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Complication

Publié le  Lecture 11 mins

L’art de la gestion d’une tamponnade en cardiologie interventionnelle

Benjamin FAURIE, Infirmerie Protestante de Lyon

Cet article présente une revue détaillée des techniques de drainage péricardique dans le contexte qui nous intéresse plus particulièrement en cardiologie interventionnelle : les complications per ou périprocédurales. Nous nous concentrerons sur les stratégies de gestions pratiques. Nous aborderons l’incidence, les facteurs de risque et les différents types de tamponnade cardiaque, en soulignant l’importance d’une reconnaissance et d’une prise en charge rapides. Un accent particulier sera mis sur les différentes approches de la péricardiocentèse, le choix du matériel approprié et la prise en charge des complications potentielles. Le rôle de l’imagerie (échocardiographie, fluoroscopie) pour guider la procédure et évaluer son efficacité sera mis en évidence, ainsi que l’utilisation de techniques et de technologies de pointe telles que le Cell Saver (système de récupération de sang periopératoire, RSPO) ou l’ExtraCorporeal Membrane Oxygenation (ECMO).

Cet article vise à fournir une approche claire et pratique pour la gestion de cette complication critique, afin de minimiser la morbidité et la mortalité. DÉFINITION ET PHYSIOPATHOLOGIE DE LA TAMPONNADE CARDIAQUE La tamponnade cardiaque est une compression du cœur due à une accumulation de liquide dans la cavité péricardique. Cette compression entrave le remplissage diastolique des cavités cardiaques, diminuant le débit cardiaque. L’augmentation de la pression péricardique dépasse alors la pression diastolique ventriculaire. Ceci provoque une réduction du retour veineux et une baisse de la pression artérielle. Le résultat est un choc hypovolémique. Plus l’accumulation de liquide péricardique est rapide, plus le choc apparaît brutalement. Ainsi, une centaine de millilitres de sang seulement peut suffire à provoquer une tamponnade. INCIDENCE ET FACTEURS DE RISQUE EN CARDIOLOGIE INTERVENTIONNELLE L’incidence de la tamponnade cardiaque lors de procédures de cardiologie interventionnelle, notamment les interventions coronariennes percutanées (PCI), est heureusement faible, mais varie significativement selon la complexité des interventions. Les données de la littérature montrent une incidence globale de la perforation coronarienne lors des PCI comprise entre 0,1 et 1 %, et de 4 à 9 % dans le cas de lésions chroniques totales (CTO). Cependant, plusieurs études récentes suggèrent un taux de tamponnade significativement inférieur à ce qui était rapporté auparavant, et généralement inférieur à 1 % (1). Ceci reflète probablement les améliorations des techniques d’intervention, un meilleur choix des patients, et une gestion plus proactive des perforations. En revanche, il est crucial de noter que l’incidence de tamponnade suite à une perforation est nettement plus élevée, pouvant atteindre jusqu’à 14 % des perforations et même 50 % dans le cas de perforations de type III (tableau). Par ailleurs, dans les procédures de remplacement valvulaire aortiques percutanées (TAVI), l’incidence est située entre 1 et 2 % et ne diminue pas malgré les avancées technologiques (2). Quels facteurs augmentent significativement le risque de tamponnade cardiaque pendant une angioplastie ? • La complexité de l’intervention Les interventions sur les CTO sont associées à un risque de tamponnade plus élevé en raison de la difficulté d’accès et de la manipulation technique plus importante et plus longue. L’utilisation de techniques comme l’athérectomie rotative augmente également ce risque, de même que les interventions sur des artères coronaires de petit calibre ou calcifiées. • Le type de perforation (classification de Ellis) Les perforations de type III, qui traversent complètement la paroi du vaisseau et souvent dans un espace anatomique (sinus coronaire, cavité cardiaque, etc.), sont les plus à risque de tamponnade. Les perforations de type II (perforation intramurale) présentent un risque intermédiaire, alors que les perforations de type I (perforation limitée à la couche intime) présentent un risque minimal. • Les caractéristiques du patient Certains facteurs patient peuvent influencer le risque, bien qu’ils soient moins bien documentés que les facteurs techniques. L’âge avancé, certaines comorbidités (anémie, troubles de la coagulation) et une anatomie vasculaire particulière peuvent être impliqués. • La technique de l’intervention La courbe d’apprentissage du praticien a un impact non négligeable sur le taux de complications. Classification des épanchements péricardiques et de la tamponnade Il n’existe pas de classification standardisée des épanchements péricardiques. La classification se base plutôt sur la signification clinique et hémodynamique, notamment la présence ou non d’une tamponnade cardiaque. Le volume d’épanchement n’est pas toujours corrélé directement à la sévérité de l’atteinte hémodynamique. Un petit épanchement peut causer une tamponnade si l’accumulation est rapide, tandis qu’un épanchement important peut être asymptomatique s’il s’est développé lentement, permettant au péricarde de se distendre progressivement. On peut toutefois décrire les épanchements péricardiques selon les critères suivants : • Volume Bien qu’il n’y ait pas de seuils précis, on peut décrire les épanchements comme petits ( 10 mm en échographie), modérés (10-20 mm), ou importants (> 20 mm). Ces valeurs sont approximatives et dépendent de la méthode d’évaluation (échocardiographie, tomodensitométrie). • Composition L’épanchement peut être séreux (transsudat), hémorragique (sang), purulent (infection), ou chylique (riche en chyle). La composition influence le pronostic et le traitement. Un épanchement hémorragique qui nous intéresse particulièrement, est plus souvent associé à une cause grave (traumatisme, rupture d’anévrisme, tumeur) et nécessite une intervention rapide. Lien avec l’état hémodynamique et l’urgence de l’intervention L’aspect crucial n’est pas le volume de l’épanchement en lui-même, mais son impact hémodynamique. Une tamponnade sur vient lorsque la pression péricardique augmente suffisamment pour compromettre le remplissage cardiaque. Les signes et symptômes (hypotension, pouls paradoxal, turgescence des veines jugulaires) indiquent l’urgence de l’intervention. Une échocardiographie est essentielle pour évaluer la présence d’un épanchement, son volume approximatif et son impact sur le remplissage cardiaque (collapsus diastolique du ventricule droit, swinging heart) (figure 1). Figure 1. Tamponnade : échographie transthoracique avec compression du ventricule droit. En pratique clinique, la présence d’une tamponnade cardiaque justifie une intervention immédiate par péricardiocentèse, tandis qu’un épanchement péricardique asymptomatique peut être surveillé plus attentivement. En résumé, la classification est avant tout fonctionnelle. L’urgence de l’intervention est dictée par la présence et la sévérité de la tamponnade cardiaque, évaluée cliniquement et par imagerie, plus que par le seul volume de l’épanchement. CONSIDÉRATIONS PRÉ-INTERVENTIONNELLES Prévenir les tamponnades Répondant à l’adage « prévenir plutôt que guérir », le cardiologue interventionnel doit tout mettre en œuvre afin de limiter l’occurrence de tamponnades per ou périprocédurales. Nous pourrions citer par exemple le monitorage de l’efficacité de l’héparine par l’ACT, l’utilisation adéquate des guides coronaires agressifs, leur visualisation distale notamment dans les procédures de CTO, le choix et le dimensionnement des ballons, stents, valves et autres dispositifs interventionnels selon le scanner ou l’imagerie endocoronaire et, enfin, l’utilisation de la technique de stimulation sur guide coronaire ou ventriculaire (DWP) plutôt que de sondes d’entraînements. Préparation de l’équipe Il faut souligner l’importance d’une équipe bien coordonnée d’infirmières, d’anesthésistes et d’échographistes, disponibles et préparés avant le début de la procédure. Préparation rapide de l’asepsie du thorax qui doit être large permettant l’accès aux 3 sites de ponctions classiques ainsi qu’à un éventuel abord chirurgical sous-xiphoïdien. Matériel Il est crucial de bien connaître le matériel de votre centre et savoir où il se trouve. On pourrait conseiller d’avoir un « kit » ou une boîte de drainage péricardique avec tous les équipements nécessaires incluant les champs stériles, aiguilles, cathéters, drains, guide-fils ou bien avoir un kit du commerce incluant le tout (figure 2). Figure 2. Matériel et kits de péricardiocentèse. Guidage par imagerie On soulignera ici l’importance de l’échocardiographie et de la fluoroscopie pour guider la procédure et visualiser la position de l’aiguille pendant le drainage ainsi que l’efficacité du drainage. Une bonne coordination avec l’échographiste est indispensable. TECHNIQUES DE PÉRICARDIOCENTÈSE Choix de l’approche Il existe trois approches conventionnelles : sous-xiphoïdienne, parasternale et apicale. La plus classique est l’approche sous-xiphoïdienne, notamment pendant les procédures d’angioplastie, en raison de la facilité d’abord de cette zone mais, il ne faut pas négliger la maîtrise de la voie apicale en fonction de la localisation de l’épanchement (figure 3). Figure 3. Différentes approches de drainage péricardique selon le manuel de la Cleveland Clinic. Procédure étape par étape pour chaque approche – Préparation de tout le matériel de drainage ainsi que d’imagerie. – Appel immédiat de l’anesthésiste et de collègues interventionnels pour une assistance optimale et, si nécessaire, réalisation du drainage péricardique par des praticiens moins impactés émotionnellement par la situation d’urgence. • Approche sub-xiphoïdienne – Positionnement du patient : décubitus dorsal, tronc légèrement surélevé. – Désinfection : désinfection large de la zone sub-xiphoïdienne. – Infiltration anesthésique : anesthésie locale de la peau et du tissu sous-cutané. – Insertion de l’aiguille : pénétration de l’aiguille dans la ligne médiane, légèrement en direction crâniale et vers le haut, en suivant un angle d’environ 30-45 degrés par rapport au plan horizontal. L’aiguille est dirigée vers l’apex cardiaque et l’épaule gauche, en évitant le foie. – Aspiration : aspiration du liquide péricardique. Si aucun liquide n’est aspiré, il est possible de retirer légèrement l’aiguille et de la repositionner. – Surveillance : surveillance continue de l’ECG et de la pression artérielle pour détecter les arythmies ou d’autres complications. • Approche parasternale – Positionnement, désinfection, anesthésie, aspiration et surveillance identiques à précédemment. – Insertion de l’aiguille : pénétration de l’aiguille dans le 5 e espace intercostal, en suivant la marge sternale, en direction du bord gauche du sternum. L’aiguille est dirigée légèrement crânialement et postérieurement. • Approche apicale – Positionnement, désinfection, anesthésie, aspiration et surveillance identiques à précédemment. – Insertion de l’aiguille : cette approche requiert impérativement une échographie en

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