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Les principales études en cardiologie interventionnelle
Pierre ROBERT, Benoît LATTUCA, Département de cardiologie, CHU Caremeau, Université de Montpellier, Nîmes

Voici un résumé des principales études en cardiologie interventionnelle présentées au congrès de l'ACC 2022
• Étude BIOGUARD (1) – Moniteur implantable post-infarctus (figures 1 et 2) Contexte Une des principales complications de l’infarctus reste la survenue de troubles du rythme. Au-delà de l’impact pronostique évident des troubles du rythme ventriculaires, les arythmies supraventriculaires induisent aussi un risque embolique et un ajustement du traitement antithrombotique augmentant le risque hémor- ragique. Une meilleure détection de ces arythmies grâce à l’utilisation d’un moniteur implantable au décours de l’infarctus pourrait améliorer le pronostic de ces patients grâce à un traitement plus précoce. Ce même raisonnement a par exemple été utilisé pour le développement du Cardio-MEMs (Abbott Vascular) de manière à anticiper les décompensations cardiaques et ajuster ainsi le traitement. Méthodes Design de l’étude Étude randomisée multicentrique internationale (60 centres en Europe, en Australie et aux États-Unis). Population Au total, 790 patients de 72 ans d’âge moyen ayant présenté un infarctus dont 51 % ayant pré- senté un SCA sans sus-décalage du segment ST (NSTEMI) et 49 % un SCA avec sus-décalage du ST (STEMI). Les patients devaient être à haut risque cardio-embolique défini par un CHA 2DS 2VASc ≥ 4 (hommes) ou ≥ 5 (femmes) et avec une FEVG > 35 % (FeVG moyenne : 53 %). Les patients avec antécédent de fibrillation atriale ou porteur d’un stimulateur cardiaque étaient exclus. Les patients étaient randomisés en 2 groupes : 1) traitement conventionnel et 2) implantation d'un moniteur ECG implantable avec télésurveillance en plus du traitement conventionnel. En cas de détection de troubles du rythme, les patients étaient traités selon les recommandations internationales (anticoagulation, ablation par radiofréquence, mise en place d’un pacemaker/défibrillateur, antiarythmiques...). Critère de jugement principal Critère combiné incluant décès cardiovasculaire et hospitalisation pour insuffisance cardiaque, syndrome coronarien aigu, AVC, embolie systémique ou saignement majeur. Suivi moyen : 2 ans et demi. Résultats principaux Au cours du suivi, une arythmie a été détectée chez 67 % des patients du groupe moniteur implantable. Le taux d’arythmies traitées était significativement plus élevé dans le groupe moniteur implantable que dans le groupe suivi standard(39 % contre 6 % ; HR 5,9 ; p 0,0001). Il s’en est suivi plus de modifications de traitement avec en particulier l’instauration d’un traitement anti- coagulant chez 40 % des patients et des ajustements de dose de bêtabloquants chez un quart des patients. Il est retrouvé une tendance en faveur d’une baisse du critère de jugement principal dans le groupe ayant bénéficié du moniteur implantable sans atteindre la significativité statistique (HR 0,84 ; IC95% : 0,64-1,10 ; p = 0,21). En revanche, en ne considérant que les patients pris en charge pour un NSTEMI, une réduc- tion significative de 31 % (HR 0,69 ; IC95% : 0,49-0,98) est observée dans le groupe moni- teur implantable. Interprétation La surveillance systématique avec un Holter implantable n’est pas bénéfique après un infarctus même chez les patients à haut risque cardio-embolique. Néanmoins, bien qu’il s’agisse d’une analyse en sous-groupe, cette stratégie semble intéressante pour les patients ayant présenté un NSTEMI. Il sera intéressant d’analyser plus précisément les caractéristiques de la population dans les différents sous-groupes car on sait que les patients pris en charge pour un NSTEMI sont fréquemment plus âgés et présentent plus de comorbidités que dans le cadre d’un STEMI (2) ce qui pourrait expliquer au moins en partie ces résultats. L’étude SCAFA (NCT04276155, N. Delarche - CH de Pau) pourrait apporter des données complémentaires dans cette thématique. Cette étude a en effet pour objectif principal d’adapter le traitement anticoagulant au décours d’un SCA en fonction de la survenue ou non d’une arythmie atriale avec l’utilisation d’un Holter implantable systématique. Dans l’attente de ces données complémentaires, il apparaît ainsi nécessaire de cibler plus précisément la population pouvant tirer profit d’une surveillance systématique en tenant compte du risque cardio-embolique mais aussi certainement de la FeVG, de la présentation clinique et du résultat de la revascularisation coronaire. • Étude FLAVOUR (3) Imagerie ou hémodynamique dans les lésions coronaires intermédiaires (figure 3) Contexte Nous savons que le pronostic de la maladie coronaire est influencé par de multiples critères. L’anatomie des lésions et leur degré de sténose angiographique, les caractéristiques de la plaque d’athérome et les conséquences physiologiques de la sténose sont notamment à prendre en compte. L’ensemble de ces caractéristiques doit être apprécié pour proposer une revascularisation adaptée. Au-delà de l’angiographie seule, la FFR ( Fractional Flow Reserve) et l’imagerie