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L'étude STAR : importance du choix de la bithérapie chez les patients hypertendus et avantages de l'association IEC/IC
P. SABOURET, hôpital de la Pitié-Salpêtrère, Paris

L’étude STAR (Study of Trandolapril-verapamil And insulin Resistance) montre que la stratégie thérapeutique associant le trandolapril au vérapamil permet un meilleur contrôle glycémique que celle associant un sartan à un diurétique chez les patients hypertendus à risque de développer un diabète.
Plus que jamais les maladies cardiovasculaires représentent un problème majeur de santé publique. En effet, un tiers des décès dans le monde est d’origine cardiovasculaire. À eux seuls, neuf facteurs de risque expliquent plus de 80 % de la morbi-mortalité cardiovasculaire, avec au premier plan l’hypertension artérielle, les dyslipidémies, le diabète et le tabagisme. Chacun de ces facteurs de risque est une variable continue pour laquelle la notion de seuil n’a qu’une valeur relative ; le cumul fréquent de ces facteurs de risque a un effet multiplicatif sur les événements cardiovasculaires majeurs (ECM), ainsi que l’a parfaitement illustrée récemment l’étude INTERHEART ( A global study of risk factors in acute myocardial infarction). La prise en charge moderne des patients hypertendus repose sur le niveau du risque cardiovasculaire absolu, évalué sur la présence d’autres facteurs de risque et/ou sur l’atteinte des organes cibles. La convergence des facteurs de risque incite à une stratégie thérapeutique qui permette un contrôle tensionnel efficace sans effet métabolique délétère. Le maintien d’un niveau glycémique optimal s’avère particulièrement pertinent chez les patients hypertendus, puisque les études épidémiologiques prospectives ont montré une prévalence plus élevée des anomalies glycémiques chez les patients hypertendus comparativement aux patients normotendus. En outre, l’étude ARIC ( Atherosclerosis Risk In Communities study) a objectivé une incidence de nouveaux cas de diabète 2,5 fois plus élevée chez les patients hypertendus que chez les normotendus. Le risque de diabète Les études interventionnelles ont mis en évidence un risque accru de développer un diabète sous bêtabloquants et/ou sous diurétiques. L’atteinte de l’objectif tensionnel, notamment pour la composante systolique, nécessite le plus souvent une polythérapie antihypertensive. D’après les résultats d’études randomisées récentes, on observe une moindre survenue des nouveaux cas de diabète sous une stratégie thérapeutique comprenant un bloqueur du système rénine-angiotensine (SRA) comparativement à une stratégie basée sur un bêtabloquant associé à un diurétique (études INVEST, ALLHAT, LIFE). Ces données ont été confortées par la publication de métaanalyses qui notent une augmentation significative de l’incidence de nouveaux cas de diabète avec les antihypertenseurs « classiques » (bêtabloquants, diurétiques) comparativement aux antihypertenseurs « modernes » (inhibiteurs de l’enzyme de conversion [IEC], inhibiteurs calciques, antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II [ARA II]). La controverse reste cependant ouverte puisque l’évolution des paramètres glycémiques constituait un critère secondaire de ces études et que les métaanalyses, bien que riches d’enseignements, sont soumises à des limites méthodologiques, qui ne permettent pas de conclusion ferme sur la meilleure stratégie permettant un contrôle tensionnel efficace allié à un maintien d’un profil glycémique favorable. Restaient également des questions non résolues concernant l’effet de faible dose de diurétique en monothérapie et surtout en association avec un bloqueur du SRA comparativement à un inhibiteur calcique associé à un IEC. Une étude randomisée s’intéressant spécifiquement au profil glycémique du patient hypertendu sous deux stratégies thérapeutiques modernes validées par des études randomisées (INVEST, LIFE) devenait pertinente, d’autant qu’il a été clairement démontré que la survenue d’un nouveau cas de diabète est un puissant facteur prédictif de mortalité globale. STAR Multicentrique, prospective et randomisée selon la méthode PROBE ( Prospective Randomised Open-label with Blinded outcome Evaluation), cette étude avait pour objectif d’évaluer spécifiquement deux stratégies thérapeutiques, validées sur la protection cardiovasculaire des patients hypertendus, en termes de préservation du contrôle glycémique chez des patients présentant une hypertension artérielle dans le cadre d’un syndrome métabolique. Méthodologie Les critères d’inclusion comprenaient : • des patients hypertendus, hommes ou femmes, > 21 ans, présentant un syndrome métabolique défini par : - une glycémie à jeun entre 1 g/l et 1,25 g/l ; - une HTA contrôlée avec une PAS 140 mmHg sous bithérapie ou une PAS comprise entre 130 et 160 mmHg sous monothérapie ; • des patients présentant au moins un des critères suivant : - un taux de HDL-cholestérol 40 mg/dl chez l’homme ou 50 mg/dl chez la femme, - un taux de triglycérides ≥150 mg/dl, - un tour de taille > 102 cm chez l’homme ou > 89 cm chez la femme. Le schéma de l’étude est résumé dans la figure 1. La méthodologie avait été clairement prédéfinie pour éviter tout biais, notamment sur de possibles « croisements