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Prévention et protection

Publié le  Lecture 22 mins

Facteurs de risque cardio-vasculaire - Nouvelles cibles thérapeutiques

M. NGUYEN

Les données épidémiologiques concernant les maladies cardio-vasculaires sont particulièrement alarmantes ; elles incitent les spécialistes à promouvoir une intensification de la lutte contre les facteurs de risque et plus spécialement ceux qui, comme la surcharge pondérale et le tabagisme, échappent encore à une véritable prise en charge, faute de moyens thérapeutiques adaptés.
Or, c’est justement là où l’on mesure les conséquences les plus dramatiques aussi bien dans les pays occidentaux que dans ceux en voie de développement.

La mortalité cardio-vasculaire pire que la peste noire Dans son allocution inaugurale lors du congrès de Munich, le Pr Jean-Pierre Bassand, président de la Société Européenne de Cardiologie (ESC), a rappelé les données épidémiologiques qui montrent le poids du fléau. Celles-ci, publiées en 1996 (Munoz et coll.), tiraient déjà la sonnette d’alarme en révélant la progression des facteurs de risque cardio-vasculaire. À partir de telles données, on pouvait entrevoir ce qui allait contribuer à augmenter la morbi-mortalité, qu’il s’agisse ou non de maladies transmissibles, le nombre des décès imputables à des causes cardio-vasculaires passant de 28,1 millions (données 1990) à 49,7 millions en 2020, si aucune mesure préventive n’était adoptée. Une menace omniprésente La pandémie des maladies cardio-vasculaires s’observe dans les pays développés, mais également dans les pays en voie de développement ; « elle est pire que la peste noire qui avait sévi au Moyen Âge », souligne le Pr Bassand, bien qu’il ne s’agisse pas d’une maladie transmissible ! Sa cause : des facteurs de risque liés à certaines habitudes alimentaires et d’hygiène de vie. C’est vers ce domaine que devront porter les efforts d’information. La Société Européenne de Cardiologie se devait de se tourner délibérément vers la prévention ; un objectif consensuel décidé et adopté à Cork (Irlande) en février 2004 et qui doit, à partir de maintenant, entrer dans la pratique courante. On connaît bien les facteurs de risque dont la responsabilité a été établie au cours d’études internationales. La dernière en date, l’étude INTER-HEART, a d’ailleurs créé l’événement lors de l’ESC et, de ce fait, a été largement discutée et commentée à Munich quelques jours avant sa publication (le 14 septembre 2004) dans le Lancet. Neuf facteurs de risque D’après cette étude, l’ethnicité n’entre pas en ligne de compte ; les facteurs de risque sont les mêmes pour tous et partout dans le monde : tabagisme, dyslipidémie (mauvais rapport apolipoprotéine B/apolipoprotéine A-1), hypertension, diabète, obésité abdominale, stress, insuffisance de consommation de fruits et légumes, manque d’exercice ! Pas un seul continent, pas une seule civilisation ne sont épargnés, de même que la plupart des facteurs de risque cardio-vasculaire peuvent être prévenus, et parmi eux, le tabagisme et l’obésité qui sont particulièrement préoccupants, pour ne pas dire menaçants pour les années à venir. En effet, faisant référence au message délivré il y a plus de quatre siècles par le roi d’Angleterre James I er, le Pr Bassand en a rappelé les propos : « le tabagisme est une habitude répugnante pour l’œil, dégoutante pour le nez, blessante pour le cerveau, dangereuse pour les poumons... » ; or, par l’intermédiaire des maladies cardio-vasculaires et pulmonaires, le tabagisme est en passe de devenir l’une des causes majeures de décès avec près de 8 millions de morts par an d’ici 2020. Quant à l’obésité, elle progresse de façon dramatique sur toute la planète, faisant le lit des maladies métaboliques et vasculaires : syndrome métabolique, diabète, hypercholestérolémie, hypertension artérielle. La situation est grave. Il est temps de mettre en place une stratégie globale ciblée pour stopper la progression mondiale de l’obésité. Cette stratégie doit s’appuyer sur des travaux scientifiques, elle passera par des recommandations et l’éducation des patients. Une bonne nouvelle : le risque est prévisible et les causes sont contrôlables C’est le Pr Salim Yusuf, principal investigateur de l’étude INTER-HEART (université Mac Master, Canada) qui a tiré les messages les plus encourageants de cette très large étude menée à l’échelle planétaire, c’est-à-dire dans 52 pays sur une population de 29 000 sujets suivis pendant toute une décennie. Ses conclusions devront servir de fondement à une approche thérapeutique préventive du fléau cardio-vasculaire. Comme l’a souligné le Pr Yusuf, l’étude INTER-HEART réfute les idées conventionnelles selon lesquelles seulement la moitié des infarctus pourraient être prévenus. D’après INTER-HEART, 90 % des infarctus de myocarde sont prévisibles ! Il s’agit, pour S. Yusuf, d’un résultat « stupéfiant » qui a été observé malgré les consignes méthodologiques qui tendaient à sous-estimer l’impact du diabète et de l’hypertension. Un même message de prévention pour tous S. Yusuf observe que les mêmes facteurs de risque prédisent la plupart de ces événements dans toutes les régions du monde, toutes les populations, quelle que soit leur appartenance ethnique, aussi bien chez les femmes que chez les hommes, et quelle que soit leur catégorie d’âge. Une telle conclusion nous