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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le  Lecture 10 mins

Syndrome de Wolff-Parkinson-White asymptomatique - Quelles explorations ? Quand décider un traitement et lequel ?

B. BREMBILLA-PERROT, CHU de Brabois, Vandoeuvre Les Nancy

Le syndrome de Wolff-Parkinson-White (WPW) est généralement bénin mais au moins 10 % des sujets asymptomatiques ou non ont une forme potentiellement maligne avec un risque de mort subite évalué à 0,1 à 0,6 % par an. Il s’agit de sujets ayant un faisceau accessoire à période réfractaire courte (< 240 ms) et ayant une tachycardie spontanée ou inductible. L’exploration électrophysiologique qui peut se faire par voie transoesophagienne est le moyen le plus fiable pour évaluer ce risque et est recommandée de la petite enfance à l’âge adulte surtout en cas d’activité sportive. L’identification d’une forme maligne conduit en effet à un traitement curatif par ablation du faisceau de Kent.
L’abstention thérapeutique est indiquée chez le sujet asymptomatique qui a une forme bénigne et peut pratiquer un sport sans réserve.

Le syndrome de Wolff-Parkinson-White (WPW) concerne 0,15 à 0,5 % de la population. L’incidence est un peu plus élevée chez les jeunes enfants car l’anomalie est susceptible de régresser spontanément durant les premières années de la vie (1). La découverte d’un syndrome de Wolff-Parkinson-White (WPW) chez un sujet asymptomatique doit conduire à rechercher des facteurs de risque de survenue d’une arythmie potentiellement grave, bien qu’il puisse s’agir d’une anomalie parfaitement bénigne dans une majorité des cas. En effet, des morts subites inaugurales (25 à 56 % des cas) ont été rapportées chez ces sujets (2). Le risque est néanmoins très faible puisque l’incidence est évaluée entre 0,0 % à 0,6 % par an (3, 4). De plus, certains syndromes de préexcitation ventriculaire disparaissent spontanément (5) chez les enfants en cas de période réfractaire effective (PRE) longue du faisceau accessoire. C’est pourquoi la prise en charge chez ces sujets reste discutée (tableau 1). La cause de la mort subite provoquée par un WPW est connue. On sait qu’elle est due à la survenue d’une fibrillation auriculaire conduite rapidement dans un faisceau accessoire à PRE courte et qui dégénère en fibrillation ventriculaire. Les facteurs de risque ont été rapportés par Wellens (6). Les facteurs favorisants sont : – le sexe masculin, – l’existence d’une circonstance mettant en jeu un haut tonus adrénergique comme le sport, – la PRE antérograde du faisceau accessoire courte avec une fibrillation auriculaire conduite par ce faisceau de Kent avec des cycles de moins de 200 ms. D’autres facteurs favorisants ont été signalés mais sont plus discutés (tableau 2). Comment évaluer le pronostic du syndrome de WPW ? Ces sujets asymptomatiques sont à faible risque d’évènements graves. Nous devons donc utiliser des techniques qui elles-mêmes ne comportent pas de risque, mais qui ont une bonne valeur diagnostique (7). Les méthodes non invasives ont malheureusement une faible valeur diagnostique. L’électrocardiogramme de surface est en faveur d’une forme bénigne si la préexcitation est intermittente mais cela n’est pas spécifique (1). L’effacement du WPW par l’injection d’un antiarythmique de classe I était considéré comme un élément en faveur d’une forme bénigne de l’affection, mais risquait de méconnaître quelquefois des formes graves de l’affection. L’enregistrement Holter ECG des 24 heures peut permettre d’enregistrer une tachycardie, mais l’interprétation est souvent difficile chez l’enfant. La méthode permet de s’assurer qu’aucun trouble du rythme non ressenti par un jeune enfant n’est enregistré. L’épreuve d’effort est certainement le moyen le plus fiable pour identifier une forme bénigne, si la préexcitation disparaît brutalement (8). Il faut se méfier d’un affinement progressif des QRS qui fait penser à tort que la préexcitation a disparu et qui risque d’aboutir à un faux positif de forme bénigne et à méconnaître un risque de mort subite. Une autre difficulté liée à l’épreuve d’effort est que bien souvent le syndrome de préexcitation ventriculaire ne disparaît pas. C’est l’étude électrophysiologique qui est actuellement l’examen de référence pour évaluer le pronostic d’un syndrome de préexcitation ventriculaire. Elle a aussi d’autres intérêts (tableau 1) : - Elle permet de confirmer ou non un syndrome de préexcitation ventriculaire en cas d’ECG douteux. - Cette étude sert également à déterminer la localisation du faisceau de Kent par l’aspect de l’ECG en préexcitation maximale, importante quand l’aspect de l’ECG peut faire craindre une localisation antéroseptale. - Elle sert à mesurer la PRE du faisceau de Kent, considérée actuellement comme courte si elle est ≤ 250 ms chez l’adulte, 240 ms chez l’enfant à l’état de base. Sous isuprel elle devient inférieure à 200 ms (figure 1). - Elle permet de déclencher des tachycardies par réentrée orthodromique (descente par les voies normales et remontée par le faisceau de Kent) ou antidromique (circuit inverse). Cette induction est rare chez le sujet réellement asymptomatique (10 % des cas). - Elle sert à évaluer la vulnérabilité auriculaire, c’est-à-dire la susceptibilité de voir se déclencher une fibrillation auriculaire. L’induction est aussi fréquente chez les sujets symptomatiques et asymptomatiques, dans 20 à 50 % des cas suivant la méthode utilisée. En effet, on induit plus facilement une fibrillation auriculaire par une étude électrophysiologique conventionnelle