Aller au contenu principal
TwitterFacebookLinkedinPartager

Insuffisance cardiaque

Publié le  Lecture 10 mins

Insuffisance cardiaque : aspects actuels de la réadaptation

C. MONPERE, Centre hospitalier de Ballan Mire


Les Journées européennes de la SFC
L’insuffisance cardiaque est l’une des indications les plus récentes de la réadaptation cardiaque (RC) et a largement contribué au renouveau d’intérêt de cette spécialité tant les résultats obtenus peuvent être spectaculaires.

Après avoir longtemps été considérée comme une contre-indication, la RC fait aujourd’hui partie du traitement des insuffisants cardiaques, au même titre que le traitement médicamenteux optimal, les défibrillateurs implantables, les resynchronisateurs ou les techniques chirurgicales, dont la greffe. Cette prise en charge non pharmacologique apparaît d’ailleurs officiellement dans les recommandations des sociétés savantes européennes (1) comme recommandation de classe 1 niveau C. Elle est étayée par de nombreuses études depuis la fin des années 80, établissant l’efficacité et la bonne tolérance de l’entraînement sur les capacités à l’effort, sans complications, en particulier sur le remodelage ventriculaire. Les bases physiopathologiques de mieux en mieux connues permettent de comprendre l’amélioration du pronostic et de la morbidité dans cette population après RC. Seuls les patients entraînés ont une augmentation significative de leur pic de consommation d’oxygène, et l’on note un effet tout à fait cumulatif de l’effet bénéfique de l’entraînement chez des patients resynchronisés. Des recommandations à la pratique quotidienne… Une publication récente de l’enquête Impact RECO (2) portant sur les prescriptions médicamenteuses dans l’insuffisance cardiaque en France en 2005 met en évidence une nette amélioration du taux de prescription depuis la dernière décennie des molécules préconisées, en particulier des bêtabloquants et des bloqueurs du système rénine-angiotensine-aldostérone, même si les doses thérapeutiques ne sont que rarement optimales. En revanche, le taux de patients adressés en RC ou à un programme structuré d’éducation thérapeutique est dérisoire (10 %), expliquant sans doute le fort taux de réhospitalisations (40 %) dans l’année des patients après une première décompensation avec le retentissement médico-économique que l’on connaît. Une sous-utilisation de la réadaptation Les raisons expliquant cette sous-utilisation des services de RC sont multiples et variées : - l’âge avancé de la population (les trois quarts de la population sont âgés de plus de 75 ans), nécessitant un programme très progressif, la facilitation des transports au centre de réadaptation cardiaque, et souvent l’implication des familles, sont des impératifs parfois difficiles à concilier ; - le nombre de structures dédiées à la réadaptation et l’éducation des insuffisants cardiaques, bien que croissant, reste encore très insuffisant, et parallèlement, la décroissance de la démographie médicale et paramédicale rend difficile la continuité des soins à domicile ; - enfin, les bénéfices de l’entraînement physique et d’éducation thérapeutique restent encore insuffisamment connus des patients, de leurs familles… et même des médecins à un moment où la cardiologie préventive devrait être largement valorisée. Suite à ce constat, cet exposé sera centré sur quatre points principaux : – les bénéfices de la réadaptation au-delà de l’amélioration des capacités à l’effort ; – les étapes à ne pas manquer dans le parcours d’un patient insuffisant cardiaque dans l’indication de la réadaptation ; – le choix des modalités de cette réadaptation ; – le suivi des patients à leur retour à domicile, qui reste encore le talon d’Achille de la réadaptation et la place de la télémédecine comme solution possible. Effets de la réadaptation au-delà des performances à l’effort Une amélioration de la morbi-mortalité Une métaanalyse (3) a permis de conclure à l’amélioration du pronostic vital chez 801 patients bénéficiant d’un programme de réadaptation cardiaque, suivis en moyenne 2 ans, avec une réduction de la mortalité totale de 35 % et une diminution de la mortalité cardiovasculaire ou des réhospitalisations de 38 %. Il est à noter que ces effets sont avérés quels que soient l’âge, le sexe, la classe fonctionnelle, la cause ischémique ou non ischémique de l’insuffisance cardiaque, le degré de dysfonction ventriculaire gauche ou le pic de consommation d’oxygène. Ils sont d’autant plus significatifs que l’entraînement est supérieur à 28 semaines et dans les populations les plus fragiles : personnes âgées, classe NYHA III-IV, étiologie ischémique, fraction d’éjection 27 % et au pic de consommation d’oxygène 15 ml/min/kg. Ces effets sur la morbi-mortalité de la réadaptation cardiaque sont une source d’économie de santé, en particulier grâce à moins d’admissions hospitalières. On estime qu’il suffit de traiter 11 patients pour éviter un décès ou une réhospitalisation, ce qui constitue un ratio coût/bénéfice très favorable (4). Ces effets favorables tant en termes de morbi-mortalité que d’économie de santé, s’accompagnent d’une amélioration très nette de la qualité de vie et d’une augmentation des capacités maximales à l’effort ainsi que d’une meilleure