ACC
L’échocardiographie est restée la technique d’imagerie vedette puisqu’elle a représenté près de 6 % des communications, loin devant le scanner et l’imagerie par résonance magnétique réunis. Ce dynamisme est encore plus frappant quand on prend on compte la relative maturité de la méthode et le ralentissement des innovations par rapport au rythme des années 80-90. Quelques sujets ont tenu le haut du pavé : le speckle tracking, la torsion du ventricule gauche qui en est dérivée, l’analyse des asynchronismes, l’échographie 3D en temps réel, l’analyse des pressions de remplissage et le contraste.
Le suivi de texture (speckle tracking) : l’innovation de l’année Principe du « speckle tracking » Le suivi de texture, souvent appelé speckle tracking » ou « 2D strain rate est la technique qui a dominé les communications consacrées à l’échocardiographie avec deux fois plus de contributions que le sujet suivant. Cette technique est, en fait, développée depuis quelques années et son arrivée sur le devant de la scène est liée à sa distribution par plusieurs compagnies, dans de nombreuses équipes de recherche clinique. Son principe s’appuie sur des concepts bien connus : l’image est analysée par zones ; dans chaque zone, le logiciel repère un groupe de pixels (texture ou speckle) qu’il recherche dans l’image suivante au sein d’une zone élargie. En supposant que cette texture s’est déplacée en se modifiant peu, il est alors possible de mesurer son déplacement dans 2 voire 3 dimensions de l’espace. De proche en proche et de texture en texture, on parvient de la sorte, à mesurer des vitesses tout au long du cycle cardiaque. À partir des mesures de vitesses, on peut calculer des déplacements, des taux de compression locale (strain), des taux de compression instantanée (strain rate). L’originalité de la méthode réside dans le fait qu’elle traite les images en noir et blanc et non des données Doppler et qu’elle effectue dans les deux dimensions du plan, voire dans les trois dimensions du volume. Elle donne, donc, théoriquement accès à une analyse séparée des fonctions longitudinale, radiale (transversale) et de la torsion du ventricule gauche. Mise en œuvre Les industriels convergent vers des mises en œuvre assez proches, ce qui peut être un signe de maturité mais correspond, surtout, à l’absence de brevet potentiellement bloquant dans le domaine. On repère une zone d’intérêt en cliquant des points remarquables, comme l’anneau mitral et l’apex, et/ou en proposant un contour de l’endocarde en télésystole. Le logiciel recherche des corrélations dans une zone placée à l’extérieur de ces repères. Après validation, il calcule les nombreux paramètres dérivés et les affiche soit sous forme de couleurs, soit sous forme de courbes. En combinant plusieurs vues, on parvient à une présentation en « œil de bœuf » (figures 1 à 4). La question qui reste en suspens est la robustesse de cette méthode chez les patients peu échogènes qui sont souvent, de fait, exclus des études pionnières. Figure 1. Exemple de repérage initial de l’anneau mitral et de l’apex avant calcul en speckle tracking. Figure 2. Speckle tracking : affichage des segments et de correlations calculées pour chaque segment. Figure 3. Speckle tracking : affichage du strain longitudinal global à partir d’une vue 4 cav. Figure 4. Speckle tracking : présentation en « œil de bœuf » et affichage des courbes après calcul selon 3 plans (4 cav, 2 cav, 3 cav). Les résultats à l’ACC Dans le domaine de l’insuffisance cardiaque, une analyse de 237 patients ayant des fractions d’éjection comprises entre 10 et 70 % a montré une bonne corrélation entre un index de raccourcissement longitudinal et la FEVG. Une étude réalisée sur des patients insuffisants cardiaques sévères traités par une assistance de type ECMO, a montré que les résultats du suivi de texture varient en fonction des conditions de charge : l’ECMO diminue la précharge et augmente la postcharge. À propos de cardiopathies ischémiques, lors d’un essai médicamenteux (VALIANT), 603 patients ayant fait un infarctus du myocarde ont bénéficié d’une analyse en speckle tracking ; les résultats montrent que ces données ont une valeur pronostique qui s’ajoute à celle de la fraction d’éjection. Dans le prolongement de ce travail, une série d’écho-dobutamine a été traitée avec un logiciel de speckle tracking et les résultats ont suggéré que l’analyse de la contraction post-systolique a un apport diagnostique qui va au-delà de la lecture visuelle par des experts. Par ailleurs, une étude multicentrique a étudié les capacités de cette approche en termes d’analyse de la contraction segmentaire : elle a conclu qu’elle pourrait aider les examinateurs peu expérimentés… Un autre travail conduit avec une simulation numérique a proposé d’étendre ces analyses segmentaires aux acquisitions 3D. Chez des patients hypertendus, il a été noté une diminution des vitesses longitudinales (Sa et Ea) mesurées par Doppler tissulaire qui contrastaient avec un strain circonférentiel normal : les auteurs en ont déduit que les anomalies longitudinales précèdent les anomalies transversales. Une autre série montre une relation inverse entre la vitesse longitudinale et la masse ventriculaire ou l’existence d’une insuffisance cardiaque diastolique. Sur des cardiomyopathies hypertrophiques, dans