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Publié le  Lecture 23 mins

De l'hypertension artérielle à l'insuffisance cardiaque - Stratégies thérapeutiques modernes

M. DEKER, Paris

Comme chaque année, les Journées Jean Lenègre ont réuni un panel de spécialistes éminents pour faire le point sur quelques sujets d’actualité en cardiologie. Le symposium intitulé « De l’hypertension artérielle à l’insuffisance cardiaque » a rappelé le rôle clé de l’angiotensine II au sein du processus physiopathologique de la maladie cardiaque hypertensive. La compréhension de l’implication de cette hormone met en lumière les bénéfices procurés par son blocage, pour freiner l’évolution de la cardiopathie hypertensive. En termes d’hypertension artérielle, les objectifs sont de plus en plus bas ; mais s’il est vrai que le principal déterminant du bénéfice des traitements antihypertenseurs est lié à l’abaissement des chiffres tensionnels, il apparaît aussi que les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine II (ARA II) associés aux diurétiques sont particulièrement efficaces chez les sujets à risque. En termes d’insuffisance cardiaque, l’exploration par échocardiographie Doppler permet aujourd’hui une évaluation plus précise du pronostic des patients et de l’effet des thérapeutiques. À cet égard, les ARA II sont appelés à prendre une place importante dans l’arsenal thérapeutique de l’insuffisance cardiaque.

