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Vasculaire

Publié le  Lecture 23 mins

Comment reconnaître l'origine vasculaire d'une douleur de jambe ?

P. CACOUB, D. SENE et D. SAADOUN, hôpital de La Pitié-Salpêtrière, Paris

Les douleurs à la marche sont, à partir d’un certain âge, extrêmement fréquentes et leurs origines fort diverses : vasculaire, orthopédique, musculaire, articulaire ou neurologique. Les véritables difficultés diagnostiques résultent de l'intrication fréquente, chez les sujets à partir de la cinquantaine, de nombreuses anomalies pouvant également donner des douleurs à la marche.
Une boiterie d'esquive, une claudication intermittente, un petit pas pressé, un pas traînant, un pas chaloupé, un pas décalé... Chacun peut avoir sur la marche un regard polarisé par la lorgnette de sa discipline...

Démarche diagnostique devant une douleur à la marche Les pathologies douloureuses de la marche sont un motif fréquent de consultation et si la liste des étiologies est longue, le diagnostic peut être fait le plus souvent cliniquement. Dans le cadre du bilan étiologique de ces douleurs, le problème n'est pas tant de savoir ce qui est d’origine vasculaire mais surtout de reconnaître ce qui ne l’est pas. Seule cette démarche d'élimination permettra de poser correctement un diagnostic clinique, de demander les examens complémentaires nécessaires et donc de pouvoir prendre en charge correctement les patients artériopathes. La démarche clinique s'effectue parmi quatre grands registres pathologiques : artériel, veineux et lymphatique, rhumatologique et neurologique (tableau 1). Chacune de ces atteintes affecte la marche de façon différente par la fonction touchée, le seuil douloureux, la gêne ressentie, l'horaire de survenue (mécanique ou inflammatoire), l'existence d'une position antalgique, de troubles de l'érection, d'un déficit sensitivo-moteur et par tous les mécanismes mis en jeu pour compenser le déficit. La marche normale sous-entend l'intégrité de plusieurs systèmes : vasculaire, neurologique et ostéo-articulaire, dont les atteintes peuvent être isolées ou associées. Ainsi, un interrogatoire précis et un examen physique complet doivent permettre dans la majorité des cas d'évoquer ou d'affirmer l'étiologie de la marche douloureuse (tableau 2). L'interrogatoire et l'examen clinique permettent dans la majorité des cas le diagnostic d'une pathologie vasculaire. La douleur artérielle La claudication artérielle est souvent typique chez un patient de 50 ans, parfois plus jeune, tabagique, qui décrit, après une certaine distance de marche, une douleur de survenue brutale, le plus souvent unilatérale, imposant l'arrêt et cédant alors rapidement, définissant la claudication intermittente (stade II de la classification de Leriche et Fontaine). Parfois il s'agit d'une fatigabilité brutale moins douloureuse, d'une sensation de brûlure ou de striction. Les caractéristiques principales restent l'absence de symptôme au repos, en position debout ou lors de mouvements particuliers, et la régression rapide à l'arrêt de l'effort. Le périmètre de marche est variable en fonction de nombreux critères lésionnels comme la localisation des lésions, les suppléances, l'âge du patient... Le périmètre de marche n'est qu'un des éléments à prendre en compte car il ne reflète pas forcément la gêne réelle ressentie par le sujet qui dépendra pour beaucoup de l'âge, de la profession, des conditions économiques, des loisirs, des antécédents familiaux et de la psychologie du sujet. Il n'y a pas de parallélisme anatomo-clinique absolu. La mesure de l’indice de pression systolique (IPS) cheville-bras est le critère diagnostique le plus sensible quand il est 0,9. Un bilan lésionnel par écho-Doppler complétera l’exploration. Plusieurs éléments d'interrogatoire évoquent une artériopathie des membres inférieurs sur : • la topographie de la douleur, le mollet, la cuisse ou la fesse révélant différents niveaux d'atteinte artérielle, • le caractère unilatéral ou bilatéral traduisant une atteinte diffuse, • l'absence de position antalgique, • la provocation uniquement par la marche, donc d'allure mécanique, dans les stades II et III, qui peut coexister avec des douleurs de décubitus insomniantes dans le stade IV, • l'aggravation de la douleur en fonction de la pente du terrain, • l'existence d'un trouble de l'érection. L'examen physique recherchera l'existence et la qualité des pouls, des souffles vasculaires, des troubles trophiques, et l'absence d'autres atteintes (amyotrophie, myalgies, déformation ou diminution de mobilité articulaire, trajet douloureux de type névralgique, abolition ou diminution des réflexes ostéo-tendineux, signe de Lasègue, de Babinski ou d'Hoffmann). L'examen écho-Doppler, l'un des seuls vraiment utile dans ce type de symptomatologie, identifie la lésion artérielle, son type et son degré de sévérité, notamment pour les lésions proximales. L'épreuve de marche sur tapis roulant, en particulier s'il existe un doute sur le diagnostic en raison d'un interrogatoire et/ou d'un examen clinique difficiles, permet de quantifier le degré de claudication. Elle peut être standardisée avec une vitesse de 3,2 km/h et une pente à 10 %. L'épreuve est poursuivie jusqu'à l'apparition d'une douleur imposant l'arrêt, l'apparition de la gêne étant notée. Il est parfois nécessaire d'utiliser des vitesses moins élevées chez des patients âgés. Des techniques plus