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Mise au point

Publié le  Lecture 13 mins

Ablation des TV postinfarctus

C. de CHILLOU(a-b), I. MAGNIN-POULL(a), M. ANDRONACHE(a), B. BREMBILLA-PERROT(a), E. ALIOT(a), a. CHU de Nancy, Vandœuvre-lès-Nancy, b. Inserm-IADI, U947, Vandœuvre-lès-Nancy

La plupart des tachycardies ventriculaires (TV) qui surviennent à la phase tardive d'un infarctus du myocarde correspondent à un mécanisme de macro-réentrée sous-endocardique(1-3).
Le but de cet article est de présenter, étape par étape, les aspects techniques issus de notre pratique quotidienne qui permettent de mettre en évidence les isthmes des TV postinfarctus. En ce qui concerne les recommandations de l'ablation des TV postinfarctus, nous invitons le lecteur à consulter le document consensuel de référence des sociétés européenne (EHRA) et américaine (HRS) de rythmologie(4)

Dans notre expérience, plus de 90 % des TV postinfarctus qui sont cartographiables sont en rapport avec ce mécanisme et les 10 % restants présentent un aspect de dépolarisation centrifuge à partir de ce qui apparaît comme un « foyer » sous-endocardique. Dans ce dernier cas, on peut être confronté à un véritable foyer sous-endocardique (sans que l’on puisse alors plus précisément déterminer s’il s’agit d’une micro-réentrée, d’une activité déclenchée ou d’un automatisme anormal), mais on peut également être face à une macro-réentrée sous-épicardique dont on observe le point de sortie sous-endocardique. Bien entendu, on peut s’interroger quant à l’extrapolation de ce mécanisme de macro-réentrée sous-endocardique très largement prépondérant à l’ensemble des TV post-infarctus que l’on ne peut pas cartographier en raison de leur mauvaise tolérance sur le plan hémodynamique (souvent parce qu’elles sont très rapides). La réponse est univoque : les données expérimentales (5) ainsi que celles issues des cartographies per - opératoires des TV rapides (6,7) plaident également en faveur de ce mécanisme. La présence d’une zone de conduction lente au sein d’un circuit de réentrée fait partie des prérequis « classiques » pour qu’une arythmie par réentrée puisse survenir. Cependant, la différence relative de la vitesse de propagation du front de dépolarisation myocardique dans cette zone peut être très ténue, voire inexistante, par rapport aux autres parties du circuit, notamment lorsqu’il s’agit d’un circuit de macro-réentrée très long comme c’est le cas, par exemple, pour le flutter atrial commun mais également pour les réentrées atrioventriculaires. En revanche, en ce qui concerne les circuits de TV post infarctus, la zone de conduction lente est toujours présente et se caractérise par une vitesse de propagation nettement plus lente par rapport aux autres portions du circuit. Cette zone de conduction lente, qui correspond à l’isthme protégé de la TV, est essentielle à la perpétuation du circuit de la macro-réentrée (figure 1). Figure 1. Circuit de réentrée d’une TV chez un patient qui présente une séquelle d’infarctus antéroseptal : cartographie d’activation avec des isochrones de 10 ms mettant en évidence une réentrée septale avec une figure en forme de huit. La lenteur de la conduction au niveau de l’isthme est représentée par la ligne en zigzag. Les limites latérales des isthmes des TV postinfarctus correspondent soit à une zone de bloc de conduction, soit à un obstacle anatomique (la valve mitrale) et, dans l’immense majorité des cas, la cartographie d’activation d’un circuit de macro-réentrée d’une TV postinfarctus aboutit à une représentation imagée sous l’aspect très classique d’une figure « en forme de huit » (figure 1). En moyenne, les isthmes des TV post - infarctus mesurent 16 ± 8 mm de large (valeurs extrêmes de 6 à 30 mm) et 31 ± 7 mm de long (8). Ils constituent la cible de l’ablation des TV postinfarctus dont l’objectif est de réaliser une ligne d’ablation perpendiculaire à l’axe de ces isthmes et reliant leurs deux limites latérales afin de créer un bloc de conduction pour empêcher qu’ils ne soient dorénavant traversés par un front de dépolarisation myocardique. Étape 1 : stimulation ventriculaire programmée (SVP) Il est important de pouvoir disposer d’une documentation — par un ECG 12 dérivations — de la TV (ou des TV) qui motive (nt) la procédure d’ablation. L’interprétation de l’ECG en TV va en effet nous orienter quant au site d’émergence de la zone de sortie de l’isthme de la TV. Cet ECG fait toutefois souvent défaut, notamment chez les patients équipés d’un défibrillateur implantable pour lesquels on ne dispose habituellement que du cycle de la TV mesuré et stocké dans la mémoire du défibrillateur. La stimulation ventriculaire programmée (SVP) a pour but d’induire une TV dont l’isthme va être considéré comme la cible de la procédure d’ablation. Ce raisonnement paraît approprié dès lors que l’on induit une TV clinique mais peut être critiquable dès lors que l’on déclenche une TV non clinique ou lorsque l’on ignore la morphologie de la TV clinique. Dans notre expérience, toutefois, cette limitation ne semble pas constituer un facteur pronostique péjoratif quant au succès clinique de la procédure dès lors qu’il n’est plus possible d’induire la moindre TV à l’issue de la procédure d’ablation. Après un protocole complet de SVP en deux sites au niveau du ventricule droit, on ne parvient parfois pas à déclencher une TV quelconque. Dans ces cas « rebelles », la répétition de la SVP au niveau du