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Études

Publié le  Lecture 15 mins

AHA - Zoom sur trois études

A. CASTAIGNE, hôpital Henri Mondor, Créteil

AHA 2004

Tous les congrès ne peuvent pas apporter des nouvelles sensationnelles. Il est cependant trois études dont on reparlera certainement dans l’avenir : ce sont les études PEACE, l’étude menée chez les insuffisants cardiaques afro-américains et l’étude CAMELOT.

L’étude PEACE Une étude négative qui, pourtant, déclenche des réactions passionnées et contradictoires. Son objectif principal était d’évaluer l’effet d’une dose de 4 mg de trandolapril sur un critère composé comportant la mort cardio-vasculaire, l’infarctus du myocarde et les revascularisations coronaires. Intérêt des IEC dans l’IC et la dysfonction VG après infarctus du myocarde Revenons sur les raisons qui ont conduit à la réalisation d’une telle étude. Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) ont été étudiés dans le traitement de l’insuffisance cardiaque et dans la dysfonction ventriculaire gauche après l’infarctus du myocarde. Dans ces deux indications, il a été démontré qu’ils provoquent une réduction significative du risque de décès et d’hospitalisation pour poussée d’insuffisance cardiaque. Mais dans toutes les études (SAVE, AIRE, TRACE et SOLVD), il avait été observé que le traitement provoquait une diminution du risque d’infarctus du myocarde. Ce résultat, qui ne faisait pas partie des critères de jugement définis a priori dans ces études, a été expliqué par des propriétés bénéfiques des IEC sur le fonctionnement de l’endothélium et par la suppression des effets nocifs de l’angiotensine II sur le myocarde et sur les vaisseaux. Bénéfice des IEC chez des sujets athéromateux n’ayant pas de dysfonction VG La question a ensuite été posée de savoir si ce bénéfice pourrait être observé dans d’autres situations et, en particulier, chez des sujets athéroscléreux n’ayant pas de dysfonction ventriculaire gauche. La première étude ayant testé cette hypothèse était l’étude HOPE. Les malades étaient des athéroscléreux sévères ayant, pour la plupart, plus d’une localisation de l’athérosclérose. La majorité avait une maladie coronaire connue et documentée ; 40 % d’entre eux étaient diabétiques. Ils n’avaient pas de signes d’insuffisance cardiaque. On se souvient que la prescription de 10 mg de ramipril a permis de réduire la survenue des décès, des infarctus du myocarde et des AVC ; toutes ces différences étaient significatives. La deuxième étude a été l’étude EUROPA. Tous les malades inclus dans cette étude étaient des coronariens documentés ; très peu de patients avaient une autre localisation de l’athérosclérose. Le pourcentage de diabétiques était de 12 % et aucun malade n’avait de signe d’insuffisance cardiaque. Dans cette étude, le perindopril, prescrit à la dose de 8 mg, a permis de réduire la morbi-mortalité de cause coronaire et en particulier le risque d’infarctus du myocarde. On attendait donc que l’étude PEACE vienne confirmer ces données. Plus de 8 000 patients coronariens documentés ont été tirés au sort pour recevoir, soit 4 mg de trandolapril, soit un placebo. Ils ont été suivis en moyenne près de 5 ans. L’âge moyen était de 64 ans, 55 % avaient eu un infarctus du myocarde, 72 % avaient eu une revascularisation coronaire, 17 % étaient diabétiques et 45 % étaient hypertendus. Les facteurs de risque étaient bien contrôlés au moment de la randomisation : la PA était, en moyenne, à 134/78 mmHg et la cholestérolémie à 1,92 g/l. La créatinine moyenne était à 1 mg/dl. La fraction d’éjection moyenne était de 58 % et seulement 15 % des patients avaient une fraction d’éjection comprise entre 40 et 50 %. Les patients recevaient le traitement classique de l’insuffisance coronaire : 60 % recevaient des bêtabloquants, 95 % un traitement antithrombotique et 70 % un traitement hypocholestérolémiant. Les résultats ont été tout à fait décevants : pour le critère infarctus du myocarde qui avait jusqu’ici toujours été abaissé de façon significative, il n’y a aucune différence. De même la mortalité cardio-vasculaire et la fréquence des AVC n’ont pas été abaissées par le traitement. Résultats de la métaanalyse de HOPE, EUROPA et PEACE Le tableau résume les données de ces trois études. On constate que, pour l’étude PEACE, les quatre paramètres de jugement, mortalité totale, mortalité cardio-vasculaire, fréquence des AVC et fréquence de l’infarctus du myocarde sont identiques dans les deux groupes de traitement ; à l’inverse dans HOPE, les quatre différences étaient significatives et dans EUROPA la proportion d’infarctus du myocarde était significativement abaissée. Lorsqu’on dispose d’un tel tableau, on dispose de deux techniques : l’une consiste à considérer que, dans ces trois études, les malades inclus étaient tous des athéroscléreux et majoritairement des coronariens et qu’il est, dès lors, légitime d’analyser ces trois études simultanément en faisant une métaanalyse. Si l’on se livre à cet exercice, on constate qu’il existe bien une différence en faveur des groupes IEC et on peut en tirer la conclusion que les athéroscléreux connus, qu’ils aient ou non une dysfonction ventriculaire gauche, doivent recevoir un IEC. Cette