sophistiquées peuvent être utilisées comme les mesures de TcPO2 à l'effort sur un tapis roulant, reflet de l'ischémie musculaire. Les douleurs veineuses Les douleurs à la marche d'origine veineuse sont également d'allure mécanique, d'apparition moins brutale et d'intensité moins violente, soulagées par le repos et les jambes surélevées. Elles sont exagérées par le maintien en position debout qui favorise l'apparition d'un œdème. L'examen visuel de la peau détecte d'éventuelles varices que l'on rattachera à une incontinence saphènienne ou non. L'existence d'un œdème pourra être rapporté à une insuffisance veineuse, lymphatique ou mixte selon son aspect. L'écho-Doppler fournit de précieux renseignements sur la perméabilité de l'ensemble du réseau veineux profond et superficiel, en identifiant parfois des signes de thrombose récente ou ancienne avec ses séquelles, et en dressant une cartographie des « points de fuite » à l'origine d'une maladie veineuse superficielle. L'existence de troubles trophiques à type d'ulcère ou d'eczéma variqueux, d'hypodermite ou de dermite ocre traduit une maladie veineuse déjà décompensée. La marche douloureuse chez le sportif Devant toute suspicion de lésion tendineuse ou musculaire chez le sportif, un examen clinique minutieux est indispensable pour dépister des lésions traumatiques comme les ruptures totales ou partielles, les luxations ou subluxations, ou des lésions micro-traumatiques telles que les syndromes fissuraires des péroniers latéraux, des jambiers antérieurs ou postérieurs, des ténosynovites ou des tendinites. Une bonne évaluation clinique permet dans la plupart des cas de se passer des examens complémentaires. Les atteintes musculaires - Parmi les atteintes musculaires du triceps sural, celle du jumeau interne est la plus fréquente, bien que le traditionnel claquage du mollet soit plus connu et d'identification plus aisée. La désinsertion du jumeau interne se reconnaît par l'interrogatoire qui précise les circonstances de l'accident, notamment un état de fatigue général ou local, l'existence de crampes, de conditions climatiques extrêmes ou un manque d'échauffement. Le mécanisme est toujours consécutif à une mise en tension brutale du mollet lors de l'extension du genou, avec désinsertion entre l'aponévrose jambière et le jumeau. L'étirement passif, en particulier la dorsiflexion du pied est douloureuse et limitée lorsque le genou est en extension, et devient possible et indolore lors de sa flexion. La palpation douloureuse de la région retrouve un empâtement local et une ecchymose. En regardant le sujet marcher, on distingue deux types de boiterie : soit le patient prend appui sur la pointe du pied, genou en flexion, ce qui détend le jumeau interne ; soit il pose son pied en rotation externe, ce qui peut traduire aussi bien une désinsertion du jumeau interne qu'une rupture du tendon d'Achille. - Méconnus, ou pris à tort pour une crampe musculaire, un kyste poplité, une thrombose veineuse ou une rupture du tendon d'Achille, qui reste un des grands diagnostics différentiels, les désinsertions du jumeau interne peuvent laisser des dégénérescences de ce muscle avec un retentissement permanent sur la marche chez des sujets souvent jeunes. La claudication de l'artère poplitée piégée Au niveau du creux poplité, certaines pathologies vasculaires peuvent prendre le masque d'une banale boiterie surtout chez des sujets jeunes et sportifs. Le syndrome de l'artère poplitée piégée, souvent méconnu, est pourtant présent mais asymptomatique chez près de 50 % des athlètes. L'hypertrophie des muscles jumeaux, en particulier chez les cyclistes, les danseurs, les nageurs, provoque une compression intermittente de l'artère pouvant devenir plus ou moins permanente, à l'origine d'une insuffisance circulatoire artérielle à l'effort ou dans certaines positions. La claudication artérielle survient paradoxalement à la marche plutôt qu'à la course, car la jambe se trouve moins fléchie et cède avec le ralentissement de la marche. La dorsiflexion du pied ou l'extension de la jambe peuvent provoquer des douleurs. L'altération progressive de la paroi artérielle est source de complications locales, sténose ou anévrisme, se révélant parfois par une ischémie aiguë de jambe. En raison du développement progressif d'une circulation collatérale, l'interrogatoire retrouve une claudication intermittente pour un périmètre de marche large ou pour un effort plus violent que la marche, associé à « une hyperthermie » du genou. L'examen clinique est le plus souvent normal, mais peut révéler une pâleur ou une cyanose du pied, l'abolition d'un pouls, des troubles trophiques des orteils, un souffle poplité, une tuméfaction pulsatile ou non du creux poplité (figure 1). Figure 1. Vélocimétrie doppler d’une poplitée piégée (signal sonore sur la tibiale antérieure à la cheville); vélocimétrie normale en position en position indifférente, puis flux aboli en flexion dorsale du pied, puis retour à la normale après relâchement de la posture. C'est l'écho-Doppler et surtout l'IRM qui mettront en évidence, lors de manœuvres posturales, des anomalies de trajet et de calibre de l'artère (72 % des « pièges poplités » diagnostiqués au Doppler sont asymptomatiques). Lorsqu'il existe un « piège » veineux associé, un œdème de la jambe ou du pied, des varices, des crampes musculaires à l'effort, voire une phlébite

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