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Valvulopathies

Publié le  Lecture 12 mins

Aptitude au sport et cardiopathies valvulaires

H. DOUARD, Département des épreuves d’effort et de la réadaptation, hôpital cardiologique de Pessac

Les atteintes valvulaires chez un sportif et, a fortiori, chez un athlète de haut niveau, sont peu fréquentes : les valvulopathies dégénératives touchent en effet des sujets âgés et les atteintes post-rhumatismales sont en nette diminution. De telles observations cliniques existent cependant, liées à un engouement – justifié – pour la poursuite ou la reprise d’une activité sportive tardive et surtout l’émergence de plus en plus fréquente d’athlètes transplantés d’origine maghrébine ou d’Afrique sub-saharienne, encore concernés par les valvulopathies post-rhumatismales. D’autres étiologies peuvent également affecter des sujets jeunes impliqués dans une carrière sportive telle la maladie de Barlow ou les atteintes postoslériennes, voire traumatiques. Les lésions d’origine ischémique ou fonctionnelle des cardiomyopathies ou dans le cadre d’une fibroendomyocardiopathie sont, elles, incompatibles avec une activité physique et sportive soutenue.

Les deux questions spécifiques liées à l’activité sportive dans ce contexte sont : – Faut-il élargir les indications opératoires conservatrices : chirurgie prématurée par rapport aux indications classiques chez des sujets plus sédentaires ? – Quelles sont les possibilités de reprise d’une activité physique et sportive après cette chirurgie ? Celle-ci, si elle évite les complications potentielles d’un remplacement valvulaire prothétique, questionne sur le risque délétère potentiel du sport (et en tous cas sa reprise rapide) sur cette réparation valvulaire. Dans l’arbre décisionnel d’aptitude au sport (tableau 1), et notamment la délivrance du certificat de non-contre-indication, interviennent non seulement la valvulopathie en cause, son retentissement clinique (vérifié par un test d’effort de tolérance), l’évaluation échocardiographique du retentissement cardiovasculaire (en termes de taille et de fonction ventriculaire, de pressions pulmonaires, etc.) mais aussi et peut-être surtout le type de sport pratiqué et les contraintes cardiovasculaires qu’il requiert ; la démarche est donc individuelle, souvent mal éclairée par la littérature, même si des recommandations américaines et européennes ont été récemment publiées pour la pratique des sports en compétition. Celles-ci sont relativement voisines, basées sur la classification (très critiquable) des sports de Mitchell (tableau 2) : outre qu’elle inclut des sports anglo-saxons très spécifiques (en méconnaissant des sports plus européens), le degré d’intensité, la motivation individuelle, les conditions climatiques sont autant de facteurs non négligeables non pris en compte pour évaluer les risques d’accidents cardiovasculaires. Ainsi, le tennis de table en compétition, très contraignant sur le plan cardiovasculaire, n’a rien à voir avec le « ping-pong » de loisir… Les valvulopathies bénignes chez les sportifs Le raffinement des examens non invasifs de dépistage et notamment de l’échocardiographie Doppler couleur font peut-être aujourd’hui davantage courir le risque d’interdire par excès de prudence ou d’ignorance, comparativement aux risques excessifs sur le retentissement cardiaque… En effet, les dilatations cavitaires minimes mais significatives observées chez les athlètes à haut volume d’entraînement génèrent, par la fixité des structures valvulaires et des anneaux, des fuites valvulaires bien visibles en échocardiographie Doppler couleur, essentiellement en position mitrale et surtout tricuspidienne. Douglas rapporte une fréquence de 91 vs 31% dans une population sédentaire appariée du même âge. Ces fuites minimes ne sont souvent pas entendues au stéthoscope. On peut en rapprocher les souffles innocents d’hyperdébit chez les adolescents, dus à des flux non laminaires sur les anneaux aortiques et pulmonaires, et qui autorisent bien sûr toute compétition. Chez les sportifs « attardés » après 50 ans, les souffles dits athéromateux, souvent liés à un discret remaniement des sigmoïdes aortiques, posent le problème non résolu du risque évolutif possible vers une sténose aortique significative, peut-être accélérée par l’activité physique et sportive régulière. Rétrécissement aortique Bien que le spectre de la syncope d’effort plane sur le rétrécissement aortique, cette valvulopathie est souvent bien tolérée chez les sportifs. Le rôle possible du sport sur la vitesse de constitution de l’obstacle valvulaire a été évoqué. Comme pour l’indication de la chirurgie de remplacement valvulaire, l’estimation du gradient transvalvulaire et de la surface aortique par écho-Doppler ou cathétérisme ne résume pas uniquement les habilitations à la pratique du sport. Les paramètres observés lors d’un test d’effort (montée tensionnelle, sous-décalage, réponse chronotrope) sont ici fondamentaux ; tout sport, notamment à contrainte statique prédominante, peut être proscrit en cas de mauvaise adaptation tensionnelle ou/et de sous-décalage majeur, malgré un gradient encore limité au repos. Des cas inverses sont également possibles. Les mécanismes impliqués dans la syncope d’effort du rétrécissement aortique restent encore imparfaitement élucidés ; le rôle de baroréflexe intramyocardique est incriminé. Les sports comportant des efforts abrupts, paroxystiques, sans échauffement, sont bien sûr proscrits, même à un stade peu évolué de la valvulopathie (tennis, squash, lancer…). Une banale bicuspidie (en dehors du cas