technique, la métaanalyse, n’est pas répréhensible sous réserve de disposer des données individuelles de tous les patients des trois études, de vérifier qu’il n’existe pas d’autres études ayant évalué cette question et d’appliquer les techniques statistiques appropriées. C’est, par exemple, ce qui a été fait, en d’autres temps, pour la prescription de bêtabloquants après l’infarctus du myocarde. On disposait d’une dizaine d’études, certaines très positives, d’autres non significatives et même certaines suggérant un effet délétère du bêtabloquant. Cependant, la métaanalyse de ces études amenait à la conclusion que les bêtabloquants étaient efficaces après un infarctus du myocarde. Je ne crois pas que, dans ce cas particulier, la métaanalyse soit d’actualité. Il est légitime de faire une métaanalyse de plusieurs études conduites suivant un protocole identique sur des patients similaires et inclus à peu près à la même période. Entre HOPE et PEACE, le temps a passé très vite en termes de maladie coronaire. Les objectifs de contrôle de la pression artérielle ou du cholestérol, les indications de la revascularisation coronaire et son efficacité ont évolué très rapidement. Dans HOPE, 40 % des pa-tients avaient eu une revascularisation coronaire, ils étaient 72 % dans PEACE, de même la prescription de statines est passée de 29 à 70 % et celle de bêtabloquants de 40 à 60 %. Il ne m’apparaît donc pas légitime de mélanger, dans une analyse commune, des athéroscléreux traités aussi différemment. Un chiffre du tableau doit attirer l’attention, c’est celui du rapport mort cardio-vasculaire, mortalité totale dans les groupes placebo de HOPE et de PEACE. Dans HOPE, 2 décès sur 3 sont d’origine cardio-vasculaire, dans PEACE c’est moins d’1 décès sur 2. Cette différence suggère que les coronariens de PEACE étaient tellement bien traités, y compris dans le groupe placebo, qu’ils avaient tout loisir de mourir d’autre chose que de leur maladie coronaire. Ce n’était pas le cas pour les malades de HOPE et d’EUROPA. On a évoqué l’hypothèse que les malades de l’étude PEACE auraient pu recevoir une dose insuffisante de trandolapril. Malheureusement, cette hypothèse ne tient pas : en effet, il y a bien deux différences significatives en faveur du groupe trandolapril par rapport au groupe placebo ; il y a eu significativement moins d’hospitalisations pour insuffisance cardiaque et significativement moins de nouveaux cas de diabète. Ces deux effets pharmacologiques, bien connus dans les études menées avec les IEC ou les bloqueurs de l’angiotensine II, montrent que la dose de trandolapril était pharmacologiquement efficace. De plus, on notera que c’est la même dose de trandolapril qui a été utilisée dans l’étude TRACE qui avait montré une efficacité tout à fait superposable à celle du captopril 150 mg/j ou du ramipril 10 mg chez des sujets ayant eu un infarctus avec dysfonction ventriculaire gauche séquellaire. En conclusion Il faut donc (mais mon avis est loin d’être universel) se résoudre à admettre que certains coronariens, non diabétiques, non ischémiques et/ou traités par les bêtabloquants, ayant une fonction ventriculaire gauche normale et tout à fait bien traités quant aux facteurs de risque classiques (pression artérielle et cholestérol), ne tirent pas bénéfice d’un traitement par un IEC. C’est aussi ce que suggère B. Pitt dans l’éditorial qui accompagne cet article du New England et qui se permet un jeu de mot à propos des IEC pour cette catégorie de patients « may they rest in peace » (qu’ils reposent en paix). Cette boutade, dont le New England est habituellement avare, vient à contre-courant des recommandations établies depuis quelques années qui conseillaient pour tous les coronariens de l’aspirine, des bêtabloquants, des IEC et des statines. Ce diktat automatique avait l’avantage de la simplicité et de pouvoir être imposé sous forme d’ordonnances préremplies. Il faut probablement en revenir et se poser la question, patient par patient, de l’utilité de chacun de ces traitements, et en particulier celle de l’utilité des IEC. Le traitement de l’insuffisance cardiaque des Afro-Américains La publication d’un essai thérapeutique réalisé sur un groupe ethnique particulier a secoué le monde de la cardiologie. Comment justifier la réalisation d’une étude sur un groupe défini par une appartenance ethnique ? - Tout d’abord, le caractère afro-américain était défini par le patient lui-même, en référence à son ascendance, ce qui est toujours mieux que de penser que le médecin effectuait lui-même la classification. - Ensuite, ce n’est pas tout à fait la première fois qu’on s’intéresse à des groupes très sélectionnés, même si l’on évite soigneusement de faire explicitement référence à l’ethnie. Après tout, l’étude WOSCOPS qui n’avait sélectionné que des mâles vivant dans l’ouest de l’Écosse avait bien eu pour but, a priori, de sélectionner un type particulier d’humains caractérisés par une prévalence considérable de la maladie coronaire ; on connaît les problèmes d’extrapolation que cette étude a posés quand il a fallu imaginer la quantité de facteurs de risque que devraient avoir une fermière gersoise pour arriver à

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