Rôle de l'angiotensine II dans le continuum des maladies cardio-vasculaires D’après J. Diez (Pampelune) La compréhension des mécanismes qui sous-tendent le développement de la maladie cardiaque hypertensive revêt une importance majeure, ne serait-ce qu’aux fins d’élucider l’impact des thérapeutiques disponibles, au-delà d’un aspect strictement hémodynamique. Trois grandes étapes émaillent, de manière schématique, l’évolution de la maladie hypertensive du point de vue du cœur : passé un stade sans modification visible de la morphologie cardiaque, dans un deuxième temps apparaît une hypertrophie ventriculaire gauche (HVG), qui s’associe dans un troisième temps à une insuffisance cardiaque. Des modifications structurelles sous-tendent le développement de la cardiopathie hypertensive, caractérisées par une perte progressive de cardiomyocytes et une augmentation du tissu fibreux, ces deux éléments jouant un rôle majeur dans le déclin fonctionnel. Dans un travail récent (Circulation 2004 ; 110 : 1263-8), l’équipe de J. Diez a mis en évidence une augmentation de la synthèse de collagène de type I chez des patients hypertendus porteurs d’une HVG, dont la moitié présentaient une insuffisance cardiaque, comparativement à des sujets normotendus. Cette augmentation progressive du contenu en collagène dans le ventricule gauche, qui pourrait témoigner du développement de la fibrose myocardique, est associée à une dégradation progressive de la fonction cardiaque, évaluée par la fraction d’éjection ventriculaire. Elle résulte d’un excès de synthèse des fibres comparativement à leur dégradation. De nombreux facteurs sont impliqués dans le métabolisme du collagène pour en stimuler la synthèse ou l’inhiber : substances vasoconstrictrices, hormones minéralocorticoïdes, facteurs de croissance, cytokines, molécules d’adhésion. Parmi tous les agents impliqués, l’angiotensine II a fait l’objet de nombreux travaux de recherche. L’angiotensine II au cœur du processus Il a été montré que l’angiotensine II agit directement sur les récepteurs AT1 localisés dans les fibroblastes cardiaques pour stimuler la production des molécules précurseurs des fibres collagènes, principalement de type I. Elle agit aussi en inhibant l’expression de l’enzyme responsable de la dégradation du collagène. Par ailleurs, elle stimule, via les récepteurs AT1 localisés dans les fibroblastes et myocytes cardiaques, la sécrétion de facteurs pro-inflammatoires et profibrotiques, et tout particulièrement des prostaglandines. On sait que les prostaglandines sont produites à partir de l’acide arachidonique sous l’action de deux cyclooxygénases (cox-1 et cox-2). La cox-2 est exprimée dans les cellules cardiaques sous l’action de divers stimuli, telles l’interleukine 1 ou l’angiotensine II, ce qui entraîne la production des prostaglandines inflammatoires. Ainsi, l’exposition in vitro des cellules cardiaques à des concentrations physiologiques d’angiotensine II s’accompagne d’une augmentation de l’expression de la cox-2 ; cet effet est médié par le récepteur AT1 de l’angiotensine II et inhibé par le blocage de ce dernier (J Mol Cell Cardiol 2002 ; 34 : 1-3). Plusieurs travaux corroborent l’existence d’une stimulation de la cox-2 dans certaines maladies cardiaques telles que la cardiopathie ischémique ou la cardiomyopathie dilatée idiopathique. L’équipe de J. Diez a réalisé une étude clinique pour tester l’hypothèse que la cox-2 cardiaque joue aussi un rôle dans le processus inflammatoire fibrotique qui sous-tend l’évolution de la maladie cardiaque hypertensive, et vérifier l’implication de l’angiotensine II dans cette stimulation de la voie des prostaglandines inflammatoires. Expression de la cox-2 - Dans cette étude, trois groupes ont été constitués : les cœurs de dix patients normotendus décédés accidentellement ont été comparés à un groupe d’hypertendus essentiels, porteurs d’une HVG, et à un deuxième groupe d’hypertendus ayant une HVG et une insuffisance cardiaque, suivis cliniquement et par analyse histochimique. Les analyses ont montré que la cox-2 n’est pratiquement pas exprimée dans le cœur des sujets normotendus, alors qu’elle l’est fortement chez les patients hypertendus porteurs d’une HVG et plus encore en présence d’une insuffisance cardiaque. En outre, l’expression de cette enzyme pro-inflammatoire est retrouvée colocalisée avec des cellules inflammatoires dans le tissu cardiaque, alors que le myocarde des sujets normotendus ne comporte pas de cellules de la lignée blanche. Cette inflammation est toujours associée à de la fibrose. Cette étude met en évidence une forte corrélation entre l’expression de la cox-2, le degré d’inflammation et le contenu fibrotique du tissu cardiaque. Afin d’évaluer le rôle de l’angiotensine II dans ce processus inflammatoire et fibrotique, des patients hypertendus porteurs d’une HVG ont été séparés en deux groupes de traitement : un premier groupe a été traité par un bloqueur des récepteurs de l’angiotensine II (ARA II), plus ou moins associé à un