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Pour notre pratique au quotidien
E. FERRARI, CHU de Nice

Faut-il revasculariser le myocarde des patients « à risque » avant une chirurgie lourde extracardiaque ? Voilà une vraie question pratique à laquelle nous sommes tous confrontés. Pour les patients devant bénéficier d’une chirurgie lourde extracardiaque, des recommandations conseillaient déjà de ne pas pratiquer de coronarographie, et donc de ne pas revasculariser le myocarde en l’absence d’argument pour une situation instable. La nouvelle étude randomisée de McFalls et al. est donc capitale. Avant chirurgie vasculaire, 510 patients ont été randomisés en deux groupes : un groupe de patients avec revascularisation myocardique (quelle que soit la technique) et un groupe de patients sans revascularisation. Tous ont été choisis parmi 5 859 patients devant bénéficier d’une chirurgie vasculaire. Ont été choisis les patients à haut risque, pour lesquels un cardiologue consultant jugeait qu’une coronarographie préopératoire était légitime en raison du haut risque a priori ou d’une ischémie documentée. Bien sûr, la coronarographie devait mettre en évidence des lésions revascularisables. La chirurgie pratiquée a été une cure d’anévrisme de l’aorte abdominale dans 33 % des cas, une chirurgie pour artérite des membres inférieurs dans 67 % des cas. À 30 jours, la mortalité est identique dans les deux groupes (3,1 vs 3,4 %) pour la période péri- et postopératoire. Le taux d’IDM défini par une élévation de la troponine postopératoire est équivalent dans les deux groupes (14 vs 12 %) de même que le taux d’IDM défini par une élévation de la troponine associée à des modifications ECG. Au suivi de 2,7 ans, la mortalité est de 22 % dans le groupe des patients revascularisés et de 23 % dans le groupe des patients non revascularisés. La revascularisation n’apporte aucun bénéfice chez ces patients, pourtant à haut risque, qui doivent bénéficier d’une chirurgie vasculaire lourde. Il faut noter que 85 % des patients étaient sous bêtabloquants, 74 % sous aspirine et 54 % sous statines. Cette étude conforte les recommandations déjà parues. Il faut bien comprendre que ces résultats signifient logiquement qu’il est inutile, dans la plupart des cas, de pratiquer une coronarographie préopératoire chez un patient stable, ce que les recommandations préconisaient déjà. Quelle dose de charge de clopidogrel chez les coronariens à dilater ? La dose habituellement recommandée, tirée des études publiées, est de 300 mg (6 cp) de clopidogrel. Depuis quelque temps déjà, de nombreux arguments orientent vers une dose de charge plus importante qui permettrait de « couvrir » un certain nombre de patients qui ne répondent pas suffisamment à la dose conventionnelle de 300 mg. Le travail d’Anguiolillo et al. va dans ce sens. En mesurant l’agrégation plaquettaire à 10 min puis 4 h et 24 h après une dose de 300 mg de clopidogrel, les auteurs notent que 44 % des patients ne répondent pas suffisamment à l’antiagrégant à 24 h ; cette mauvaise réponse étant définie par une diminution de l’agrégation 40 %. Le problème pratique est que 300 mg correspondent déjà à une prise de 4 cp. La dose de charge de 600 mg, préconisée ici, comme par de nombreux travaux auparavant, correspond à 8 comprimés ? Il serait opportun, faute de pouvoir obtenir une forme IV, que le laboratoire producteur se penche sur une forme galénique plus fortement dosée. Encore un argument en aveu de l’effet protecteur des statines en périopératoire d’une chirurgie lourde Cent patients devant « bénéficier » d’une chirurgie vasculaire ont été randomisés en deux groupes : placebo ou atorvastatine 20 mg. Le traitement était débuté 30 jours avant la chirurgie qui portait en particulier sur l’aorte dans 56 % des cas, sur les carotides dans 12 % des cas et sur les membres inférieurs dans près de 20 % des cas. Le critère de jugement était la survenue de décès vasculaires, d’infarctus, d’angor et d’AVC, tous ces événements étant « comptabilisés » à 6 mois. En l’occurrence, il existe une différence très significative sur la survenue d’un de ces critères durs à ce stade puisque 8 % des patients du groupe atorvastatine vs 26 % des patients du groupe placebo ont présenté un tel événement (différence significative p = 0,031). Il faut noter qu’environ 60 % des patients ont été opérés sous bêtabloquants et 40 % seulement sous aspirine. L’âge moyen était de 67 ans avec 30 % de patients qui avaient déjà présenté un IDM ; 70 % étaient hypertendus et 20 % diabétiques. Il s’agit donc bien des patients que nous rencontrons tous les jours et chez lesquels nous avons un avis à donner sur le risque et la meilleure conduite à tenir avant une chirurgie vasculaire lourde. Y a-t-il une connexion entre maladie thromboembolique veineuse et athérothrombose, en particulier coronaire ? L’équipe de Prandoni avait publié en 2003 une étude dans le New England Journal of Medicine qui allait dans ce sens. Chez des patients qui avaient présenté une thrombose veineuse profonde (TVP) ou une embolie pulmonaire (EP), les auteurs avaient mesuré l’épaisseur intima-média carotidienne et mis en évidence une paroi carotidienne plus pathologique chez les sujets ayant présenté une TVP ou une EP idiopathique comparativement à ceux qui avaient présenté une TVP ou une EP secondaire (c’est-à-dire avec une cause reconnue et réversible comme un alitement ou une chirurgie). Dans ce second travail de Becattini C et al., la même équipe compare la survenue d’événements cliniques artériels entre deux groupes de patients ayant présenté une maladie thromboembolique veineuse idiopathique ou secondaire. Sur un suivi de 38 mois chez 306 pa-tients qui avaient déjà présenté un premier épisode veineux ou une embolie pulmonaire, les auteurs notent la survenue d’un événement cardio-vasculaire artériel chez 20 patients du groupe idiopathique (n = 209) vs 2 dans le groupe secondaire (n = 151). Cela équivaut à 3,2 % d’événements artériels par patient et par an dans le groupe idiopathique vs 0,4 % dans le groupe secondaire (RR = 7,2 ; p = 0,001). Dans cette étude, les causes cardiaques sont la principale cause de décès, avant le cancer communément admis pour être la cause fréquente de décès chez ces patients. Il semble donc que les patients ayant présenté une « phlébite » ou une embolie pulmonaire sans cause reconnue soient à risque de présenter ultérieurement un IDM ou un AVC. Il est dommage que la comparaison n’ait pu être faite avec un groupe témoin n’ayant pas d’antécédent thromboembolique veineux. Cela semble cependant confirmer qu’il pourrait y avoir un lien entre le risque thrombotique veineux et le risque athérothrombotique artériel. Causes des morts subites chez les recrues militaires aux USA : résultats de 25 ans d’autopsies Ce type de registre bien malheureux mérite d’être diffusé pour que nous en tirions au moins un enseignement. Ainsi, tous les décès subits hors traumatisme, survenus entre 18 et 35 ans parmi les 6,3 millions de recrues américaines auront été autopsiées. Leur nombre est de 126 soit 13 pour 100 000/5 ans ; 86 % de ces morts subites sont rattachées à un effort. La cause générale retrouvée la plus fréquente est une anomalie cardiaque (51 %). Cependant, dans 35 % des cas, l’autopsie ne permet de retrouver aucune cause. Parmi les anomalies cardiaques retrouvées, les anomalies coronaires prédominent (61 %) parmi celles-ci, la plus fréquente est la naissance de la coronaire gauche depuis le sinus de Valsalva droit avec son cheminement entre l’aorte et l’artère pulmonaire ; une myocardite est en cause dans 20 % des cas, une cardiopathie hypertrophique dans 13 % des cas. Notons qu’une dysplasie arythmogène du ventricule droit n’est retrouvée qu’une seule fois. Devant un patient avec un antécédent récent d’ulcère gastrique guéri à traiter par aspirine, est-il préférable de passer au clopidogrel ou de continuer l’aspirine avec une protection gastrique ? Cette équipe chinoise apporte une réponse inattendue à cette question pratique. Chez 320 pa-tients traités par aspirine et ayant présenté un ulcère gastrique authentifié par gastroscopie, les auteurs, après traitement et guérison des ulcères (gastroscopie de contrôle), ont randomisé deux traitements différents : un traitement par clopidogrel et un traitement par l’association aspirine + ésoméprazole 20 mg. Les patients étaient revus avec un recul maximal de 12 mois. À ce terme, 8,6 % des patients traités par clopidogrel auront ressaigné de leur ulcère gastrique contre 0,7 % des patients sous aspirine + ésoméprazole : une différence largement en faveur du second traitement (p = 0,001). Il faut noter que la dose d’aspirine était de 80 mg/j. Toutes les récidives d’ulcère ont été authentifiées par une nouvelle gastroscopie. Ces résultats vont devoir faire repenser et réécrire les consensus ACC/AHA qui recommandaient de remplacer l’aspirine par le clopidogrel dès lors qu’il y a une toxicité gastrique (ex recommandation de grade IA). Il faut noter que les auteurs étaient partis du principe qu’un patient qui a présenté un saignement gastrique sous aspirine a 15 % de risque de ressaigner dans l’année si l’aspirine est redonnée sans protection. Il faut rappeler qu’en France, le coût d’un traitement par aspirine + inhibiteur de la pompe à protons est sensiblement identique à celui du clopidogrel. Lors d’un IDM aigu, les diabétiques ne tirent pas de bénéfice de l’abciximab dans l’angioplastie primaire ; en revanche, ils bénéficient du stenting Dans les premiers travaux sur les anti-GPIIb/IIIa, il émergeait que la présence d’un diabète est corrélée à un bénéfice particulier de cette famille d’antiagrégants, en particulier à un bénéfice de l’abciximab. Cette étude est une analyse ancillaire de CADILLAC ( Controlled Abciximab and Device Investigation to Lower Late Angioplasty Complications) portant sur 2 082 patients présentant un IDM aigu et qui évaluait sur un plan factoriel l’apport du stent comparativement au ballon seul et celui de l’abciximab comparativement au placebo. Avec un recul d’un an, les 17 % de patients
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