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Hypertension pulmonaire

Publié le  Lecture 11 mins

Hypertension pulmonaire de l’enfant

Estibaliz VALDEOLMILLOS et coll*, département des cardiopathies congénitales, Centre de référence malformations cardiaques congénitales complexes M3C, hôpital Marie Lannelongue, groupe hospitalier Paris-Saint Joseph, Plessis-Robinson

L’hypertension pulmonaire pédiatrique présente des caractéristiques communes à celle de l’adulte, en termes de physiopathologie, de stratification du risque et d’approche thérapeutique. Elle est néanmoins caractérisée par des étiologies spécifiques, des adaptations thérapeutiques et un niveau d’évidence dans la littérature scientifique plus faible. Une approche personnalisée multidisciplinaire est nécessaire.

L'hypertension pulmonaire (HTP) regroupe un en semble de pathologies cardiopulmonaires caractérisées par une élévation progressive des ré sistances vasculaires pulmonaires. Le pronostic de cette pathologie est lié à la survenue d’une défaillance ventriculaire droite. Définition de l’hypertension pulmonaire Dans la circulation fœtale normale, la pression artérielle pulmonaire (PAP) est similaire à la pression systémique et diminue rapidement après la naissance, pour atteindre des niveaux identiques à ceux de l’adulte vers l’âge de 2 à 3 mois. L’hypertension pulmonaire (HTP) pédiatrique a été définie historiquement comme la PAP moyenne (PAPm)   25 mmHg après l’âge de 3 mois. Lors du 6 e World Symposium on Pulmonary Hypertension (WSPH) de 2019, la définition de l’HTP précapillaire pédiatrique a été modifiée, associant une PAPm > 20 mmHg et une élévation de la résistance vasculaire pulmonaire (RVPi) ≥ 3 UW. Cette définition pédiatrique a été confirmée dans les recommandations de l’ERS/ESC parues en 2022 (tableau 1). Pour définir l’HTP pédiatrique, il est recommandé d’utiliser la RVP indexée (RVPi) à la surface corporelle (SC). HTP : hypertension pulmonaire, PAPm ; Pression artérielle pulmonaire moyenne ; PAPO : pression artérielle pulmonaire d’occlusion ; RVPi : résistances vasculaires pulmonaires indexées ; UW : unités wood.m 2. Chez certains enfants avec cardiopathie complexe univentriculaire, l’analyse de la RVP est essentielle, car la maladie vasculaire pulmonaire hypertensive peut être présente avec une PAPm 20 mmHg. À l’inverse, chez certains enfants ayant des shunts cardiaques avec un hyperdébit pulmonaire, la PAPm peut être   20 mmHg sans maladie vasculaire pulmonaire hypertensive. Classification et épidémiologie de l’HTP pédiatrique L’incidence de l’HTP pédiatrique est estimée à 4-10 cas par million d’enfants par an, avec une prévalence de 20-40 cas par million en Europe. Ces pathologies sont regroupées et classées en fonction de leurs caractéristiques physiopathologiques, de leur présentation clinique et de leur prise en charge. La classification de l’HTP pédiatrique a été révisée lors du 6 e WSPH (tableau 2). Le premier groupe est constitué par l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) caractérisée par une HTP précapillaire causée par un remodelage sévère des artères pulmonaires de petit calibre conduisant à une élévation de la résistance vasculaire pulmonaire. L’HTAP associée aux cardiopathies congénitales (HTAP-CC) est la première cause d’HTP chez l’enfant. Le diagnostic de la cardiopathie précède habituellement celui de l’HTAP permettant une réparation de la cardiopathie avant que le remodelage vasculaire pulmonaire ne soit plus réversible. Néanmoins, l’HTAP peut compliquer l’évolution d’une cardiopathie congénitale non réparée (syndrome d’Eisenmenger) ou persister si la correction a été trop tardive. Quatre types d’HTAP-CC sont donc individualisés : • le syndrome d’Eisenmenger : comprend tous les shunts intraet extracardiaques qui évoluent avec le temps vers une élévation irréversible de RVP et vers une inversion du shunt ; une cyanose, une érythrocytose secondaire et une atteinte de plusieurs organes sont généralement associées. • l’HTAP associée à des shunts systémiques-pulmonaires prévalents : comprend des shunts modérés à importants ; la RVP est légèrement à modérément augmentée ; le shunt systémique pulmonaire est toujours prévalent, alors que la cyanose au repos n’est pas une caractéristique. • l’HTAP avec défect mineur ou coïncidant : élévation marquée de RVP en présence de petits défauts cardiaques. • l’HTAP à shunt fermé : l’HTAP persiste après la correction ou réapparaît/se développe des mois ou des années après la correction. Plus rarement, l’HTAP et la cardiopathie coexistent et procèdent d’une même anomalie génétique sous-jacente altérant d’une part la morphogénèse cardiaque, d’autre part le développement pulmonaire (TBX4 par exemple). Cette dernière éventualité fait le lien avec le second groupe d’HTAP de l’enfant représenté par les HTAP idiopathiques et héritables. Les HTAP associées à d’autres affections sont exceptionnelles. L’HTAP persistante du nouveau-né est une entité particulière par sa réversibilité quasiment constante. Elle est liée à la prématurité et est régressive avec l’amélioration de l’état respiratoire de l’enfant. Les autres formes néonatales d’HTP sont essentiellement liées à des anomalies du développement pulmonaire. Les causes génétiques et leur distribution sont les mêmes que chez l’adulte et sont identifiées actuellement chez 20 à 30 % des patients avec forme sporadique pédiatrique d’HTAP