permet de penser que la prévention est possible et passe par des messages universels, simples, et accessibles à tous, en tenant compte des différences sociales et économiques. L’obésité : un problème de santé publique L’obésité est responsable de 5,5 à 7 % des dépenses de santé aux États-Unis et déjà de 2 à 3,5 % dans d’autres pays comme l’Australie, le Canada, la France, le Japon, la Nouvelle-Zélande ou encore le Portugal (Thompson, 2001). Actuellement, l’OMS estime que plus d’un milliard d’adultes dans le monde sont en surcharge pondérale, dont quelque 130 millions aux États-Unis où le problème est apparu dans les années 60... Cependant, il remarque que, rapporté au nombre de sujets concernés, le coût médical de la prise en charge de cette maladie reste, en soi, relativement modeste parce que le problème est peu traité médicalement. Obésité abdominale : un facteur de risque cardio-vasculaire enfin reconnu L’étude INTER-HEART a mis en évidence l’obésité abdominale en tant que facteur de risque cardio-vasculaire indépendant. L’obésité est longtemps restée une éventuelle préoccupation esthétique pour le patient, même si c’était déjà un sujet de préoccupation pour le médecin, mais faute de disposer de traitements efficaces, il désespérait de faire maigrir son patient. Aujourd’hui, il peut faire plus ; ainsi, grâce aux travaux de l’équipe canadienne, on sait que deux sujets de même poids et de même taille ne comportent pas forcément les mêmes risques. Les complications métaboliques sont associées à l’obésité viscérale, abdominale. C’est tout le cadre qui est à revoir. Autrefois, on parlait d’obésité « androïde » ou « gynoïde » en fonction de la distribution haute ou basse de la masse adipeuse ; désormais, en fonction du risque inhérent à cette localisation particulière de l’adiposité qui épaissit la peau, qui touche les viscères, mais aussi le rétropéritoine, l’arrière et les flancs où elle forme les « poignées d’amour », il faut distinguer l’obésité abdominale. Les moyens diagnostiques sont des plus simples : l’observation et l’usage d’un mètre de couturière pour mesurer le périmètre abdominal. Toutefois, cette localisation des graisses peut aussi être confirmée par des moyens plus sophistiqués comme les techniques d’imagerie par scanner, présentées par J.-P. Desprès. Retour sur les définitions L’obésité est communément définie par le rapport poids (kg)/taille (m 2) (autrement dit BMI, c’est-à-dire body mass index ou indice de masse corporelle, IMC en français) : c’est ainsi que l’OMS a retenu en 2003 les valeurs de l’IMC > 25 pour la simple surcharge pondérale et un IMC > 30 pour l’obésité. Cette définition même a fait l’objet de débats au cours du congrès de Munich parce qu’elle ne tient absolument pas compte de la distribution de la masse grasse. Or, on sait aujourd’hui que certains patients peuvent avoir un profil métabolique que l’on pourrait qualifier de « normal » en termes de facteurs de risque métabolique malgré une présence significative d’excès de masse adipeuse, alors qu’au contraire, certains sujets en surcharge pondérale modérée mais avec un périmètre abdominal supérieur à la normale peuvent présenter toute une série de complications : diabète, maladie coronaire, artérite périphérique, etc. Aussi, pour l’équipe canadienne du Pr Desprès qui observe depuis 17 ans différentes populations d’obèses, plus que l’IMC, c’est le tour de taille ou la ceinture abdominale qui sont déterminants de la survenue d’un syndrome métabolique. L’adipocyte : une cellule neuro-endocrine L’adipocyte ne doit plus être considéré comme une simple réserve de graisse, c’est une cellule clé active. Elle produit la leptine, dont la sécrétion est proportionnelle à la masse adipeuse. Sa découverte dans les années 90 avait suscité de grands espoirs ; on sait aujourd’hui que ce n’est qu’un marqueur qui participe au contrôle de la masse adipeuse. La leptine est une cytokine qui, libérée par les adipocytes dans la circulation sanguine, va se fixer sur des récepteurs centraux hypothalamiques qui participent à l’intégration de signaux métaboliques et permettent de contrôler l’homéostasie énergétique. Informé sur l’état des réserves lipidiques, le cerveau sait alors exercer un rétrocontrôle négatif sur la prise alimentaire lorsque le sujet s’est alimenté suffisamment, ce qui provoque la satiété. D’autres cytokines sont également secrétées par les adipocytes : l’interleukine IL6, ou encore le facteur de nécrose tumorale TNF a... qui jouent un rôle vraisemblable dans le développement des complications vasculaires et la sensibilité à l’insuline. Les équipes de recherche ont également identifié différentes protéines sécrétées, elles aussi, par les adipocytes, comme la résistine et l’adiponectine qui pourraient aussi être impliquées dans le cercle vicieux reliant adipocyte et insulinorésistance. L’adiponectine, protéine adipocytaire de découverte récente, est impliquée dans les métabolismes glucidique et lipidique et joue un rôle important dans la physiopathologie de l’obésité, du diabète de type 2 et de la maladie coronarienne. Ses concentrations plasmatiques sont diminuées chez les obèses et inversement corrélées à l’IMC ; il en est de même des diabétiques et des coronariens. À l’inverse, l’amaigrissement et la normalisation du métabolisme glucidique s’accompagnent

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