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Publié le  Lecture 14 mins

Faut-il mesurer la pression artérielle en dehors du cabinet médical ? Apports de l’automesure et de la MAPA

F. DIÉVART, Clinique Villette, Dunkerque

Face aux possibilités de mesurer la pression artérielle en dehors du cabinet médical, plusieurs considérations principales doivent être abordées pour établir l’utilité d’une telle méthode.
• Les appareils et techniques disponibles sont-ils fiables ?
• Les méthodes disponibles permettent-elles d’améliorer le diagnostic d’hypertension artérielle ?
• Les méthodes disponibles fournissent-elles des informations sur le pronostic du patient hypertendu, indépendantes de celles fournies par la mesure au cabinet médical ?
• Un traitement prescrit en fonction des paramètres enregistrés sur ces méthodes est-il associé à un gain en termes de réduction du risque cardiovasculaire comparativement à un traitement seulement prescrit en fonction de la mesure au cabinet médical ?

Considérant ces quatre interrogations, leur état d’évaluation en est à des stades différents et nous n’aborderons que des points particuliers concernant certaines de ces questions. Notamment, nous n’aborderons pas la fiabilité des techniques disponibles qui fait l’objet de recommandations spécifiques précisant, entre autres, que les appareils disponibles doivent être évalués par des comités indépendants et satisfaire à un certain nombre de critères. Apports de l’automesure et de la MAPA dans l’évaluation du diagnostic (encadré 1) Si l’automesure et la MAPA permettent de mieux apprécier le statut tensionnel d’un patient en termes de moyenne de pression artérielle sur 24 heures, elles permettent d’identifier deux formes particulières d’hypertension qui ne sont pas sans poser des problèmes dans la pratique : l’hypertension blouse blanche et l’hypertension artérielle masquée. L’hypertension artérielle blouse blanche (encadré 2) Le concept d’hypertension blouse blanche, repose sur la constatation que certains patients ont une pression artérielle élevée en présence d’un médecin alors qu’elle est normale en dehors d’un environnement médical. La mesure de la pression artérielle par des infirmières ou du personnel non médical, spécialement formé, semble réduire mais sans l’annuler. L’existence d’une hypertension artérielle blouse blanche ne peut donc être détectée que par l’automesure ou la mesure ambulatoire de pression artérielle. Paradoxalement, il n’a pas été mis en évidence de facteur prédisposant ou de type de personnalité particulier, voire de données biologiques ou physiologiques, qui puissent prédire l’existence d’une hypertension blouse blanche. Certains sujets sont même surpris de s’entendre dire qu’ils ont une authentique hypertension blouse blanche, alors qu’ils ne se sentent aucunement « stressés » en présence du médecin. La définition de l’hypertension blouse blanche est variable suivant les auteurs. En France, elle est définie par une PAS supérieure ou égale à 140 mmHg et/ou une PAD supérieure ou égale à 90 mmHg au cabinet médical lors de mesures répétées. La PA mesurée par automesure ou MAPA, en dehors du cabinet médical, est 135/85 mmHg. Valeur pronostique. Initialement, cette condition a été considérée comme bénigne, mais il existe dorénavant plusieurs éléments indiquant que le pronostic d’un patient ayant une hypertension blouse blanche pourrait être intermédiaire entre celui d’un normotendu et celui d’un hypertendu. Ainsi, de nombreuses études ont clairement montré que les patients ayant une hypertension artérielle persistante, c’est-à-dire enregistrée chez le médecin et en dehors du cabinet médical, ont un moins bon pronostic que les patients ayant une hypertension artérielle blouse blanche. Le nombre d’études ayant comparé le pronostic de patients ayant une hypertension blouse blanche à des normontendus est faible, et leurs résultats ne sont pas concordants : si quatre études ont montré un pronostic similaire entre ces deux populations, une cinquième a montré un moins bon pronostic chez les hypertendus blouse blanche comparativement aux normotendus. De grandes études prospectives spécifiques sont donc nécessaires pour mieux juger du pronostic des patients ayant une hypertension blouse blanche. Traiter ou ne pas traiter ? La plupart des recommandations pour la prise en charge des patients ayant une hypertension blouse blanche reposent sur l’attitude du Wait and See du fait des éléments suivants : • le pronostic de l’hypertension artérielle blouse blanche n’apparaît pas très différent de celui de la normotension ; • proposer un traitement à ce type de patient expose à l’inefficacité (ils gardent une hypertension blouse blanche malgré le traitement) et, par ailleurs, à une attitude délétère avec un risque d’hypotension et de symptômes en orthostatisme. Inversement, certains auteurs proposent une prise en charge thérapeutique sur les éléments suivants : • toutes les études épidémiologiques sont fondées sur la mesure de la pression artérielle effectuée par le médecin à son cabinet ; ces chiffres sont corrélés au risque cardiovasculaire ultérieur ; • dans tous les essais thérapeutiques contrôlés ayant validé le bien-fondé de la thérapeutique de l’hypertension artérielle, les mesures de référence pour la prise en charge sont celles qui ont été effectuées par le médecin ; • dans certaines études épidémiologiques, notamment l’étude de Tecumseh, il a été montré que les patients ayant une hypertension blouse blanche n’avaient pas les mêmes caractéristiques physiologiques (notamment en termes de résistances artérielles périphériques et de résistance à l’insuline) que les patients normotendus auxquels ils ne peuvent donc être assimilés. En France, les mesures de prise en charge usuellement proposées pour ce type de patients sont les suivantes : • une attention particulière doit être portée à la recherche d’une atteinte d’un organe cible, ce qui justifierait alors la mise en route d’un traitement ; • les facteurs de risque associés doivent être évalués et pris en charge spécifiquement ; • une mesure ambulatoire ou un contrôle selon une procédure validée d’automesure (« règle des 3 ») doit être effectuée tous les ans chez ces patients afin de dépister le passage éventuel à une hypertension artérielle persistante. L’hypertension artérielle masquée (encadré 3) Définition. Les patients dont la PA mesurée au cabinet par leur médecin est normale, alors que l’automesure tensionnelle à domicile et/ou la MAPA montre des valeurs élevées, ont un statut d’hypertension artérielle masquée. Quelques travaux ont indiqué que l’abus d’alcool, le tabagisme, la caféine et le manque d’activité physique étaient des facteurs corrélés à la présence d’une hypertension masquée. Valeur pronostique. Plusieurs études, dont l’étude SHEAF ( Self-Measurement of Blood Pressure at Home in the Elderly: Assessment and Follow-up), évaluant spécifiquement l’apport de l’automesure, démontrent que ce type de patients a un pronostic cardiovasculaire plus péjoratif que celui des patients normotendus au cabinet et à domicile et que ceux ayant un effet blouse blanche (normotendus à domicile avec une hypertension artérielle au cabinet). La prévalence de l’hypertension artérielle masquée est difficile à établir et semble variable selon les études : elle est ainsi chiffrée comme pouvant affecter de 8 à 49 % des sujets d’une population générale, d’après une analyse de Palatini publiée en 2004. La prévalence de l’hypertension masquée dépend du nombre de mesures de pression artérielle effectuées. Les causes et implications de cette condition clinique ne sont actuellement pas déterminées. Ohkubo T, Kikuya M, Metoki H et al. Prognosis of “masked” hypertension and “white-coat” hypertension detected by 24-h ambulatory blood pressure monitoring: 10-year follow-up from the Ohasama study. J Am Coll Cardiol 2005 ; 46 : 508-15. Apports de l’automesure et de la MAPA à l’évaluation du pronostic (encadré 4) De nombreuses études ont permis de démontrer que l’automesure et/ou la MAPA apportent non seulement des éléments pronostiques complémentaires à ceux fournis par la mesure usuelle au cabinet, mais que ces deux techniques permettent une meilleure appréciation du pronostic d’un patient que ne le permet la mesure usuelle de la PA. Cependant, les éléments corrélés de façon concordante au pronostic dans la plupart des études sont peu nombreux. PA des 24 heures Dans de nombreux travaux, la PA des 24 heures est apparue comme mieux corrélée à l’atteinte d’un organe cible (notamment à l’existence d’une hypertrophie ventriculaire gauche) et comme mieux corrélée au pronostic que la mesure occasionnelle effectuée par le médecin. Chez le patient âgé, c’est la PAS des 24 heures, et non la pression diastolique, qui est corrélée au pronostic. La valeur pronostique fournie par la mesure ambulatoire des 24 heures persiste même chez les patients recevant un traitement antihypertenseur. La différence de PA entre le jour et la nuit La différence de PA entre le jour et la nuit a, depuis les travaux de Verdecchia, été considérée comme un élément pronostique permettant de différencier des patients de plus mauvais pronostic (les non dippers ou patients dont la PA nocturne ne diminue pas ou diminue de moins de 10 % par rapport à la PA diurne). Le travail de Verdecchia a, par ailleurs, semblé être validé par une analyse fournie par l’étude SYST-EUR ( SYSTolic hypertension in EURope) où il est apparu, chez des patients âgés ayant une hypertension artérielle systolique isolée, que pour toute augmentation de 10 % du rapport PA nocturne/PA diurne, le risque d’événements cardiovasculaires augmentait de 41 % et cela, de façon indépendante de la valeur de la PA des 24 heures. Cependant, plusieurs travaux récents, notamment ceux de Björklund et Khattar, n’ont pas confirmé cette notion et tendent à la remettre en cause. Par ailleurs, dans l’étude SAMPLE ( Study on Ambulatory Monitoring of Pressure and Lisinopril Evaluation), la valeur de la PA nocturne n’a pas amélioré la prédictibilité de la régression de l’hypertrophie ventriculaire gauche fournie par la moyenne de pression des 24 heures. Enfin, dans l’étude d’Ohasama, la valeur moyenne de la PA diurne était un élément prédictif de la mortalité nettement plus puissant que la valeur nocturne. De ce fait, en 2005, l’apport de la valeur de PA nocturne et de son rapport avec la PA diurne est mal établi. Il est possible que les conclusions divergentes des études soient en relation avec la difficulté à relier la pression dite nocturne avec la pression artérielle de sommeil, c’est-à-dire de la difficulté encore actuelle à différencier les non dippers des insomniaques. La pression pulsée ambulatoire L’apport de l’évaluation de la pression pulsée enregistrée sur 24 heures a aussi été analysé en termes de corrélation au pronostic des patients hypertendus. Les travaux actuellement disponibles sont encore discordants pour conclure à l’existence d’une relation

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