et dans 70 à 80 % des formes familiales. Les mutations identifiées impliquent notamment le gène codant pour le récepteur BMPR-II, le gène codant pour le récepteur ACVRL1 et plus récemment la mise en avant du gène codant pour la protéine TBX4. Certains variants du gène SOX17 sont associés à l’HTAP et aux cardiopathies congénitales. De plus, l’HTAP pédiatrique est fréquemment associée à des atteintes syndromiques ou chromosomiques sans que les mécanismes physiopathologiques sous-jacents soient bien élucidés. Le groupe 2 correspond aux HTP dues à une cardiopathie du cœur gauche (sténose de veines pulmonaires, retour veineux pulmonaire anormal obstructif, sténose mitrale ou aortique, coarctation de l’aorte, etc.). C’est une HTP post-capillaire avec une élévation passive de la PAP, due à l’élévation des pressions dans l’oreillette gauche. Le groupe 3 correspond aux HTP secondaires à des maladies respiratoires, notamment les maladies du développement pulmonaire (dysplasie broncho-pulmonaire, hernie diaphragmatique congénitale, dysplasie alvéolaire, anomalies des protéines du surfactant, etc.). C’est une HTP précapillaire proportionnelle à la sévérité de la pneumopathie sous-jacente. Le groupe 4 correspond aux HTP causées par une obstruction des artères pulmonaires. L’hypertension pulmonaire thromboembolique chronique est très rare chez l’enfant. Enfin, le groupe 5 constitue les HTP de mécanisme incertain et/ou multifactoriel, comme des HTP associées à des maladies hématologiques (anémies hémolytiques chroniques), maladies systémiques (sarcoïdose), maladies génétiques (neurofibromatose de type 1) ou les cardiopathies congénitales complexes (HTP segmentaire, circulation univentriculaire ou syndrome de Cimeterre). Diagnostic de l’HTP chez l’enfant L’algorithme diagnostique est globalement similaire à celui de l’adulte. Les manifestations cliniques observées traduisent principalement le retentissement sur le cœur droit et les manifestations liées à la maladie sous-jacente. La dyspnée à l’effort est le symptôme le plus fréquent. Au fur et à mesure que la maladie progresse, d’autres symptômes tels que des syncopes d’effort (fréquentes chez l’enfant), douleurs thoraciques, palpitations, ou même hémoptysie peuvent être identifiés. Chez le nourrisson, le retard de croissance est fréquent et a une valeur pronostique. Cathétérisme cardiaque Le cathétérisme cardiaque est le « gold standard » pour le diagnostic, la stratification du risque et évaluer l’opérabilité chez les patients avec cardiopathie. Le cathétérisme cardiaque doit être effectué avec une ventilation spontanée dans la mesure du possible afin de permettre le calcul précis de la consommation d’oxygène. Le test de vasodilatation pulmonaire (combinaison de monoxyde d’azote-20-80 ppm et d’oxygène élevé FiO 2 0,8-1,0) est recommandé au moment du diagnostic, afin d’identifier les patients pouvant bénéficier d’un traitement par les inhibiteurs calciques. Le test positif, est défini par une diminution de la PAPm de plus de 10 mmHg avec une PAPm ≤ 40 mmHg et un débit cardiaque normal ou élevé. Le test de vasodilatation est également utilisé pour distinguer l’HTAP réversible chez les patients atteints d’HTAP-CC, et donc l’opérabilité potentielle (tableau 3). Considérations spéciales selon : l’âge, type de lésion, désaturation à l’exercice et traitement. Échographie cardiaque transthoracique (ETT) L’ETT est l’examen de référence pour le dépistage de l’HTP. Elle permet d’estimer directement la PAP par la mesure de la vitesse du flux d’insuffisance tricuspide et/ou pulmonaire ou indirectement (courbure septale). Cet examen permet aussi d’évaluer la fonction cardiaque, notamment la fonction ventriculaire droite et diagnostiquer de possibles CC associées méconnues (tableau 4). ETT : Échocardiographie transthoracique ; FRVD : Fraction du raccourcissement du VD ; HTP : Hypertension pulmonaire ; IT : Insuffisance tricuspide ; OD : Oreillette droite ; OG : Oreillette gauche ; PAP : Pression artérielle pulmonaire ; TAPSE : excursion systolique de la valve tricuspide ; VD : Ventricule droit ; VG : Ventricule gauche. Autres examens d’imagerie : IRM cardiaque, TDM thoracique et scintigraphie pulmonaire de ventilation et perfusion L’IRM cardiaque permet d’évaluer la fonction ventriculaire, le débit sanguin, la perfusion pulmonaire et les caractéristiques du tissu myocardique. L’IRM nécessite une immobilité complète et n’est réalisable sans sédation que chez le grand enfant. Le rôle principal de l’angio-TDM thoracique est de détecter les anomalies du parenchyme pulmonaire, la maladie veino-occlusive, la maladie thromboembolique et les anomalies vasculaires telles que la sténose des veines pulmonaires. La scintigraphie pulmonaire de ventilation et perfusion est très peu utilisée dans le diagnostic de l’HTP pédiatrique, elle n’est indiquée qu’à la recherche d’une HTP post-embolique. Test fonctionnel : test de marche de 6 minutes (TDM6M) et épreuve d’effort cardiopulmonaire (EFX) Il n’y a pas de données qui soutiennent l’utilisation du TDM6M pour prédire la survie dans l’HTP pédiatrique. La plupart des praticiens utilisent les variations de distance au cours du suivi. L’EFX est fréquemment utilisée dans le suivi des patients adultes, cependant son utilisation chez les enfants est difficile. Biomarqueurs Le BNP et le NT-pro BNP ont été identifiés comme

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