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Angioplastie coronaire ambulatoire - Faisabilité et financement
Marc BRAMI, Fédération de l’hospitalisation privée-médecine, chirurgie, obstétrique ; Philippe COMMEAU, président du GACI

Grâce aux progrès réalisés dans sa prise en charge, l’angioplastie coronaire pourrait, sous certaines conditions, entrer dans le champ de l’hospitalisation de jour « ambulatoire » (entrée et sortie le même jour). Parmi les freins s’opposant à cette évolution, la question du financement de la structure hospitalière pour cette activité est souvent avancée.
D’où l’idée de cette approche de l’impact des modalités de financement sur les modalités de prise en charge. Préambule : la tarification à l’activité et le principe de la construction des tarifs La tarification à l’activité mise en place à partir de 2004 dans les établissements de court séjour a succédé à un mode de financement totalement hétérogène et inéquitable. Dans le secteur public, la dotation globale de financement ne permettait aucune évaluation ni de l’activité déployée ni de la qualité des soins, et l’iniquité de traitement entre établissements avait été identifiée de longue date. Dans le secteur privé soumis à Objectif quantifié national, la tarification à l’acte qui existait alors ne permettait pas plus d’assurer l’adéquation entre financement et activité dans la mesure où le prix unitaire des prestations (PJ, FSO, etc.), variables selon l’établissement, reposait sur des bases exclusivement historiques sans aucun rapport avec la réelle mobilisation de ressources. La T2A s’était donné pour objectif de ramener de l’équité dans le financement des établissements de santé, sur le principe : « à activité égale, financement égal », au moins au sein de chacun des secteurs (public, privé), ce qui est à présent le cas. Par ailleurs la T2A n’a jamais eu pour principe de financer le séjour d’un malade à la hauteur exacte des ressources engagées, mais seulement d’équilibrer un case mix en rémunérant chaque séjour par le tarif moyen national du Groupe homogène de séjour dans lequel le séjour est groupé. Tout repose alors sur les modalités de calcul de ce tarif moyen national. Cette mission est confiée à l’Agence technique pour l’information sur l’hospitalisation (ATIH) qui procède à partir de données recueillies chaque année dans un échantillon d’établissements volontaires, mettant en œuvre une comptabilité analytique spécifique. A partir de ces données, l’ATIH calcule un « coût de production constaté par séjour » qu’elle ramène au périmètre du GHS, en excluant tout ce qui n’est pas « payé » par le GHS : les dispositifs médicaux implantables (DMI) – dans le cas de la cardiologie : essentiellement les stents ou les stimulateurs, etc. –, les suppléments pour journées en unité de soins intensif, voire de réanimation, voire de surveillance continue, et en secteur privé, les honoraires des médecins libéraux (y compris pour les actes d’imagerie, et de laboratoire, etc.). L’ATIH définit ainsi chaque année, et pour chaque GHM, un « Tarif issu des coûts » (TIC), en général très peu différent d’une année sur l’autre, qui lui permet de construire une échelle de hiérarchisation des tarifs sur laquelle elle distribue la part de l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) hospitalier dévolue aux tarifs des GHS, en s’efforçant, depuis l’injonction donnée par la Cour des Comptes en 2012, renouvelée chaque année par les différents cabinets ministériels, de fixer les tarifs de l’année au plus près des TIC. La comptabilité analytique utilisée pour ce recueil distingue les charges directes qu’il est possible d’affecter au séjour (temps d’occupation du bloc opératoire ou du plateau technique, médicaments administrés ou dispositif implantable utilisé pour le séjour particulier, etc.), et les charges générales de l’établissement (salaire de la totalité des personnels, et totalité des charges diverses, etc.) par journée d’hospitalisation. Un séjour « ambulatoire », en hospitalisation de jour, sera ainsi forcément moins valorisé qu’un séjour ayant comporté une ou plusieurs nuitées d’hospitalisation, même si on sait que l’essentiel de la mobilisation de ressources a lieu le jour de l’utilisation du plateau technique, les jours postopératoires étant généralement peu consommateurs de ressources (suivi infirmier, hôtellerie, etc.). Même dans le cas d’un séjour uniquement médical, le maximum de l’effort de soins est généralement produit au cours des 24, ou au maximum des 48, premières heures d’hospitalisation. L’activité Matériels et méthodes Recensement de la fréquence des actes de la CCAM (1) : DDAF001 à DDAF010 (dilatation intraluminale d’un ou plusieurs vaisseau(x) coronaire(s), avec ou sans pose d’endoprothèse, avec ou sans artériographie coronaire, par voie artérielle transcutanée), dans les bases PMSI MCO nationales publiques et privées (2), de 2006 (date de mise en œuvre du recueil de l’information au moyen de la CCAM) à 2017 (3). 1. CCAM : Classification commune des actes médicaux. 2. Le terme public désigne les établissements de santé publics ou ESPIC, c’est-à-dire anciennement sous Dotation globale de financement et le terme « privé » les établissements privés anciennement sous Objectif quantifié national. 