thérapeutiques » entre les deux groupes de traitements. Figure 1. Star : Schéma de l’étude . Pendant la période de « wash-out », les patients ont reçu de la clonidine à la posologie de 0,1 mg, deux fois par jour si la PAS demeurait ≥ 160 mmHg et 180 mmHg ou la PAD était ≥ 100 mmHg et 110 mmHg, 2 semaines après l’arrêt des traitements antihypertenseurs prescrits avant l’inclusion des patients. Les patients devaient arrêter la clonidine 2 jours avant la mesure initiale ; en cas de PAS ≥ 180 mmHg et/ou PAD ≥ 110 mmHg, les patients ont été exclus de l’étude. La dose initiale était de 2/180 mg pour l’association trandolapril-vérapamil et de 50/12,5 mg pour l’association losartan-hydrochlorothiazide (HCTZ). La titration des deux stratégies thérapeutiques était effectuée, si nécessaire (PAS > 130 mmHg après 4 semaines de traitement), aux posologies de 4/240 mg pour trandolapril-vérapamil et de 100/25 mg pour le binôme losartan-HCTZ. Le protocole a autorisé l’ajout d’un antihypertenseur supplémentaire si la PAS demeurait ≥ 130 mmHg après 8 semaines, en évitant les effets de « croisement » entre les groupes. Une extension de 6 mois de traitement sous vérapamil LP/trandolapril a été instaurée pour tous les patients arrivés au terme de l’étude principale. Le critère primaire d’évaluation était représenté par l’évolution de la glycémie 2 h après une charge de glucose (HGPO) entre le niveau initial et celui atteint à la fin de l’étude. Les critère secondaires d’évaluation associaient : - l’évolution de l’insulinémie 2 h après charge de glucose (HGPO), - la mesure de l’HBA 1c, - l’apparition de nouveaux cas de diabète, définis par une glycémie à jeun > 1,26 g/l et/ou d’une glycémie 2 h après charge de glucose (HGPO) > 2 g/l, - la mesure de la pression artérielle (PAS et PAD), - la mesure de la fréquence cardiaque (FC). Résultats Au total, 240 patients hypertendus avec syndrome métabolique ont été randomisés entre une stratégie basée sur l’association trandolapril-vérapamil LP (n = 119) versus l’association losartan-hydrochlorothiazide (n = 121). Au total, 179 patients sur les 419 patients initialement recrutés n’ont pu être randomisés, car 143 n’ont pas satisfait aux critères d’éligibilité, 30 ne sont pas parvenus à la période de wash-out, et les résultats de 6 patients ont été perdus suite au passage du cyclone Katrina en Louisiane. Le suivi moyen est de 52 semaines après randomisation. Une hyperglycémie provoquée par voie orale (HGPO) et des évaluations cliniques ont été réalisées au début, à 12 semaines et à 52 semaines (ou à la fin du suivi de l’étude). Les caractéristiques cliniques des patients à l’entrée ne montrent pas de différence entre les deux groupes de randomisation et correspondent au profil des patients hypertendus à risque de développer un diabète en pratique courante, avec pour le groupe vérapamil LP-trandolapril un âge moyen de 55 ans, une légère prédominance féminine, une PAS moyenne à 145 mmHg, chez des hypertendus traités antérieurement, avec un IMC et un tour de taille confirmant l’obésité abdominale, qui est la pierre angulaire du syndrome métabolique. Concernant le critère primaire, l’association losartan-hydrochlorothiazide a entraîné une augmentation significative de la glycémie mesurée 2 heures après l’HGPO comparativement à la stratégie trandolapril-vérapamil LP (p 0,001) (figure 2). Cette dégradation du profil glycémique s’est exprimée dès la 12e semaine de traitement, période à laquelle tous les patients étaient supposés bénéficier de la stratégie thérapeutique optimale prédéfinie, visant à obtenir une PAS 130 mmHg, et ce que les patients du groupe losartan-HCTZ reçoivent la dose journalière de 12,5 ou de 25 mg d’hydrochlorothiazide. Figure 2. Résultats sur le critère principal. L’analyse des critères secondaires renforce les données du critère principal d’évaluation, en montrant une évolution plus favorable de l’hémoglobine glyquée (figure 3) sous la stratégie trandolapril-vérapamil LP, qui s’exprime dès la 12 e semaine (p 0,001) et se maintient à la fin du suivi (p = 0,027). Les résultats sur les taux plasmatiques d’insuline sont concordants avec un bénéfice de la stratégie trandolapril-vérapamil LP (p = 0,025), qui s’exprime dès la 12 e semaine (p = 0,037). Figure 3. Effets sur l’HBA 1c. Le maintien d’un meilleur profil glycémique sous trandolapril-vérapamil LP se traduit cliniquement par une diminution de la survenue des nouveaux cas de diabète, 2,5 fois moins nombreux que sous l’association losartan-HCTZ (p = 0,002), cette différence étant précocement significative (p = 0,007 à 12 semaines de randomisation) (figure 4). Figure 4. Apparition de nouveaux cas de diabète. Ces bénéfices métaboliques ont été obtenus à niveaux de pression artérielle et de fréquence cardiaque comparables. Commentaires L’étude STAR est la première étude randomisée à comparer deux stratégies thérapeutiques validées par des grandes études de morbi-mortalité sur un critère primaire portant spécifiquement sur le contrôle glycémique de patients hypertendus dont le risque cardiovasculaire est élevé, rendant cruciale l’optimisation de la prise en charge globale de leurs facteurs de risque. L’association trandolapril-vérapamil s’est avérée
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