du Marfan), dépistée chez un sujet jeune asymptomatique et qui ne se calcifiera peut-être jamais, n’interdit pas l’activité sportive, même de haut niveau. Le problème est plus difficile quand il s’agit d’un jeune souhaitant s’engager dans une filière de sport professionnel. Rétrécissement mitral (RM) Outre que cette pathologie devient rare dans les pays à haut niveau de vie, il est bien connu que les mitraux limitent d’eux-mêmes toute activité quotidienne et notamment sportive. Le RM entraîne une limitation à l’effort maximal par inadaptation circulatoire que traduisent l’augmentation excessive de l’équivalent ventilatoire pour l’oxygène et la faible augmentation de la VO2 par rapport à l’importante augmentation de fréquence cardiaque. Le passage en fibrillation auriculaire diminue d’autant cette capacité aérobie maximale. Aussi est-il exceptionnel que des patient(es) atteint(es) par cette valvulopathie soient réellement désireux(ses) de pratiquer un sport intensif : « les autochtones sont souvent âgées, fortes, fibrillantes et déconditionnées ; les immigrantes sont plus jeunes, ont un RM serré, souvent encore en rythme sinusal et devraient se reconditionner mais… ont d’autres préoccupations ». Au cours d’un effort, la dyspnée est un symptôme rapidement limitant. L’effort présente un risque d’œdème pulmonaire et d’arythmie supraventriculaire. Les antiarythmiques bradycardisants, tels les bêtabloquants ou le vérapamil, par augmentation du remplissage diastolique, ont un intérêt théorique dans cette indication à l’effort. En cas de fibrillation auriculaire, qui témoigne d’une dilatation déjà non négligeable de l’oreillette gauche, tous les sports doivent être exclus en raison de la médiocre élévation du débit cardiaque et du risque accru d’embolie systémique. Après un geste de valvuloplastie, la demande de pratique sportive ultérieure est encore plus exceptionnelle ; pourtant, la dissociation entre le bénéfice hémodynamique et l’amélioration objective fonctionnelle devrait justifier d’autant la reprise, sinon d’une activité sportive, du moins d’un reconditionnement périphérique initial. En pratique, et selon la classification des sports de Mitchell : – un sujet présentant une sténose mitrale lâche (sténose > 1,5 cm, une pression pulmonaire systolique (PAPS) 35 mmHg) en rythme sinusal, asymptomatique, peut pratiquer tous les sports ; – une sténose modérée (surface estimée entre 1,1 et 1,4 cm 2, pression pulmonaire systolique 50 mmHg) ou faible en fibrillation auriculaire (avec HTAP 50 mmHg) permet de pratiquer des efforts statiques modérés ou dynamiques ; – en cas d’HTAP de repos > 50 mmHg, les efforts statiques modérés ou les efforts dynamiques faibles sont autorisés. L’échocardiographie d’effort apporte des renseignements complémentaires intéressants pour apprécier le retentissement sur les pressions pulmonaires. Insuffisance mitrale Dans la décision d’aptitude interviennent ici avant tout les facteurs étiologiques ; à degré de fuite égal, le problème est radicalement différent s’il s’agit d’une IM fonctionnelle sur une myocardiopathie ou d’une IM post-rhumatismale. La première témoigne d’une fonction ventriculaire gauche altérée et contre-indique toute activité sportive, la seconde doit faire considérer l’importance de la fuite. Dans le cas d’une coronaropathie, l’insuffisance mitrale est toujours un élément péjoratif quel que soit son mécanisme (dilatation de l’anneau, dyskinésie de pilier ou rupture de cordage) ; en dehors d’une prudente réadaptation postinfarctus, tout sport reste contre-indiqué. De même, une valve mitrale atteinte après un Osler reste toujours fragile, sans compter le risque d’une possible embolie de la végétation persistante qui contre-indique donc tout sport intensif. En l’absence de constitution brutale, la tolérance est souvent bonne dans cette valvulopathie (rôle d’amortisseur hydraulique de l’oreillette gauche, dilatation cavitaire ventriculaire gauche-hypertrophie pariétale proportionnelle). Mais l’effort physique aggrave une régurgitation, même minime (l’anneau mitral se déforme plus qu’au repos, l’onde V de régurgitation peut atteindre 50 mmHg, voire plus, même en cas de fuite de grade I ou II), avec un risque de trouble du rythme supraventriculaire accru. Enfin, lors de l’effort sur une valve dysplasique ou rhumatismale, il existe un risque de rupture de cordage ou de déchirure valvulaire. En pratique, deux cas extrêmes ne posent guère de problème : – une IM de grade I en rythme sinusal sans dilatation de l’oreillette gauche, ni trouble du rythme supraventriculaire lors de l’effort, peut pratiquer tous les sports sous réserve de surveillance régulière ; – à l’inverse, la survenue d’une fibrillation auriculaire dans ce contexte d’insuffisance mitrale interdit tous les sports à haute contrainte cardiovasculaire et risque traumatique (nécessité d’un traitement anticoagulant au long cours). Entre ces deux extrêmes, les athlètes asymptomatiques en rythme sinusal, avec une fonction ventriculaire gauche normale, sont autorisés à pratiquer tous les sports, moyennant une surveillance échocardiographique biannuelle. Les athlètes asymptomatiques à fraction d’éjection normale et un début de dilatation ventriculaire gauche peuvent pratiquer les efforts statiques modérés et dynamiques modérés. Si la fraction d’éjection devient 60 %, le diamètre télésystolique > 45 mm, les critères d’intervention sont atteints ; ceux-ci peuvent être visés plus prématurément chez les sportifs pour prévenir une dilatation de l’oreillette gauche et la fibrillation

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