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Cœur et sport

Publié le  Lecture 10 mins

Les différents niveaux d’activité physique aux différents âges de la vie

Martine DUCLOS, Hôpital Gabriel-Montpied, service de médecine du sport et d’explorations fonctionnelles, CHU de Clermont-Ferrand ; INRAE, UNH, CRNH Auvergne ; Clermont Université, Université d’Auvergne, Unité de nutrition humaine, Clermont-Ferrand

Les progrès dans l’analyse des accéléromètres tri-axiaux permettent aux chercheurs d’identifier avec précision les variations d’activité physique (AP) selon l’âge tout au long de la vie, et de décrire les variations d’AP selon le type d’intensité, incluant l’AP de faible intensité (non mesurable par questionnaire) ainsi que les comportements sédentaires. Les questionnaires sont soumis à des biais de surestimation, mais ils permettent d’avoir accès à des données qualitatives (différencier les types d’AP : AP lors des transports, AP de loisirs, AP domestiques). Malheureusement, nous ne disposons pas en France actuellement d’études de cohortes utilisant à la fois accélérométrie et questionnaires et ceci depuis l’enfance jusqu’aux seniors.

Le niveau d’activité physique diminue tout au long de la vie : mesures par accélérométrie (données internationales) L’étude longitudinale de la cohorte de la Gateshead Millennium Study (ville du nord-est de l’Angleterre) permet de suivre la période critique de l’enfance et de l’adolescence (1). Les données d’AP ont été recueillies par accélérométrie chez 545 enfants de façon répétée : à 7, 9, 12 et 15 ans et analysées sous forme de trajectoires. Toutes les trajectoires d’AP totale diminuent à partir de 7 ans, ce qui signifie que l’AP totale ne diminue pas à partir de l’adolescence, mais que le déclin commence dès 7 ans. Il n’y a pas de différence entre les sexes pour l’AP totale. Pour l’AP d’intensité modérée à élevée, seuls 19 % des garçons maintiennent une AP d’intensité modérée à élevée suffisante et relativement stable pendant les 8 ans de suivi. Au total, cette étude, confirmée par d’autres ultérieurement, montre que le déclin de l’AP commence dès l’enfance, et non pas à l’adolescence et que plus de 80 % des enfants et adolescents ont un niveau d’AP insuffisant (recommandations : au moins 60 min par jour d’AP d’intensité modérée à élevée). En parallèle la sédentarité augmente de façon non linéaire passant de 51 % du temps éveillé à 7 ans à plus de 75 % à 15 ans (2). La plus forte augmentation est observée entre 9 ans et 12 ans, mais elle augmente à chaque temps de mesure. En moyenne le temps de sédentarité augmente de 24 minutes par an. La fragmentation du temps passé assis diminue avec une diminution du nombre et de la durée des ruptures des temps de sédentarité de 7 à 15 ans. Les données accélérométriques des cohortes de 2003 à 2006 de la NHANES ( National Health and Nutrition Examination Survey : étude transversale d’un échantillon de population représentatif de la population américaine, n = 12 529) ont été utilisées pour quantifier l’AP totale ainsi que l’AP par type d’intensité tout au long de la vie à l’aide de courbes de percentiles stratifiées selon le sexe et l’âge, depuis l’âge de 6 ans jusqu’à 80 ans (3). Les résultats confirment que l’AP totale diminue de l’enfance à la fin de l’adolescence (de 6 à 19 ans) (figure 1). Les niveaux d’AP totale à l’âge de 19 ans sont comparables aux niveaux mesurés à l’âge de 60 ans. Puis au début de l’âge adulte (de 20 à 30 ans), l’AP totale augmente, se stabilise pendant la quarantaine (de 31 à 59 ans) puis commence à diminuer régulièrement (figure 1). Ce profil est identique chez les hommes et les femmes, mais il existe des différences entre les sexes au cours de la vie. Pendant l’adolescence et le début de l’âge adulte, les hommes ont une AP plus élevée que les femmes surtout pour l’AP d’intensité modérée à élevée. En revanche, ils présentent une diminution plus précoce de l’AP totale à la quarantaine puis tout au long du processus de vieillissement et un temps de sédentarité plus élevé. Dans les deux sexes, quel que soit l’âge, l’AP de faible intensité représente la majorité du type d’AP réalisé tout au long de la vie, la quantité maximale d’AP de faible intensité étant observée vers 20-30 ans puis elle diminue avec l’âge. Le temps passé à des comportements sédentaires évolue inversement au temps d’AP : il augmente progressivement tout au long de la vie. Chez les adultes il est bien démontré qu’un temps total de sédentarité élevé et une faible fréquence de rupture des temps de sédentarité sont associés à une augmentation de la mortalité globale et à une augmentation des risques cardio-métaboliques et à certains cancers (4). Figure 1. Évolution de la sédentarité (haut), de l’AP de faible intensité (milieu) et de l’AP d’intensité modérée à élevée (bas) au cours de la vie (6 à 84 ans) chez les hommes (colonnes de gauche) et les femmes (colonnes de droite) (courbes de percentiles : noir 95 %, gris 90 %, jaune 75 %, violet 50 %, cyan 25 %, bleu 10 %, vert 5 %) (3). Les données françaises : mesures par questionnaires L’AP diminue dès l’enfance : résultats chez les enfants et les adolescents Le Report Card 2022 (RC2022)a propose pour la quatrième fois depuis 2016, une évaluation de l’AP et de la sédentarité des enfants et des adolescents français, mais aussi des actions, stratégies et politiques portées par les acteurs locaux, territoriaux, institutionnels et gouvernementaux. Les principales données disponibles en France sont issues d’enquêtes épidémiologiques (Esteban 2014-2016 (5) ; INCA 3 (6) ; HBSC 2017-2018 (7)) et montrent les résultats suivants : État des lieux en fonction du sexe : – la moitié des garçons (50,7 %) et un tiers des filles (33,3 %) âgés de 6 à 17 ans atteignent les recommandations de 60 minutes d’AP d’intensité modérée à vigoureuse par jour (8) ; – la puberté est un des marqueurs du déclin de l’activité physique, quel que soit le sexe. 70 % des garçons et 56 % des filles, âgés de 6 à 10 ans, atteignent les recommandations contre seulement 34 % des garçons et 20 % des filles de 11- 14 ans et 40 % des garçons et 16 % des filles de 15-17 ans (8) ; – le sexe est un déterminant important dans la diminution de l’AP. À partir de 11 ans, la variation de la diminution dans la prévalence des atteintes de recommandations en AP est plus grande chez les filles (64 %) comparée aux garçons (53 %) (8). État des lieux en fonction de l’âge L’enquête HBSC montre une diminution du pourcentage d’enfants atteignant les recommandations entre 2014 et 2018, quel que soit l’âge de l’enfant. Pour les enfants âgés de 11 ans, le pourcentage atteignant les recommandations est passé de 25 à 17 % chez les garçons, et de 11 à 9 % chez les filles. Pour les enfants âgés de 13 ans, le pourcentage atteignant les recommandations est passé de 16 à 14 % chez les garçons, et de 9 à 7 % chez les filles. Pour les enfants de 15 ans, le pourcentage atteignant les recommandations est passé de 14 à 11 % chez les garçons, et de 6 à 4 % chez les filles. En ce qui concerne les comportements sédentaires, deux enquêtes nationales, INCA 3 (menée en 2014-2015) et ESTEBAN (menée en 2014-2016) ont mesuré le temps d’écran chez les enfants et les adolescents français. À l’échelle nationale, il n’existe pas de données représentatives plus récentes pour ce comportement. En moyenne, les enfants et les adolescents français passent 3 à 4 heures quotidiennement devant un écran. Cette estimation varie d’une à deux heures selon l’enquête, l’âge et le sexe (5,6). Seulement 34,6 % des 6-10 ans, 17 % des 11-14 ans et 8,4 % des 15-17 ans passeraient moins de 2 heures quotidiennement devant un écran (5). La proportion d’enfants passant plus de 3 heures par jour devant un écran est inversement associée au niveau d’étude du représentant de l’enfant, chez les garçons comme chez les filles (5). Le niveau de sédentarité est plus élevé encore chez les adolescents les plus âgés (15-17 ans) et chez les jeunes issus des milieux les moins favorisés (6). Selon l’étude ESTEBAN menée en 2014-2016, chez les garçons, 49,3 % des 6-10 ans, 27,5 % des 11-14 ans et 12,9 % des 15-17 ans passent moins de trois heures par jour devant un écran (cumulant le temps de télévision, ordinateur et console de jeux). Ces valeurs atteignent 59,8 % des 6-10 ans, 32,2 % des 11-14 ans et 29,0 % des 15-17 ans chez les filles. De plus, des données plus récentes du Centre national d’appui au déploiement en activité physique et lutte contre la sédentarité (CNDAPS) sur le déploiement du dispositif ICAPS (Intervention auprès des collégiens centrée sur l’activité physique et la sédentarité) ont été collectées de 2020 à 2021 sur 283 collégiens et ont montré qu’en moyenne, les collégiens déclarent passer 4 h 27 devant un écran chaque jour (CNDAPS, 2020). Au total, pour les enfants, les chiffres sont particulièrement préoccupants : moins de 10 % des enfants et adolescents européens atteignent les recommandations de 60 min d’AP quotidienne (accéléromètres) et le temps total passé assis quotidien occupe 45 % de la journée à 7 ans contre 75 % de la journée à 15 ans (accéléromètres) (2). Le temps passé assis augmente de façon exponentielle lors de l’entrée en primaire, période à laquelle le temps de classe rajoute de nombreuses heures de temps contraint, passé assis. Ceci explique l’alerte exprimée par l’ANSES en nov. 2020 : 66 % des enfants de 11 à 17 ans présentent un risque sanitaire préoccupant, caractérisé par le dépassement simultané des deux seuils sanitaires (plus de 2 heures de temps-écran [l’ANSES restreint la sédentarité au temps d’écran] et moins de 60 minutes d’AP par jour). Autre constat : 49 % présentent un risque sanitaire très élevé avec plus de 4 h 30 de temps-écran journalier et/ou moins de 20 minutes d’AP par jour. Les étudiants sont plutôt actifs physiquement… mais sédentaires Chez les étudiants, l’Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité (ONAPS) et l’ANESTAPS ont réalisé une enquête en 2022 sur les comportements des étudiants vis-à-vis de l’AP et sportive et de la sédentarité. 18 759 étudiants ont répondu à l’enquête en ligne dans 71 universités françaises (67,5 % de femmes et 31 % d’hommes). L’analyse des questionnaires révèle que les étudiants sont globalement actifs physiquement, 41,8 % d’entre eux déclarant pratiquer une AP ou sportive au moins 5 fois par semaine. Tous types d’AP et toutes intensités confondues, ils comptabilisent en moyenne 10 h 30 par semaine de pratique d’AP. Les filles pratiquent 1 h 30 d’AP par semaine en moins que les garçons. Les étudiants en filière STAPS ont une durée d’AP ou sportive significativement plus élevée que les autres filières avec 5 h 20 de pratique en plus par semaine. Au contraire, les étudiants en filière santé ont une durée d’AP significativement plus faible que les autres étudiants (2 h 35 de pratique d’activité physique en moins). La durée de pratique hebdomadaire évolue par ailleurs en fonction de l’année d’études. Sans prendre en compte les étudiants en STAPS, les étudiants de première année sont moins actifs que les étudiants des années supérieures. Seuls les

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