endocoronaire telle que l’IVUS ( IntraVascular Ultrasound Imaging) permettent d’évaluer plus précisément les lésions coronaires. La FFR permet de confirmer le retentissement hémodynamique d’une sténose mais aussi d’apprécier le résultat post-angioplastie et fait désormais partie de l’arsenal quotidien du cardiologue interventionnel avec un impact clinique démontré. L’IVUS permet quant à elle une analyse morphologique de la plaque coronaire, une préparation optimisée des lésions par l’évaluation des calcifications par exemple et une optimisation de l’implantation du stent pour limiter le risque de mal-apposition, de resténose ou de thrombose de stent. Ces deux techniques n’avaient en revanche jamais été comparées à ce jour et l’objectif de cette étude était ainsi de comparer les résultats cliniques de l’angioplastie guidée par FFR ou par IVUS. Méthodes Design Étude randomisée multicentrique de non-infériorité (inclusion en Chine et Corée). Population Au total 1 682 patients avec des sténoses coronaires jugées intermédiaires (40-70 %) ont été randomisés pour une évaluation soit par FFR, soit par IVUS. Critère de jugement principal Critère combiné décès/infarctus/nouvelle revascularisation. L’indication d’angioplastie était portée sur une FFR ≤ 0,8 et en IVUS soit sur une surface ≤ 3 mm 2 soit entre 3 et 4 mm 2 avec une sténose ≥ 70 %. Suivi moyen : 2 ans. Résultats principaux Chez les patients avec des sténoses coronaires jugées intermédiaires, l’angioplastie guidée par IVUS est non inférieure à l’angioplastie guidée par FFR avec une différence absolue de -0,4 % en ce qui concerne la survenue du critère de jugement principal et un intervalle de confiance en dessous de la marge de non-infériorité de 2,5 %. Le taux d’angioplastie était significativement plus bas dans le groupe FFR (33 % vs 58 %). D’autre part, bien qu’il s’agisse d’une analyse en sous-groupe, les résultats cliniques semblent meilleurs chez les patients ayant un résultat d’angioplastie jugé optimal en IVUS. Interprétation L’implication clinique de cette étude est que la FFR reste un outil fiable pour poser l’indication d’angioplastie en cas de lésions jugées intermédiaires même si l’IVUS semble pouvoir optimiser le résultat d’angioplastie avec un signal encourageant sur les événements cliniques. Une analyse post-hoc est prévue pour comparer l’impact socio-économique des deux pratiques. Cette étude comporte néanmoins des limites. Seuls les patients avec sténoses jugées intermédiaires étaient inclus et seules la FFR et l’IVUS ont été étudiées alors que d’autres techniques d’imagerie et de physiologie sont aujourd’hui utilisées (QFR et OCT par exemple). Les nouvelles méthodes d’évaluation hémodynamique sans uti-isation de guide coronaire comme la QFR pourrait en effet faciliter encore la procédure avec des premières données apparaissant intéressantes (4). Il apparaît par ailleurs difficile de comparer un résultat hémodynamique global post-angioplastie à une optimisation fine de l’apposition d’un stent avec un impact démontré sur la resténose. Il est probablement plus intéressant de combiner imagerie et physiologie pour lutter contre les limites de l’angiographie. Reste à définir plus précisément la place de l’imagerie endocoronaire dans la maladie stable avec de nombreuses études internationales actuellement en cours l’évaluant en particulier dans les lésions coronaires complexes (OCCUPI - NCT03625908 ; OCTOBER - NCT03171311 ; ILUMIEN IV - NCT03507777). • Étude CLASP-TR (5) Traitement percutané de l’insuffisance tricuspide (figures 4 et 5) Contexte Tout comme le ventricule droit, la fuite tricuspide est restée peu étudiée pendant de nombreuses années. Il s’agit pourtant d’une valvulopathie qui reste fréquente avec une fuite tricuspide significative retrouvée chez environ 4 % des sujets de plus de 75 ans. Cette valvulopathie est par ailleurs associée à un pronostic très péjoratif avec une mortalité à 10 ans supérieure à 75 % (6). La mortalité en cas de chirurgie tricuspide isolée semble très élevée (estimée à 10% dans des séries rétrospectives récentes) et le traitement médical seul peu efficace. La fermeture bord à bord par voie percutanée qui a déjà montré des résultats encourageants à 1 mois (7) apparaît ainsi comme une nouvelle technique séduisante mais qui nécessite des évaluations complémentaires. Cette étude a ainsi comme principal objectif l’évaluation de la faisabilité et de la sécurité du système de réparation bord à bord PASCAL dans la fuite tricuspide. Méthodes Design Étude de sécurité, prospective, observationnelle, multicentrique (inclusion aux États-Unis). Population Au total 65 patients avec un âge moyen de 77 ans présentant une fuite tricuspide fonctionnelle ou dégénérative sévère ayant bénéficié du clip PASCAL en position tricuspide. Les patients porteurs d’un stimulateur cardiaque étaient exclus. Critère de jugement principal Critère composite incluant mortalité cardiovasculaire/AVC/infarctus/intervention percutanée ou chirurgicale/complications rénales graves/hémorragie grave. Suivi : 12 mois. Résultats principaux Il est retrouvé un succès d’implantation dans 91
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