une série pédiatrique avec fonction systolique normale, la vitesse et le strain sont apparus diminués. Le suivi de texture a montré une augmentation de la fonction de la paroi latérale après une alcoolisation septale réussie. À l’opposé, un strain radial abaissé est un facteur prédictif indépendant d’une altération de la VO2max chez ces patients. Plusieurs nouveaux indices d’asynchronisme ont été proposés en s’appuyant sur la chronologie du strain longitudinal. Les analyses en speckle tracking ont été étudiées pour détecter précocement les effets délétères des chimiothérapies sur le myocarde. Le 2D strain rate révèle un asynchronisme sur la paroi du ventricule droit en cas d’hypertension artérielle pulmonaire. L’analyse par speckle tracking des mouvements des parois de l’oreillette montre une variation de la fonction en fonction de l’âge. Cette méthode a aussi été testée sur l’aorte pour évaluer la rigidité vasculaire. Un travail sur les facteurs préopératoires associés à une bonne récupération de la fraction d’éjection après plastie mitrale vient mettre quelques bémols sur l’enthousiasme général : les dimensions télésystoliques restent les plus performantes. Analyse de la torsion du ventricule gauche La torsion du ventricule gauche est, grâce au speckle tracking, un phénomène physiologique mesurable : en obtenant des coupes petit axe à deux niveaux du ventricule et en connaissant la distance qui sépare les deux plans, on peut calculer des degrés par centimètre. Ce phénomène a été corrélé à la fonction systolique du ventricule sur des modèles animaux et à la pression auriculaire gauche mesurée de façon non invasive sur une série de sujets témoins. En comparant des cardiomyopathies restrictives et des péricardites constrictives, il a été montré que les premières altèrent la fonction longitudinale alors que les dernières affectent les vélocités circonférentielles et la torsion. Le pourcentage de transmuralité et l’extension des séquelles d’infarctus a un impact sur la torsion du ventricule gauche. L’optimisation des réglages des pacemaker biventriculaires débouche sur une augmentation de la torsion du ventricule gauche. Chez des patients hypertendus sans hypertrophie ventriculaire, on peut noter un retard de la détorsion protodiastolique. Dans les cardiomyopathies hypertrophiques, la torsion reste normale alors que la fonction longitudinale est abaissée. Sur une série de marathoniens, il a été trouvé, immédiatement après la course, une élévation du NT-proBNP mais une préservation de la torsion apicale. Analyse des asynchronismes Deux études utilisant l’échocardiographie sous dobutamine ont montré un lien entre la réserve contractile avant resynchronisation et le remodelage ventriculaire positif après mise en place de la stimulation biventriculaire (figure 5). Figure 5. Asynchronisme : exemple de décalage entre les vitesses septales (en jaune) et les vitesses latérales (en vert) par Doppler tissulaire couleur. Cet impact sur la viabilité est confirmé par un travail qui a quantifié l’importance de la cicatrice postinfarctus par médecine nucléaire. Concernant l’identification des répondeurs, une étude conclut à la supériorité de la mesure de la déviation standard en termes de reproductibilité, une autre souligne que plusieurs paramètres sont indépendants de la machine utilisée. Cependant, comparativement à ces données et à beaucoup de publications, certaines voix discordantes s’élèvent à propos de la validité de l’échographie pour la sélection des patients bénéficiant d’une resynchronisation. Une étude australo-anglaise montre le manque de robustesse de plusieurs indices échographiques. Une analyse de 250 asynchronismes a, de façon similaire, montré un manque de reproductibilité. Enfin, deux études ont porté sur la réduction de l’insuffisance mitrale fonctionnelle après resynchronisation, montrant le rôle du muscle papillaire postérieur. Chacune des nouvelles méthodes (speckle tracking et écho 3D) a été testée pour quantifier les asynchronismes. L’échographie 3D temps réel L’échocardiographie 3D temps réel suppose de lourds investissements en termes de développements technologiques : depuis l’ACC, trois industriels majeurs sont présents dans ce domaine. L’échocardiographie 3D transthoracique a été utilisée pour réaliser un bilan de faisabilité de plastie mitrale et donc comparée à l’ETO (figure 6) : dans quelques cas, la technologie 3D a apporté des informations supplémentaires. Une équipe a utilisé l’échocardiographie 3D pour préciser le mécanisme des insuffisances mitrales fonctionnelles. Un travail utilisant une sonde œsophagienne matricielle s’est intéressé à la dynamique de l’anneau mitral dans les prolapsus valvulaires mitraux. Une autre étude s’est intéressée au couplage aorte-mitrale. Enfin, un travail a été consacré au changement de géométrie après plastie tricuspide. Figure 6. Echo 3D : reconstruction au niveau des commissures mitrales. La faisabilité d’une analyse en 3D de la perfusion myocardique a été rapportée. Cependant, on peut craindre un optimisme exagéré face à une série de patient très échogènes. En effet, l’analyse en routine de la perfusion dans une population standard rencontre encore des difficultés en échographie 2D. En combinant l’échographie 3D avec une
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