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Prothèses valvulaires percutanées : déjà demain
J.-L. MONIN, CHU Henri Mondor, Créteil

ESC et WWC
Le développement des prothèses valvulaires aortiques percutanées constitue certainement la nouveauté la plus marquante de ces trois dernières années en pathologie valvulaire. À l’instar de l’angioplastie coronaire il y a vingt ans, cette technique deviendra vraisemblablement une alternative courante au remplacement valvulaire chirurgical dans un avenir proche.
Dans la continuité, les techniques de plastie mitrale percutanée commencent à se développer et les prothèses mécaniques percutanées issues de la nanotechnologie sont déjà à l’étude. Pour le reste de cette cuvée 2006, on retiendra les registres multicentriques sur l’endocardite, l’échographie 3D-temps-réel et le scanner multicoupes pour la pathologie mitrale. Prothèses valvulaires percutanées/plastie mitrale percutanée Implantation percutanée de la prothèse aortique Cribier-Edwards : suivi à moyen terme C. Tron et al [2570] Pour la troisième année consécutive, l’équipe de Rouen a présenté les résultats de la première prothèse aortique implantable par voie percutanée, inventée par Alain Cribier et commercialisée par Edwards (figure 1). Rappelons que cette prothèse est actuellement réservée aux patients les plus graves : rétrécissement aortique en classe IV NYHA avec plusieurs comorbidités entraînant un risque opératoire > 20 %. La technique et le matériel ont évolué (2 tailles de prothèses actuellement disponibles, diminution de calibre des cathéters, transition vers une implantation rétrograde (abord artériel fémoro-iliaque) grâce à un cathéter flexible facilitant le franchissement de la crosse aortique. Figure 1. Les deux premières bioprothèses implantables par voie percutanée, mises au point par deux équipes françaises, actuellement en cours de validation clinique. Ce qu’il faut retenir des résultats présentés sur les 37 premiers patients implantés en France : • le taux de succès élevé (75 %) malgré l’utilisation de la voie antérograde (transseptale, plus difficile techniquement) dans la plupart des cas, • l’amélioration hémodynamique spectaculaire après implantation (surface valvulaire de 0,6 ± 0,1 cm 2 à 1,7 ± 0,1 cm 2, p 0,0001), • de même que l’amélioration fonctionnelle constante. Le taux de survie relativement bas à moyen terme (37 %) s’explique en grande partie par des décès d’origine extracardiaque (essentiellement par cancer, insuffisance rénale ou sepsis), compte-tenu du terrain extrêmement défavorable des patients traités. Remplacement valvulaire aortique percutané Session organisée par CoreValve La prothèse CoreValve (figure 1) est chronologiquement la deuxième bioprothèse percutanée après la Cribier-Edwards à connaître un développement clinique. Au cours de cette session, les résultats de la dernière étude clinique menée avec cette prothèse ont été présentés par C. Ruiz (New-York, USA), ainsi que plusieurs exemples cliniques par J.-C. Laborde (Toulouse, France). P. Serruys (Rotterdam, Pays-Bas) a résumé les caractéristiques et résultats actuels avec ces deux prothèses (tableau 1). Ces résultats montrent que, chez des patients à haut risque, la mortalité opératoire rapportée avec ces prothèses percutanées est réduite de moitié comparativement au risque chirurgical théorique estimé par l’EuroSCORE, avec un taux de succès d’implantation > 80 %. En 2006, deux nouveaux essais ont débuté : • REVIVE (Cribier-Edwards) qui doit inclure 90 patients dans 15 centres Européens, • et COR-2006-2 (CoreValve) prévu pour 100 patients dans 12 centres en Europe et au Canada. À noter que les critères d’inclusion de ces deux essais sont moins sévères que précédemment (profil de risque des patients moins élevé). P. Serruys a ensuite évoqué le futur possible avec des prototypes de prothèses mécaniques issues de la nanotechnologie actuellement à l’étude (eNitinol™ Membrane, PercValve™) ; ces prothèses, extrêmement fines, pourraient être chargées sur des cathéters de 10 French pour une implantation percutanée par voie artérielle rétrograde. À voir lors des prochaines éditions de l’ESC/AHA si ces prothèses futuristes tiennent leurs promesses. Plastie mitrale percutanée : première expérience clinique L.-L. Rodriguez et al [P5200] La technique d’Alfieri, adaptée pour la voie percutanée, consiste en la mise en place d’un ou deux clips sur la portion médiane des deux feuillets mitraux, créant ainsi un double orifice. L’expérience la Cleveland Clinic, dans le cadre de l’étude EVEREST 1 ( Endovascular Valve Edge-to-edge REpair STudy), regroupe 12 tentatives d’implantation par voie antérograde (transseptale). Les patients inclus avaient une insuffisance mitrale de grade ≥ 3/4, d’origine dégénérative (prolapsus, n = 6) ou restrictive (cardiomyopathie, n = 6). Malgré un échec de procédure et un AVC sans séquelle, aucun décès n’est à déplorer dans cette série. Une réduction significative de l’insuffisance mitrale a été obtenue grâce à la mise en place d’un seul clip (n = 6 patients, temps moyen de procédure : 2 h 30 min) ou de 2 clips (n = 5 patients, temps moyen = 5 h pour les 3 premiers, réduit à 3 h pour les 2 derniers). Ces résultats sont donc très préliminaires et les techniques de plastie mitrale percutanée vont devoir faire la preuve de leur fiabilité et surtout de leur efficacité à long terme. Endocardites sur prothèse ou sur valves natives Endocardite sur prothèse ou sur pacemaker : données du registre international ICE C.