ventricule gauche, principalement au niveau de la zone de sortie de la TV, est souvent fort utile pour finalement parvenir à induire une TV. Une fois une TV induite, sa tolérance clinique nous dicte les étapes suivantes. En cas de TV bien tolérée sur le plan hémodynamique, il sera possible de réaliser une cartographie d’activation de la TV. Dans le cas contraire, il sera nécessaire d’interrompre rapidement la TV par burst ventriculaire (ou par une cardioversion électrique) et il faudra ensuite essayer de démasquer l’isthme de la TV en rythme sinusal ou bien d’entreprendre une ablation du substrat arythmogène, c’est-à-dire des électrogrammes (EGM) endocardiques anormaux. Étape 2 : reconstruction tridimensionnelle des cavités cardiaques Une des informations cruciales concernant l’ablation des TV postinfarctus concerne la localisation de l’isthme de la TV : celui-ci est toujours retrouvé en pleine zone d’infarctus. Cela se comprend aisément : il n’y a pas de zone de conduction lente dans un myocarde sain ! Comme cela a été démontré de façon remarquable par des confrontations histopathologiques et électrophysiologiques (3,9), il existe toujours des fibres myocardiques survivantes au sein d’un infarctus myocardique. Ces fibres, souvent très éparses, sont entourées d’un tissu fibreux qui est à l’origine du ralentissement de la conduction intraventriculaire et de l’enregistrement d’EGM fragmentés et de potentiels tardifs ventriculaires. La reconstruction tridimensionnelle du ventricule gauche (et éventuellement du ventricule droit) grâce à un système de cartographie 3D permet de délimiter de façon très satisfaisante la zone de l’infarctus. En effet, plusieurs études animales (10,11) et cliniques (12,13) ont permis de montrer qu’une cartographie de voltage est très pertinente pour identifier un zone d’infarctus caractérisée par des EGM endocavitaires bipolaires dont le voltage est inférieur ou égal à 1,5 mV. La zone d’intérêt (c’est-à-dire la zone où se trouve l’isthme de la TV) se trouvant dans cette zone de bas voltage, on pourrait penser qu’il serait suffisant de cartographier uniquement cette zone au détriment du myocarde non pathologique. Une reconstruction globale du ventricule gauche nous apparaît toutefois très utile à la fois pour identifier plus facilement les positions spatiales successives du cathéter d’ablation et pour connaître les zones anatomiques infarcies. L’IRM cardiaque est également capable d’identifier précisément une zone d’infarctus qui est identifiée par la persistance d’un rehaussement tardif après injection de gadolinium. Les systèmes 3D actuellement commercialisés permettent d’incorporer une image d’IRM 3D dans la reconstruction virtuelle des cavités cardiaques. L’intérêt en pratique clinique courante demande toutefois des évaluations cliniques complémentaires. Étape 3 : identification de l’isthme de la TV Par cartographie d’activation de la TV Lorsque cela est possible (autrement dit en cas de TV cliniquement bien tolérée), la réalisation d’une cartographie d’activation en TV est certainement la technique de choix pour identifier l’isthme d’une TV et ses limites latérales (8). Pour cette cartographie, la référence doit être choisie de préférence au niveau du pic d’un QRS de l’ECG de surface et la fenêtre d’intérêt divisée en deux parties égales de part et d’autre de cette référence avec une valeur totale (en millisecondes) correspondant au cycle de la TV moins 20 ms. Les EGM endocavitaires ayant une morphologie et une amplitude normales dans les zones saines, il est facile de suivre le front d’activation de la dépolarisation myocardique dans ces zones et jusqu’à une distance souvent assez proche (10-20 mm) du site de sortie de l’isthme de la TV. Dans la région de l’isthme de la TV (c’està- dire au niveau de l’isthme lui-même et 10 à 30 mm tout autour), les EGM enregistrés en TV sont habituellement très fragmentés et polyphasiques si bien qu’il est souvent difficile de choisir, parmi les différentes composantes de ces EGM, celui qui va au mieux représenter le temps d’activation local. La technique décrite ci-dessous est celle que nous conseillons et elle se base sur deux constatations importantes. Tout d’abord, les EGM recueillis en dehors de l’isthme de la TV mais sur des sites immédiatement adjacents aux barrières latérales de cet isthme possèdent uniquement une composante locale (éventuellement très fragmentée) qui est synchrone des complexes QRS de l’ECG de surface. Autrement dit, toutes les composantes d’un EGM enregistré dans une zone immédiatement adjacente à une limite latérale de l’isthme d’une TV sont comprises entre les deux lignes verticales délimitant le début et la fin d’un QRS quelconque sur l’ECG de surface. Ensuite, en déplaçant le cathéter à partir de cette position jusqu’à une nouvelle position située dans l’isthme de la TV, on voit alors apparaître sur le signal endocavitaire bipolaire un potentiel présystolique, médio-diastolique ou diastolique tardif de très faible amplitude (en général 0,10 mV) selon que cet EGM est enregistré respectivement à proximité du site de sortie, du milieu ou à proximité du site d’entrée de l’isthme de la TV. En déplaçant à nouveau le cathéter vers la partie latérale de l’isthme, le potentiel présystolique ou diastolique va finir par disparaître et cette position définit la barrière latérale de l’isthme. Cette position doit être marquée sous la

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