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Prise en charge des dyslipidémies - Les données d'intervention
F. DIÉVART, Clinique Villette, Dunkerque

Nous disposons en 2006 d’un recul de plus de 40 ans dans l’évaluation de diverses stratégies hypolipémiantes et de nombreux essais et métaanalyses, mais le niveau d’évaluation des différentes stratégies commercialisées est très disparate.
Bénéfice des stratégies de modification des paramètres lipidiques Bénéfice de l’approche diététique De nombreux essais thérapeutiques ont évalué l’apport de l’approche diététique pour réduire la cholestérolémie et diminuer le risque coronarien et les résultats de plusieurs méta-analyses dont nous disposons ne sont pas uniformes. Une métaanalyse publiée en 2005 (17 essais menées sur plus de 100 000 patients) concluait que l’approche diététique permet une diminution moyenne et significative de la cholestérolémie totale de 10 % sans réduction de la mortalité totale (risque relatif : 0,97 ; IC95 % : 0,91-1,04) tant en prévention primaire que secondaire. Une métaanalyse précédente avait conclu que, dans le domaine de la prévention primaire, la diététique ne permet une réduction à long terme de la cholestérolémie que de 3 à 6 %, sans incidence significative sur la survenue des événements coronariens. Dans une 3 e métaanalyse de 2001 (27 études regroupant 30 902 sujets suivis en moyenne 2 ans), l’approche diététique seule était associée à une réduction significative des événements cardiovasculaires de 16 % (risque relatif : 0,84 ; IC95% : 0,72-0,99) sans effet significatif sur la mortalité cardiovasculaire (risque relatif : 0,91 ; IC95 % : 0,77-1,07) ni sur la mortalité totale (risque relatif : 0,98 ; IC95 % : 0,86-1,12). Au total L’effet modique de la diététique serait la conséquence d’un faible effet sur la cholestérolémie totale et serait lié à la difficulté à obtenir une pérennité des habitudes alimentaires préconisées. De ce fait, seule une certaine proportion de patients semble obtenir une diminution prolongée d’au moins 10 % de la cholestérolémie avec des résultats variables selon les données. Bénéfice du traitement par statine La métaanalyse des CCT (Cholesterol Treatment Trialists’ Collaborators) en 2005, a quantifié la relation entre diminution du LDL-cholestérol et risque d’événements cardiovasculaires dans 14 essais effectués avec les statines et ayant regroupé plus de 90 000 participants. Cette métaanalyse conclut à un lien fort et puissant entre la diminution du LDL cholestérol et la diminution des principaux événements cardiovasculaires majeurs. La relation entre la diminution du LDL et des événements est apparue linéaire en coordonnées semi-logarithmiques (figure 1). Figure 1. Relation entre diminution du LDL et diminution des événements coronariens majeurs dans la métaanalyse des CCT. Ce travail a donc pu fournir un modèle prédictif de l’effet des traitements hypolipidémiants en démontrant que pour toute diminution de 0,387 g/l de LDL-cholestérol (1 mmol/l), les statines permettent une réduction de : – 12 % la mortalité toutes causes (risque relatif : 0,88 ; IC95 % : 0,84-0,91 ; p 0,0001) ; – 19 % le risque de décès coronarien (RR : 0,81 ; IC95 % : 0,76-0,85; p 0,0001) ; – 9 % du risque de décès par AVC (RR : 0,91 ; IC 99 % : 0,74-1,11; p = 0,2) ; – 5 % le risque de décès par autre cause vasculaire (RR : 0,95 ; IC99% : 0,78-1,16; p = 0,5) ; – 5 % le risque de décès de cause non vasculaire (RR : 0,95 ; IC95% : 0,90-1,01; p = 0,1). Une métaanalyse de Gould A.L. de 1998 indiquait que pour toute diminution de 10 % de la cholestérolémie totale, le traitement par statine permet une réduction de 15 % de la mortalité cardiovasculaire (p 0,001) et de 11 % de la mortalité totale (p 0,001). Il faut souligner un problème imparfaitement résolu : une des principales différences entre ces deux métaanalyses est que l’une rapporte un bénéfice en fonction d’une modification absolue de la valeur de la cholestérolémie (effet observé pour une diminution de 0,387 g/l) et l’autre en fonction d’une modification relative (effet observé pour une modification de 10 %). Ces deux approches contribuent à fournir des modèles prédictifs de l’effet des statines qui sont différents et donc des évaluations du rapport bénéfice/risque et coût/efficacité qui seront différents (figure 2). Figure 2. Diminuer le LDL-C diminue de façon proportionnelle le risque coronaire. Ainsi, en postulant qu’un traitement par une posologie donnée d’une statine permet une réduction de 37 % de la cholestérolémie totale et LDL, la diminution absolue de la cholestérolémie totale sera de 0,74 g/l chez un patient dont la cholestérolémie totale est de 2 g/l et de 1,48 g/l chez un patient dont elle est initialement à 4 g/l. Or, en prenant en compte la méta-analyse de Gould, la diminution de la mortalité coronarienne serait identique chez ces deux patients, soit 55 % et, pour la métaanalyse de CCT, la réduction du risque de mortalité coronarienne serait de 38 % chez le patient dont la cholestérolémie totale était à 2 g/l et de 76 % chez le patient dont la cholestérolémie totale était à 4 g/l. Enfin, la modélisation paraît aussi dépendante d’autres éléments tels que la durée d’exposition au traitement, comme le montre la métaanalyse de Law. Dans une métaanalyse publiée par Law et coll. en 2003, il a été montré que pour toute diminution de 1 mmol/l de LDL-cholestérol (0,387 g/l), donc en prenant comme méthode une variation absolue de LDL, méthode qui tend à majorer le bénéfice en fonction du niveau initial de LDL-cholestérol, la réduction du risque d’événements coronariens a été constante et proportionnelle à la durée de l’essai (11 % la première année, 24 % la deuxième année, etc. tableau 1). Cette métaanalyse avait des résultats concordants avec celle de la CCT et permettait de juger de l’ampleur du bénéfice en fonction de la durée et de l’ampleur de la diminution du LDL-cholestérol. Ainsi, les essais thérapeutiques inclus dans cette métaanalyse pouvaient être divisés en trois catégories : – ceux dans lesquels la baisse du LDL a été en moyenne de 0,5 mmol/l, – ceux dans lesquels elle a été de 1,0 mmol/l, – ceux dans lesquels elle a été de 1,6 mmol/l. La réduction du risque coronarien est apparue proportionnelle à la réduction du LDL obtenue avec, pour une réduction moyenne de LDL-cholestérol de 1,6 mmol/l une réduction de l’incidence des événements ischémiques cardiaques de 51 % au-delà de la deuxième année de traitement (tableau 2). Indiquons par ailleurs que, quel que soit le mode d’expression des résultats, chacune des métaanalyses disponibles a permis de construire des droites de régression reliant de façon linéaire la diminution du cholestérol total ou la diminution du LDL et la diminution des événements coronariens. Il existe donc un ensemble important de travaux, tous concordants, que ce soient des essais thérapeutiques de grande puissance, telle l’étude HPS, ou des métaanalyses spécifiques, pour démontrer qu’il existe un lien direct, puissant et proportionnel entre la diminution du LDL cholestérol obtenue avec les statines et la diminution du risque d’événements coronariens. Cette relation constitue donc un fait. Plus encore, que ce soit dans les essais spécifiques ou dans les métaanalyses, il a été démontré que cette relation est indépendante du niveau de risque cardiovasculaire du patient traité, de ses caractéristiques démographiques (âge et sexe), de ses paramètres lipidiques (HDL, triglycéridémie) et cliniques (diabète, prévention primaire, prévention secondaire). Il est donc possible de conclure que, quelles que soient les valeurs de LDL cholestérol, leur diminution par une statine diminue le risque cardio-vasculaire. Bénéfice des autres classes thérapeutiques Le bénéfice des autres classes thérapeutiques est plus diversement apprécié selon que les analyses reposent sur les divers essais disponibles ou sur les métaanalyses, aux résultats parfois discordants. L’équipe de Lyon en 2000 faisait paraître dans La Presse Médicale une métaanalyse permettant d’apprécier l’effet des diverses stratégies thérapeutiques alors évaluées, en distinguant préventions primaire et secondaire (tableaux 3 et 4) : - en prévention primaire, ni les fibrates, ni les résines ni la diététique ne permettent de diminuer significativement la mortalité totale ; il semble même que les fibrates augmentent la mortalité totale par un excès de mortalité non cardiovasculaire et de mortalité coronaire ; - en prévention secondaire, parmi les fibrates, le gemfibrozil a dû être distingué du clofibrate car leurs effets paraissent opposés : globalement bénéfiques pour le gemfibrozil, globalement délétères pour le clofibrate. La diététique ne semble pas avoir d’effet global significatif, et l’acide nicotinique semble avoir un effet favorable sur le risque d’événements coronariens mortels et non mortels. Dans Archives of Internal Medicine paraissait en 2005 une métaanalyse des essais ayant évalué diverses stratégies thérapeutiques agissant sur les paramètres lipidiques et dont le critère primaire d’évaluation était la mortalité totale (tableau 5). Cette étude a fourni les résultats suivants et concordants : - les statines permettent de réduire significativement la mortalité totale (risque relatif : 0,87), tant en prévention primaire (risque relatif : 0,86) que secondaire (risque relatif : 0,78) ; - les fibrates n’ont aucun effet global sur la mortalité totale (risque relatif : 1,00) mais augmentent significativement le risque de mortalité en prévention primaire (risque relatif : 1,25) et n’ont aucun effet en prévention secondaire (risque relatif : 0,96) ; - les résines ne modifient pas significativement la mortalité totale (risque relatif : 0,84) tant en prévention primaire (risque relatif : 0,95) que secondaire (ou elles n’ont été évaluées que dans 2 essais ayant totalisé 203 patients) ; - la niacine ne modifie pas la mortalité totale (risque relatif : 0,96) et n’a pas été évaluée de façon suffisante en prévention primaire ; - les acides gras oméga 3 réduisent significativement la mortalité totale (risque relatif : 0,77), mais avec une hétérogénéité significative entre les études ; l’approche diététique n’a aucun effet sur la mortalité totale (risque relatif : 0,97), tant en prévention primaire (risque relatif : 0,99) que secondaire (risque relatif : 0,85). Au total, ce travail : –
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