-K. Naber et al [3454] Le registre ICE ( International Collaboration on Endocarditis) regroupe 61 centres répartis dans 28 pays en Europe et aux USA. Parmi les 2 761 cas d’endocardite inclus entre janvier 2000 et août 2005, on dénombre 787 patients (29 %) ayant une prothèse valvulaire (n = 472, 17 %) ou autre matériel de type pacemaker ou défibrillateur implantable (n = 315, 12 %). L’échocardiographie a confirmé le diagnostic d’endocardite dans 88 et 93 % des cas et la chirurgie a été pratiquée en phase aiguë dans 49 et 59 % des cas d’endocardites sur prothèse ou sur pacemaker, respectivement. La répartition des germes et le taux de complications sont détaillés dans le tableau 2. À retenir la forte prévalence des endocardites à staphylocoque doré et une mortalité globale comparable dans les deux groupes, malgré un taux de complications plus élevé en cas d’endocardite sur prothèse, comparé aux autres dispositifs intracardiaques. Complications cérébrales de l’endocardite F. Thuny et al [3455] Cette étude bicentrique (Marseille, hôpital de La Timone et Amiens) regroupe 385 patients avec un diagnostic établi d’endocardite sur valve native, suivis de manière prospective. Une complication cérébrale est survenue chez 85 patients au total (22 %) dont 20 complications survenues après le diagnostic d’endocardite (5 %). Les facteurs prédictifs indépendants des complications neurologiques sont la localisation mitrale et une endocardite à staphylocoque doré ; les complications cérébrales post-diagnostic sont reliées au staphylocoque doré et à la taille des végétations (> 10 mm, mesurée par ETO). La mortalité à 6 mois des complications cérébrales est de 20 % dans cette série et la chirurgie précoce (pratiquée en moyenne au 10 e jour après le diagnostic) a un effet bénéfique sur la mortalité à 6 mois (6 vs 38 %, p = 0,001) en intégrant le fait que les patients non opérés avaient un score de Glasgow et un état général plus péjoratifs que les patients opérés. Diabète et endocardite F. Chirillo et al [3457] Dans une série italienne de 227 patients avec diagnostic d’endocardite, parmi lesquels 28 patients diabétiques (12 %), le délai du diagnostic, la localisation valvulaire et la fréquence des abcès paravalvulaires sont comparables entre diabétiques et non- diabétiques. En revanche, la fréquence d’endocardite à staphylocoque aureus est plus élevée chez les diabétiques (36 % vs 19 %, p = 0,04) et le diabète apparaît comme un facteur de risque indépendant de décès hospitalier (39 % vs 20 %, OR = 2,49 ; IC95% : 1,10-5,62, p = 0,02) et de mortalité opératoire (OR = 4,56 ; IC95% : 1,02-20,2, p = 0,04). Endocardite plurivalvulaire E. Villacorta Arguelles et al [3459] Dans une dernière série multicentrique espagnole concernant une cohorte de 574 endocardites dont 95 endocardites plurivalvulaires, une fois de plus, le staphylocoque doré est le germe le plus fréquent (23 %) et la chirurgie précoce est pratiquée dans un quart des cas (26 %), essentiellement pour insuffisance cardiaque réfractaire (79 %) ou processus infectieux non contrôlé (42 %). L’atteinte multivalvulaire est associée à un plus fort taux d’insuffisance cardiaque (64 vs 47 %, p = 0,003), d’insuffisance rénale (43 vs 33 %, p = 0,069) et de chirurgie en urgence (71 vs 52 %, p = 0,001). Cependant, la mortalité hospitalière n’est pas plus élevée en cas de localisation plurivalvulaire (32 vs 28 %, p = 0,426) ; cela s’explique probablement par le recours plus fréquent à une chirurgie précoce dans ce cas. Insuffisance mitrale postinfarctus Une session complète fut dédiée à l’insuffisance mitrale ischémique, prouvant que les travaux de L. Piérard et P. Lancellotti ont stimulé la recherche sur le sujet. Insuffisance mitrale après syndrome coronaire aigu L. Perez De Isla et al [3677] Première étude multicentrique espagnole regroupant 300 patients (âge = 67 ± 13 ans ; 72 % d’hommes) avec un syndrome coronarien aigu (SCA) sans sus-décalage de ST. Au décours de l’épisode aigu, une insuffisance mitrale (IM) est retrouvée dans 42 % des cas (126 patients), d’importance minime à modérée pour la plupart. Après un suivi moyen d’un an, le seul facteur prédictif indépendant pour la mortalité est la présence d’une IM (RR = 5,0, IC95% : 1,03 - 24,4 ; p = 0,04). Cependant, compte-tenu de l’absence de dysfonction ventriculaire gauche (VG) sévère ou de remodelage ventriculaire, les auteurs n’expliquent pas le mécanisme de l’IM (extension de l’ischémie ?) ni par quel biais elle influence le pronostic. Facteurs prédictifs des échecs d’annuloplastie dans l’IM ischémique J. Mage et al [3678] L’équipe de J.-G. Dumesnil et P. Pibarot (Saint-Foix, Canada) a mesuré la surface sous la tente (tenting area), l’angle entre feuillet mitral postérieur et plan de l’anneau et la distance coaptation/plan de l’anneau (figure 2) chez 30 patients consécutifs avant chirurgie pour IM ischémique (annuloplastie simple). Un échec de plastie, défini par une vena contracta de l’IM > 3 mm, est retrouvé dans 7 cas
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