intra-cavitaire que par voie trans-oesophagienne (9). L’induction d’une fibrillation auriculaire conduite rapidement par le faisceau accessoire (6) permet d’identifier un sujet ayant une forme maligne de l’affection (figure 2). Pappone et al (10) a récemment ajouté le déclenchement d’une tachycardie par réentrée comme un facteur de risque d’événement, mais il s’agit surtout d’un facteur de risque d’événement rythmique. L’incidence des formes qualifiées comme malignes varie donc de 15 à 25 % des cas suivant les études et le protocole d’étude électrophysiologique. Cela veut dire également que 75 à 80 % des sujets ont une forme bénigne de l’affection qui doit être respectée et pour lesquels le sport est autorisé sans nécessité de recourir à une ablation (figure 1). Figure 1. Détermination de la période réfractaire du faisceau de Kent (280 ms) et induction d’une tachycardie orthodromique. Pas de tachycardie inductible = forme bénigne à respecter. Figure 2. Déclenchement d’une fibrillation auriculaire conduite rapidement aux ventricules par le faisceau de Kent (latéral gauche). Cette étude électrophysiologique a pourtant été discutée jusqu’en 2003, puisque l’identification des formes malignes n’avait pas permis jusqu’alors de démontrer que dans le suivi, il apparaissait réellement un risque d’accident (11, 12). C’est à nouveau l’équipe italienne (13) qui a montré que chez des enfants (14) et des adultes de moins de 35 ans (13), soit 224 sujets, non traités, le déclenchement d’une arythmie rapide était associé à la survenue de trois accidents mortels. L’étude électrophysiologique elle-même comporte quelques problèmes. L’anesthésie générale est nécessaire chez le jeune enfant, et les complications dues au cathétérisme ne sont pas exceptionnelles chez l’enfant (15) et l’adulte, puisqu’elles sont notées dans 3 % des cas de l’étude italienne (14). La voie endocavitaire impose une irradiation (16). C’est pourquoi lorsqu’elle est possible, la voie trans-oesophagienne peut être préférée chez les sujets asymptomatiques car elle donne exactement les mêmes renseignements (17, 18) et elle peut être effectuée avec le même matériel que pour la voie endocavitaire ; elle peut surtout être faite sans hospitalisation ; elle est rapide et elle est faisable chez des jeunes enfants dès l’âge de 6 ans (18). La technique a également des désavantages ; elle peut provoquer une douleur thoracique qui est actuellement beaucoup plus faible depuis que la stimulation peut être faite avec un stimulateur biphasique. Il est possible de ne pas arriver à stimuler l’oreillette vers l’œsophage dans environ 1 à 5 % des cas. Les deux nouvelles études de Santinelli et Pappone retrouvent les critères classiques : PRE du faisceau accessoire ≤ 250 ms chez l’adulte (19), ≤ 240 ms chez l’enfant, et le déclenchement d’une tachycardie comme étant les facteurs prédictifs d’accident (20). Chez l’enfant, la présence de faisceaux multiples est un autre facteur de risque (20). Chez l’enfant enfin, on peut se poser la question de répéter l’examen ; de façon exceptionnelle s’il apparaît des symptômes et éventuellement chez l’enfant de moins de 12 ans chez lequel une tachycardie orthodromique aurait été induite ; si la PRE du faisceau accessoire est > 240 ms, on peut espérer une dégénérescence spontanée de ce faisceau (5). La recherche d’un risque éventuel de mort subite doit-elle être effectuée chez tous les sujets asymptomatiques ? Il n’y a pas de consensus actuellement établi pour les investigations à réaliser à l’exception du sportif de compétition. Le tableau 3 tente de résumer les pratiques habituelles de la plupart des équipes. L’exploration du sujet asymptomatique est préconisée dès la petite enfance jusqu’au moins 35 ans pour Pappone (14). Pour notre part nous pensons qu’il n’y a pas de limite supérieure car les formes malignes existent également chez les sujets âgés (21). Elle est obligatoire à tous les âges pour le sportif de tout niveau avant signature d’un certificat d’aptitude sportive et dans le cas de certains métiers avec activités physiques ou susceptibles de mettre en jeu la vie d’autrui (conducteur de bus, pilote, etc.). Les recommandations récentes de la société européenne de cardiologie imposent un bilan complet comprenant une étude électrophysiologique chez les sportifs asymptomatiques avant de les autoriser à faire de la compétition (22). Grâce à ce bilan obligatoire, il est devenu exceptionnel qu’un syndrome de préexcitation ventriculaire cause la mort subite d’un athlète (23). La difficulté vient du fait qu’actuellement le sport de haut niveau se pratique dans des tranches d’âge de plus en plus étendues. Le problème est donc de savoir s’il faut explorer un syndrome de WPW à tous les âges de la vie. Chez le jeune enfant d’abord on sait que la fibrillation auriculaire est exceptionnelle avant l’âge de 10 ans en l’absence de cardiopathie associée (5, 18). Les morts subites ont été rapportées à partir de l’âge de 10 ans (14, 18, 24) sauf dans l’étude de Sarrubi (25) qui a rapporté une mort subite chez un enfant de 8 ans. Ces données concernant la bénignité habituelle du syndrome de WPW avant l’âge de 10 ans, ont été remises en cause par l’étude de Pappone et al (14), mais il faut noter que certains de ces enfants n’étaient pas réellement asymptomatiques, car l’enregistrement Holter ECG montrait la présence d’accès de fibrillation auriculaire à conduction rapide caractéristiques d’une forme maligne spontanée de l’affection et imposant un traitement. Chez les adultes, il

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