3. Les actes d’artériectomies : DDFF001 et DDFF002 n’ont pas été recensés en raison de leur rareté relative. Les actes (figures 1 à 3) En progression constante depuis un quart de siècle, l’angioplastie coronaire se rapproche en 2017 du cap des 200 000 actes répertoriés annuellement dans le PMSI (190 000 et 193 000 si on inclut les actes d’athérectomie intraluminale d’artère coronaire). Si la plupart de ces gestes sont réalisés en hospitalisation complète, une part de plus en plus grande donne lieu à une hospitalisation avec une seule nuitée d’hospitalisation (14 %) voire à une prise en charge en hospitalisation de jour (3 %). Le virage ambulatoire reste timide en France. Figure 1. Évolution du nombre d’angioplasties coronaires selon la durée d’hospitalisation. Figure 2. Évolution du taux d’ambulatoire des séjours avec angioplastie coronaire (en %, et selon le secteur d’hospitalisation : public ou privé). Figure 3. Évolution du taux d’angioplastie coronaire réalisées en hospitalisation d’une seule nuitée. Cependant, ce « virage ambulatoire » progresse très rapidement dans de nombreux pays occidentaux, alors qu’il reste timide en France. La question est donc de savoir si, indépendamment des évolutions de technique médicale proprement dite, les modalités de financement peuvent expliquer cette timidité. Les établissements qui développent cette activité Dans la base PMSI MCO 2017, 380 établissements ont enregistré au moins une fois l’un des actes ciblés, mais si on écarte tous ceux qui ont enregistré moins de 10 actes dans l’année (erreur de codage, prestation inter établissements, etc.) il reste 255 établissements, dont 80 privés et 175 publics. Parmi ces établissements, 193 ont, au moins une fois, produit un séjour avec angioplastie coronaire et sans nuitée d’hospitalisation. Si on recherche à présent les établissements dont le taux de réalisation en ambulatoire égale ou dépasse le taux moyen national de 2,9 %, il n’y a plus que 41 établissements (15 privés, 9 CHU, 12 CH, 5 ESPIC ou privé à but non lucratif), avec la distribution suivante : – entre 2,9 % et 10 % de l’activité développée avec 0 nuitée : 26 établissements ; – entre 10,1 % et 20 % : 9 établissements ; – entre 20,1 % et 30 % : 4 établissements ; – supérieur é 30 % : 2 établissements. Le contexte médical Pendant de nombreuses années, la crainte du cardiologue interventionnel après la réalisation d’une angioplastie coronaire était la thrombose coronaire aiguë, complication redoutable, issue d’une période antérieure à l’avènement de la double antiagrégation plaquettaire. Cette crainte a perduré expliquant la volonté d’une surveillance accrue, en USIC et télémétrée, de nos patients pendant de nombreuses années. De multiples facteurs ont convergé pour faire disparaître les complications précoces, en particulier l’occlusion coronaire : amélioration technologique (qualité de l’imagerie en particulier avec le StentBoost [Philips], l’imagerie endocoronaire, pour ceux qui l’utilisent, les dernières générations de ballons et de stents, etc.), double antiagrégation plaquettaire, dextérité des opérateurs. La 2 e complication redoutée, à savoir les complications hémorragiques de la voie d’abord, a été, elle aussi, éradiquée par l’utilisation quasi exclusive de la voie radiale. Les rares procédures utilisant la voie fémorale ont, quant à elles, bénéficié des systèmes de fermeture très efficaces. Ainsi la plupart du temps, une complication postprocédurale se situe dans la continuité d’un événement procédural. Dans les différents registres, la survenue d’un événement après 6 heures suivant la procédure est rarissime lorsque la procédure elle-même est non compliquée et considérée comme un succés. Par ailleurs les complications différées surviennent en général à distance des 48 h de la procédure, le plus souvent à la rupture d’un traitement antiagrégant ou d’un événement intercurrent imprévisible augmentant la résistance au traitement antiagrégant classique. Que disent les études ? L’angioplastie coronaire en ambulatoire a été expérimentée et validée dans de nombreux pays. Malheureusement, les conditions de prise en charge et de financement y sont totalement différentes. Quoi qu’il en soit, deux études importantes ont été publiées visant à comparer, en termes de sécurité, l’angioplastie en hospitalisation classique (1 nuit) et l’angioplastie ambulatoire ( same day discharge). La premiére est un registre observationnel multicentrique portant sur la période 2004-2008 (> 100 000 patients stables), la seconde une métaanalyse plus récente (2013) portant sur 7 études randomisées et 30 études observationnelles (> 12 000 patients). Dans ces deux publications, il n’a pas été noté de « sur-risque » de mortalité, d’infarctus, de redilatation ou de complications hémorragiques locales à 30 jours. Depuis la parution de ces deux publications, d’autres études avec des cohortes réduites mais randomisées et tenant compte des évolutions les plus récentes, confirment la parfaite innocuité de l’angioplastie réalisée en ambulatoire. À qui s’adresse l’angioplastie ambulatoire ? L’angioplastie ambulatoire impose néanmoins le respect de certaines règles, indépendantes de la volonté des patients qui, sans ambiguïté, plébiscitent l’hospitalisation de jour. Il semble préférable de réserver l
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