tolérance des efforts sous-maximaux, avec une augmentation de la consommation d’oxygène de 15 à 25 %. Ces bénéfices sont le fruit de la synergie entre l’éducation thérapeutique et l’entraînement physique proposés conjointement en réadaptation. L’éducation thérapeutique permet une amélioration de l’adhésion au traitement médical, ainsi qu’une meilleure autogestion de sa maladie par le patient. Une amélioration à différents niveaux L’entraînement à l’effort, outre ses effets sur le système musculaire (correction de l’amyotrophie, développement des fibres musculaires lentes, amélioration des capacités oxydatives musculaires, etc.) s’accompagne également d’effets vasculaires (nette amélioration de la vasodilatation endothélo-dépendante, d’effets positifs sur l’angiogenèse, voire la myocardiogenèse), et enfin une amélioration des marqueurs neurohormonaux pronostiques tels que les taux plasmatiques de BNP ou l’équilibre sympatho-vagal. La plupart des études ont en effet mis en évidence, chez les insuffisants cardiaques après reconditionnement à l’effort, une amélioration de l’équilibre sympatho-vagal avec réduction du tonus sympathique et augmentation du tonus parasympathique. Un moyen simple d’évaluer le tonus vagal est représenté par la fréquence cardiaque de récupération post-épreuve d’effort. Ce critère semble en fait avoir une réelle valeur pronostique chez les insuffisants cardiaques (5). Cette étude a montré, chez 92 patients, qu’une réduction de la fréquence cardiaque à la première minute de récupération ≤12 bpm est un facteur pronostique indépendant de mortalité à 2 ans. Des études préliminaires visant à évaluer les effets de l’entraînement physique sur ce paramètre pronostique suggèrent une amélioration de la fréquence cardiaque de récupération, essentiellement chez les patients ayant un entraînement en endurance en plateau (6) et chez les patients avec les capacités fonctionnelles les plus basses (7). Il s’agit d’études réalisées sur une petite cohorte et non reliées à la morbidité ; néanmoins, ces résultats sont encourageants et devraient motiver des études de plus grande envergure. On retiendra donc l’effet ubiquitaire de ce reconditionnement à l’effort mais quel en est le primum movens ? Les différentes hypothèses ne sont pas encore toutes confirmées mais il semble que le « shear stress » – ou forces de cisaillement induites par l’augmentation du flux vasculaire lors de l’exercice physique – va agir comme un mécano transducteur au niveau de la paroi endothéliale et engendrer par différentes voies l’augmentation du largage de monoxyde d’azote (NO). Cette substance a des effets multiples : diminution de l’agrégabilité plaquettaire, relaxation vasculaire, stimulation de la production de superoxyde dismutase permettant la réduction du stress oxydatif et la réduction des radicaux libres avec diminution de l’apoptose. De plus, la stimulation de production de VEGF serait à la base de la mobilisation de cellules souches médullaires, pouvant expliquer les régénérations de l’endothélium lésé et le développement de l’angiogenèse. Quand adresser le patient ? Certains événements qui jalonnent la vie du patient insuffisant cardiaque doivent plus particulièrement conduire à une réadaptation cardiaque. Classiquement après décompensation, mais également plus tôt, lorsque le diagnostic de dysfonction ventriculaire gauche a été établi pour la première fois, en l’absence de décompensation. Le patient doit pouvoir bénéficier d’une information sur sa maladie et d’une éducation visant à prévenir les décompensations ultérieures. Par ailleurs, lorsque se discute une indication de transplantation cardiaque, il est actuellement tout à fait illicite d’adresser pour greffe cardiaque des patients de stade II ou III avant d’avoir testé les possibilités d’amélioration des capacités à l’effort par un programme de reconditionnement physique. Il est à noter que le traitement bêtabloqueur, aujourd’hui quasi systématique, oblige à revoir à la baisse la valeur seuil du pic de consommation d’oxygène de 14 ml/min/kg qui faisait autrefois partie des critères de transplantation. Ce seuil semble actuellement être entre 10 et 12 ml/min/kg. Enfin, après implantation d’un défibrillateur automatique et/ou d’une resynchronisation cardiaque. En effet, la resynchronisation n’améliore pas (étude MIRACLE-ICD) ou très peu le pic de consommation d’oxygène en dépit d’une amélioration des performances ventriculaires gauches. L’étude récente Rethin Q (AHA 2007), chez des patients resynchronisés avec paramètres échographiques de désynchronisation mais QRS 130 ms ne retrouvait pas d’amélioration du pic VO2 dans une population de 172 patients initialement en classe III. Ces faits ont motivé des études visant à évaluer les bénéfices d’un entraînement physique chez ces patients. L’étude de Conraads (8) réalisée sur une petite cohorte de 17 patients ayant bénéficié d’une resynchronisation et de 19 patients insuffisants cardiaques sans resynchronisation a comparé un groupe entraînement et un groupe témoin. Une étude de Belardinelli (9) réalisée chez 52 patients porteurs d’un défibrillateur associé ou non à une resynchronisation retrouvait des effets bénéfiques

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :