Aller au contenu principal
TwitterFacebookLinkedinPartager

Vasculaire

Publié le  Lecture 14 mins

Lithotripsie intravasculaire et lésions artérielles obstructives calcifiées des membres inférieurs

Jean-Marc PERNÈS, Costantino DEL GIUDICE, Anis GHARIANI, Unité de radiologie et de cardiologie interventionnelle, Institut mutualiste Montsouris, Paris

Une proportion considérable de lésions obstructives des artères des membres inférieurs traitées par intervention instrumentale endovasculaire présente des calcifications sévères connues pour laisser présager des taux de réussite procéduraux plus faibles, une augmentation des effets indésirables peropératoires et des résultats cliniques défavorables par rapport aux plaques non calcifiantes. La lithotripsie intravasculaire (LIV) par ondes de choc est une technique récente innovante issue de la thérapie établie pour les calculs rénaux et urétéraux. Elle repose sur l’utilisation d’un cathéter muni d’un ballon à basse pression dans lequel sont transmises des ondes acoustiques permettant de fractionner les plaques calcifiées in situ ce qui améliore la compliance de la lésion et facilite l’implantation et l’expansion symétrique de stent en diminuant le risque de dissection occlusive et de microembolisation distale.

Dans cette revue, les auteurs résument la physique, les données précliniques et cliniques sur l’utilisation de la LIV dans les obstructions calcifiées des artères des membres inférieurs. ANGIOPLASTIE ET CALCIFICATIONS : UN COUPLE MAL APPAREILLÉ… Bien que la prise en charge de l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) progresse constamment, grâce notamment aux innovations des dispositifs mécaniques endovasculaires, la présence de certaines caractéristiques anatomiques hostiles continue de représenter à la fois un défi technique et des facteurs péjoratifs en termes de rapport sécurité/efficacité à court et à long terme (1,2). Dans l’ensemble, c’est la calcification, retrouvée dans 30 à 50 % des procédures endovasculaires (3,4), qui est reconnue comme l’ennemi numéro 1 du patient (et de l’angioplasticien !) pour sa propension à compromettre les performances des procédures endovasculaires à court et à long terme, au point que la plupart des protocoles contemporains d’évaluation de nouveaux dispositifs aux États-Unis (USA Investigational Device Exemption, IDE) excluent les patients présentant des calcifications « sévères ». La présence de ces dernières influence défavorablement le taux de succès technique immédiat (davantage de dissections et de sténoses résiduelles, du fait des différences de compliance artérielle entre zones calcifiées et normales, plus de trajets extraluminaux involontaires, plus de difficultés de réentrée après un trajet sous-intimal) et les résultats à distance de l’angioplastie, par la résistance extrinsèque chronique qu’elles opposent à l’expansion complète des stents, sous-tendant le risque inhérent de fracture des endoprothèses (5). Par ailleurs, il semble fort vraisemblable qu’elles représentent une barrière importante à l’efficacité des ballons (ou stent) à élution médicamenteuse, en réduisant le taux de pénétration intramural du principe actif, limitant ainsi son effet biologique optimal (6). Ainsi, plus la lésion à traiter devient complexe et hostile, plus il est nécessaire d’effectuer une préparation optimale du vaisseau, soit dans l’optique de faciliter l’implantation secondaire d’un stent, soit dans la perspective « philosophique » (voire idéologique…), d’une stratégie assumée par les zélateurs du leave nothing behind, à savoir la volonté d’éviter au maximum la mise en place d’endoprothèses. Le défi posé par les calcifications vasculaires étendues Pour y faire face, de nombreuses techniques de modification de plaques calcaires ont été développées, regroupées sous deux principales options : les techniques ablatives d’athérectomie (directionnelle, rotationnelle ou orbitale ou par laser) et celles à base de ballons ( cutting balloon, ballon haute pression non compliant, scoring balloon), mais sans résultat spectaculaire sur la perméabilité tardive et ce, souvent au prix d’une morbidité perprocédure supérieure aux méthodes classiques (7). Ainsi, l’étude DEFINITIVE (8), évaluant l’intérêt du système d’athérectomie directionnelle TurboHawk (Medtronic) comme traitement de première intention de lésions fémoropoplitées sévèrement calcifiées confirmait certes un debulking significatif (sténose résiduelle postmanipulation 50 % pour 92 % des patients avec stenting complémentaire pour 4 %), mais au prix de complications type perforation et embolisation non négligeables, associé à un temps de procédure considérable pour traiter des lésions relativement courtes (72 min) et un rapport coût/efficacité très défavorable. Les données fournies par le registre XLPAD avec l’athérectomie rotationnelle – système Jetstream™ et Rotablator™ (Boston Scientific) (9) – et celles du registre CONFIRM avec l’athérectomie orbitaire – système Diamondback 360™ (Abbott) (10,11) – vont dans le même sens soulignant le caractère peu robuste des informations, issues d’études non prospectives et non randomisées. À ce sujet, il est intéressant de signaler qu’à partir des observations réalisées dans les vaisseaux coronaires traités par ces dispositifs d’abrasion, un changement fondamental de paradigme s’est opéré, grâce aux informations fournies par l’imagerie endovasculaire (IVUS et OCT), quant au mode d’action de ces dispositifs. En effet, on considère actuellement que c’est par le biais de modifications architecturales de la plaque calcifiée et d’une amélioration subséquente de la compliance vasculaire, favorisant l’implantation secondaire d’une endoprothèse, plutôt que par la réduction du volume de la plaque (toujours modérée, à 30 %) que se traduit l’efficacité de la méthode. Alors que pour le s lésions coronaires un score calcique est validé, basé sur les caractéristiques de la plaque évaluées grâce à l’imagerie intravasculaire par OCT ( Optimal Coherence Tomography) (12) (figure 1), où il est bien établi qu’un score élevé (lésions présentant un dépôt de calcium avec un angle maximum > 180° avec une épaisseur maximale > 0,5 mm et une longueur > 5 mm) est associé à un risque majoré de sous-expansion de l’endoprothèse devant justifier d’une préparation adéquate, rien d’aussi scientifiquement prouvé n’existe pour les lésions calcifiées des artères des membres inférieurs. Figure 1. Score de quantification calcique coronaire par OCT ( Optical Coherence Tomography). (D’après Fujino A et al. (12)). Néanmoins, plusieurs scores ont pu être proposés pour caractériser l’amplitude des calcifications et, en dépit de l’absence de définition uniforme acceptée, ils ont pu être utilisés dans diverses études et ont renforcé l’affirmation de leur contribution délétère sur l’effet des procédures instrumentales endovasculaires (figure 2) (13-16). Figure 2. Schéma des différentes méthodes d’évaluation de la charge calcique dans les artères des membres inférieurs (D’après Rocha-Singh KJ et al. (13), Patel MR et al. (14), Fanelli F et al. (15), He HP et al.( 16)). Les études les plus anciennes reposent sur des paramètres angiographiques, et échelonnent les calcifications de faible, modéré et sévère selon la bilatéralité et la longueur des calcifications observées (13-14) ; les plus récentes ont été établies et fondées sur l’analyse des données anatomiques fournies par la tomodensitométrie associée aux données de l’angiographie : celle des « quadrants » suggérée par Fanelli et al. (15) avec une répartition en 8 groupes en fonction de la distribution circonférentielle du calcium, de 0 à 360°, sur les coupes axiales natives au scanner et à leur longueur sur l’angiographie numérisée, ou celle revendiquée par He et al., fondée sur l’analyse exclusive du scanner à l’aide d’un logiciel dédié fournissant trois paramètres analysant le volume des calcifications dans la zone cible (16). Hormis dans l’étude très récente, monocentrique et rétrospective, de Gouveia et al. (17) sur l’efficacité du stent à élution médicamenteuse par paclitaxel (Eluvia™, Boston Scientific) dans les lésions calcifiées fémoropoplitées « quantifiées » sur les 3 scores PARC, PACSS et Fanelli, dont les résultats s’avèrent identiques en termes de perméabilité primaire à 2 ans, donc non reliée aux scores de sévérité de la charge calcaire, la grande majorité des travaux publiés où est étudié le lien entre évaluation « objective » de la charge calcaire précisée initialement sur un score et le retentissement de celle-ci dans le rapport sécurité/efficacité de différents outils endovasculaires conclut très globalement à un impact négatif. Par exemple, Kronlage et al. (18) concluent dans leur étude rétrospective que l’angioplastie par ballon inciseur (système AngioSculpt PTA scoring balloon catheter, AngioScore, Inc., Fremont, CA ) de lésions sévèrement calcifiées (score PARC) n’améliore pas de manière significative la perméabilité (comparée au groupe ballon simple), qu’elle soit employée comme traitement adjuvant à la pose préalable de stent ou comme technique autonome. Fanelli et al. (15), montrent la relation inverse entre perméabilité tardive et étendue circonférentielle des calcifications, à l’aide de leur classification évoquée plus haut (figure 3). Ishihaschi et al. (19) démontrent une perméabilité de 45 % des 224 lésions fémoropoplitées à 5 ans (dont 63 % avec des calcifications sévères selon le score PACS S), traitées par stent à élution médicamenteuse (paclitaxel, Zilver ® PTX, Cook Medical), avec en analyse multivariée une corrélation statistiquement significative entre resténose intrastent et calcifications bilatérales du mur artériel. Enfin, He et al. (16) utilisent leur propre classification TDM décrite plus haut chez 115 patients adressés pour angioplastie de lésions obstructives fémoropoplitées, et identifient comme facteurs de risque indépendants, les 3 paramètres scanner relatifs au volume calcique pour l’amputation, la mortalité et la resténose intrastent. Figure 3. Relation inverse entre perméabilité primaire et perte de lumière tardive à 12 mois en fonction des groupes de sévérité des calcifications selon le score en quadrants de Fanelli (D’après Fanelli F et al. (15)). Ces différentes études montrent bien que la présence de calcifications, a fortiori sévères, demeure l’un des talons d’Achille du traitement endovasculaire des obstructions artérielles des membres inférieurs, justifiant la recherche perpétuelle de solutions instrumentales satisfaisantes pour contrer cette réalité. Adaptée de la technologie de lithotripsie utilisée depuis 30 ans pour le traitement des calculs urétéraux-rénaux, la lithotripsie intravasculaire (IVL) est apparue comme une technique innovante dans cette situation. Elle repose sur le principe des ondes de choc sonique délivrées grâce à un système d’administration situé dans le ballon d’un cathéter d’angioplastie et dont nous nous proposons de détailler les principes physiques, les mécanismes d’action et les résultats. DE LA LITHOTRIPSIE ÉLECTRO-HYDRAULIQUE EXTRACORPORELLE À LA LITHOTRIPSIE INTRAVASCULAIRE (LIV) La lithotripsie (ou lithotritie) électrohydraulique – les deux termes peuvent être utilisés selon le Larousse, du

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Articles sur le même thème