diurétique et un bêtabloquant pour contrôler la pression artérielle ; le second groupe a reçu un traitement basé sur un inhibiteur calcique. Les deux stratégies thérapeutiques ont permis d’obtenir des chiffres équivalents de pression artérielle. En revanche, l’expression de la cox-2 dans le tissu cardiaque a diminué de 40 % dans le groupe traité par un ARA II, mais n’a pas été modifiée chez les patients de l’autre groupe. Parallèlement, le contenu en collagène du cœur a diminué dans le groupe ARA II, sans modification dans l’autre groupe, à contrôle tensionnel identique. Cette étude montre bien que le blocage des récepteurs AT1 de l’angiotensine II entraîne une diminution de la fibrose cardiaque associée à une moindre expression de l’enzyme cox-2. - Le blocage de la voie de la cox-2 sous l’effet d’un ARA II a également été mis en évidence par l’équipe de Drexler (Circ Res 2002 ; 90 : 770-6) qui a observé une diminution significative de la production des prostaglandines inflammatoires sous l’effet du traitement. Nous disposons donc d’un faisceau d’arguments montrant que l’angiotensine II est impliquée dans la stimulation de la cox-2 chez les sujets hypertendus. Il reste à expliquer pourquoi le blocage du récepteur AT1 de l’angiotensine II ne diminue que de 40 % l’expression de l’enzyme. Il est possible que l’angiotensine II stimule aussi, dans une moindre mesure, les récepteurs AT2. Par ailleurs, il existe chez l’insuffisant cardiaque des voies métaboliques autres que celle de l’enzyme de conversion, qui aboutissent à la production de l’angiotensine II, par exemple la voie de la chymase. Enfin, l’angiotensine II n’est pas le seul facteur qui modifie l’expression de la cox-2 cardiaque. Outre des interleukines et certains facteurs de croissance, des hormones telles que l’aldostérone stimulent cette enzyme. Des expérimentations chez l’animal ont montré un certain degré de synergie entre l’aldostérone et la stimulation de la cox-2 ; chez l’animal traité par un bloqueur de l’aldostérone ou chez l’animal adrénalectomisé, la cox-2 n’est pas exprimée. Cela témoigne d’un effet synergique de l’action de l’angiotensine II sur la cox-2 cardiaque et systémique. À cet égard, il convient de bien différencier les cox-2 en fonction des types cellulaires, de même que les cibles et les effets des agents qui inhibent cette enzyme. Alors que certains anti-cox-2 exercent un puissant effet inhibiteur des cox-2 endothéliales, qui se traduit par un déséquilibre de la voie des cyclooxygénases allant dans le sens d’un effet proagrégant, le blocage des récepteurs AT1 a, au contraire, un effet antiagrégant. Au total L’angiotensine II joue manifestement un rôle important dans l’évolution de la maladie cardiaque hypertensive, notamment en favorisant un processus inflammatoire et fibrotique. Cet effet passe, en particulier, par la stimulation de l’enzyme cox-2, laquelle est une cible des thérapeutiques visant à inhiber son expression au niveau cardiaque. Des travaux récents montrent que le blocage des récepteurs AT1 diminue l’expression de cette enzyme, de même que l’inflammation et la fibrose cardiaques, ce qui pourrait aboutir à freiner l’évolution de la cardiopathie hypertensive. Actualités de la prévention des complications de l'HTA D’après A. Castaigne (Créteil) Les preuves attestant du bénéfice conféré par l’abaissement de la pression artérielle (PA) en termes de risque cardio-vasculaire sont de plus en plus nombreuses. En outre, les études témoignent de l’intérêt d’abaisser le plus possible les chiffres tensionnels. Les deux métaanalyses des essais dans l’hypertension, réalisées l’une par le groupe des Blood Pressure Trialists (Lancet 2003 ; 362 : 1527-35), l’autre par J. Staessen et coll. (J Hypertens 2003 ; 21 : 1055-76), sont parfaitement concordantes. Il existe une relation linéaire entre le niveau de la PA et le risque de mortalité par accident vasculaire cérébral (AVC) ou d’infarctus du myocarde (IDM). Ce risque est observé quel que soit l’âge et sans seuil. Cette relation linéaire sans seuil permet de fonder l’hypothèse qu’en abaissant la PA systolique (PAS) de 20 mmHg, le risque de mortalité par AVC ou maladie coronaire serait diminué de moitié, quel que soit l’âge, et d’un tiers au-delà de 80 ans. Ces deux métaanalyses concluent que l’abaissement des chiffres de PA est le principal déterminant du bénéfice des traitements antihypertenseurs. Une diminution de 10 mmHg de la PAS permet de réduire de 40 % les AVC, de 25 % les maladies coronaires, de 20 % la mortalité cardio-vasculaire et de 12 % la mortalité globale. La preuve par les essais thérapeutiques • Trois essais thérapeutiques ayant pour objectif de comparer plusieurs traitements antihypertenseurs à égalité de pression artérielle fournissent des informations qui vont dans le sens de ces deux métaanalyses. Dans ces études — CAPPP (Lancet 1999 ; 353 : 611-6), ALLHAT (JAMA 2002 ; 288 : 2998-3007) et VALUE (Lancet 2004 ; 362 : 2022-31) — en raison des

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