CHARM-Preserved avait laissé espérer qu’elle serait diminuée par les ARA II, n’est pas réduite ! Deux attitudes sont maintenant possibles, soit attendre les résultats de TOPCAT, qui teste l’intérêt d’un antagoniste des récepteurs de l’aldostérone dans cette pathologie, en pensant que la fibrose myocardique est essentielle dans la physiopathologie de ce type d’insuffisance cardiaque et que son inhibition par la spironolactone sera salutère, soit reconnaître que le concept même d’ICFEP est une erreur, tentant d’homogénéiser des maladies très différentes nécessitant chacune des thérapeutiques spécifiques ! Les ARA II pourraient alors renaître de leurs cendres, étant un des traitements les plus efficaces pour faire régresser à la fois l’hypertrophie ventriculaire gauche au cours de l’HTA et pour s’opposer à la survenue d’une fibrillation atriale, deux éléments déterminants dans la genèse de l’ICFEP. HF-ACTION : résultats mitigés de la réadaptation dans l’insuffisance cardiaque La présentation de l’étude HF-ACTION, le plus grand essai jamais réalisé pour apprécier les effets de la réadaptation sur la mortalité et les hospitalisations au cours de l’insuffisance cardiaque, ayant inclus à elle seule plus de patients que tous les autres essais conduits dans ce domaine jusqu’alors, était donc particulièrement attendue. Les résultats ne sont malheureusement pas à la hauteur de nos espoirs, le caractère significatif du bénéfice sur la mortalité étant diversement apprécié selon les méthodes statistiques utilisées. Cet essai prospectif randomisé a évalué, chez 2 331 insuffisants cardiaques en stade II à IV de la NYHA, ayant une fraction d’éjection ≤ 35 %, sous traitement médical optimal, plus de 90 % recevant un IEC et un bêtabloquant, l’effet d’un réentraînement à l’effort comportant, durant les 3 premiers mois, 36 séances d’exercice sur bicyclette ergométrique ou tapis roulant 3 fois par semaine, puis au-delà, un exercice physique régulier à domicile sur vélo ou tapis roulant conseillé à la fréquence de 5 fois 40 minutes par semaine, comparativement aux soins conventionnels adaptés aux recommandations pour l’insuffisance cardiaque, comportant également la pratique d’une activité physique. Une exploration cardiopulmonaire à l’effort a été réalisée à l’inclusion, retrouvant un pic VO2 moyen de 14,4 ml/kg/min, puis au 3 e, 12 e et 24 e mois. Les principaux critères évalués ont été la mortalité totale et le taux d’hospitalisation, mais les complications que pouvaient entraîner l’exercice physique ont aussi été étudiées. Au terme de 3 ans de suivi, il n’a pas été mis en évidence en analyse non ajustée de bénéfice significatif de l’exercice physique sur le critère primaire ou sur la mortalité qui baisse de 7 %. Cependant, après ajustement sur les facteurs pronostiques les plus importants (étiologie de l’insuffisance cardiaque, durée de l’activité physique, fraction d’éjection ventriculaire gauche et antécédents de fibrillation atriale), l’effet de l’exercice physique devient significatif pour le critère primaire, la mortalité totale qui diminue de 11 % (p 0,03) et pour le critère secondaire, la mortalité cardiovasculaire et les hospitalisations pour insuffisance cardiaque qui baisse de 15 % (p 0,03). Le bénéfice sur la mortalité totale semble légèrement plus important chez les femmes (RR : 0,68 ; IC 95 % : 0,83-1,00), dans les classes NYHA les plus sévères (RR : 0,85 ; IC : 0,73-1,00) et dans les étiologies non ischémiques (RR : 0,81 ; IC : 0,67-0,98). Quant à l’amélioration de la tolérance à l’effort, elle est apparue modeste, le pic VO2 augmentant de 0,7 ml/ kg/min dans le groupe entraîné versus 0,1 ml/kg/min dans le groupe témoin (p 0,0001). Cependant, cette étude confirme que la pratique d’un exercice physique encadré n’est pas dangereuse chez l’insuffisant cardiaque, les effets secondaires n’ayant pas été plus fréquents dans le groupe entraîné, notamment les chocs électriques chez les 40 % des patients porteurs d’un défibrillateur. Ces résultats mitigés peuvent être expliqués : – d’une part, par une adhérence moyenne à l’exercice physique constatée dans le groupe actif (50 à 60 minutes par semaine pour une cible de 120 minutes), seuls 30 % des patients ayant atteint les objectifs assignés de durée hebdomadaire d’exercice durant la période de suivi à domicile. Les résultats de l’évolution d’un score de qualité de vie plaident pour cette hypothèse. Celle-ci n’est améliorée significativement que les 3 premiers mois, avec ensuite une perte du bénéfice qui pourrait être liée à la diminution de l’adhérence au fil du temps ; – d’autre part, le caractère optimal du traitement du groupe témoin qui comportait également la pratique d’une activité physique d’endurance selon les dernières recommandations. Thérapie génique et cellulaire Étude CUPID. Hajjar et coll. (Mount Sinai, New York) ont présenté pour la première fois des résultats cliniques qui mettent en avant le bénéfice potentiel d’un traitement par thérapie génique de l’insuffisance cardiaque. L’étude pilote CUPID porte sur un petit effectif de 9 insuffisants cardiaques. L’objectif de cette étude de phase 1 reste la sécurité davantage que l’appréciation du bénéfice. Dans l’insuffisance cardiaque alors que la gestion du calcium intracellulaire est primordiale, notamment celui localisé en diastole dans le réticulum sarcoplasmique, la protéine de transport dite SERCA est moins fonctionnelle. Son rôle est d’assurer le retour du calcium dans le réticulum au cours de la diastole, calcium qui a servi en systole à la contraction des myofilaments. La down-régulation de SERCA explique en partie les taux élevés de calcium intracellulaire en diastole. L’objectif de cette équipe était de rétablir les taux de SERCA au moyen d’une construction qui fait appel à des adénovirus de petite taille transfectés pour SERCA2, les adeno-associated vectors (AAV) qui permettent une expression du gène cible prolongée avec une réponse immune minimale et un fort tropisme cardiaque. Ces particules ont été administrées au cours d’une simple coronarographie, en perfusion courte de 10 minutes. Des travaux précliniques montrent que ce moyen d’administration simple est efficace pour assurer la diffusion des particules de manière homogène. Le suivi montre sur le plan sécuritaire l’absence d’effet indésirable grave. Tous les malades étaient appareillés avec un DAI, un patient l’a utilisé de manière appropriée dans un contexte d’hypokaliémie. Différents paramètres fonctionnels (classe NYHA, test de marche, BNP) s’améliorent sous traitement. Les patients dont ces paramètres ne s’améliorent pas sont des sujets qui ont développé des anticorps neutralisants. Au total, cette première phase est assez encourageante pour justifier le lancement de la phase 2 actuellement en cours aux États-Unis. La régénération myocardique passe par l’amélioration de la vascularisation, l’angiogenèse étant un phénomène primordial qui a pour but de supporter la régénération musculaire proprement dite. L’équipe du Pr Losordo a présenté les bases de nouvelles approches thérapeutiques associant la réactivation de voies embryonnaires comme la voie Sonic Hedgehog qui
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