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ESH 2007 - Actualités thérapeutiques
M. AZIZI, Hôpital Européen Georges Pompidou, Paris,

Après un développement de très longue durée, de nouveaux inhibiteurs de la rénine humaine commencent à faire leurs preuves. Les résultats des différents essais cliniques réalisés au cours du développement de l’aliskiren ont été rapportés au cours du congrès. Une nouvelle approche thérapeutique originale fondée sur une vaccination contre l’angiotensine II chez des patients hypertendus a également été rapportée.
Inhibition de la rénine Le long développement des inhibiteurs de la rénine La technique pour inhiber la rénine humaine commence à arriver à maturité après un développement très long et complexe sur 20 à 30 ans. Alors que les premiers inhibiteurs du système rénine-angiotensine (SRA) développés ont été ceux de l’enzyme de conversion (IEC), il aurait été plus intéressant, d’un point de vue physiopathologique, de développer d’emblée des médicaments ciblant plus spécifiquement le système rénine-angiotensine tels qu’un inhibiteur de la rénine ou un antagoniste de l’angiotensine II (ARA II). Effectivement, l’enzyme de conversion a de nombreux autres substrats que l’angiotensine I, incluant la bradykinine, la substance P, les enképhalines, l’angiotensine (1-7) et l’AcSDKP. La diminution de la formation de l’angiotensine II, mécanisme d’action souhaité des IEC, s’accompagne en effet d’une accumulation de bradykinine, du fait de la double action de l’enzyme sur l’angiotensine I et la bradykinine. C’est à cette accumulation locale de bradykinine (ou de substance P) que l’on rapporte les effets secondaires gênants (toux) ou graves (œdème angioneurotique) signalés au cours des traitements par les IEC. La rénine en elle-même offre une cible plus spécifique d’inhibition du système rénine-angiotensine puisque l’angiotensinogène est son seul substrat connu et que la réaction rénine-substrat est l’étape limitante du système. La recherche d’inhibiteurs de la rénine a été très active, mais s’est heurtée à de très grandes difficultés de mise au point. Les premiers inhibiteurs puissants de la rénine tels que l’enalkiren, le CGP38-560, le renikiren, le zankiren, le ciprokiren et le terlakiren avaient une faible biodisponibilité absolue chez l’homme (1 à 2 %), et une efficacité clinique limitée. Leurs coûts de synthèse se sont avérés extrêmement élevés, limitant la dose administrée et donc l’efficacité thérapeutique. À ce stade, tous les programmes de développement des inhibiteurs de la rénine ont été arrêtés pour des raisons commerciales, cela d’autant plus que les ARA II apparaissaient comme étant des alternatives plus simples à développer. Le succès ultérieur des ARA II a confirmé cette stratégie. Une nouvelle molécule pour traiter l’HTA ? De nouveaux inhibiteurs de la rénine humaine ont été récemment développés selon une nouvelle approche fondée sur l’analyse de la structure du site actif de la rénine analysé en cristallographie aux rayons X. Parmi les quatre molécules récemment découvertes, l’aliskiren est celle dont le développement clinique est le plus avancé. Malgré une biodisponibilité qui reste faible (2 à 3 %), la puissance de l’aliskiren vis-à-vis de la rénine humaine (IC 50 % : 0,6 nM) ainsi que sa longue demi-vie pharmacocinétique et pharmacologique lui confèrent une activité biologique in vivo équivalente à celle d’un ARA II ou d’un IEC. Ainsi, chez des sujets sains normotendus, l’intensité et la durée du blocage du SRA obtenues par 150 mg d’aliskiren est similaire à celles obtenues par 20 mg d’énalapril ou 160 mg de valsartan. L’aliskiren a été approuvé dans le traitement de l’hypertension artérielle par la FDA et a obtenu son autorisation de mise sur le marché aux États-Unis. Les demandes d’autorisation de mise sur le marché en Europe et en France sont en cours. Résultats des essais cliniques M.-P. Schneider (Allemagne) a rapporté les résultats d’un essai multicentrique en double aveugle comparant l’aliskiren à l’hydrochlorothiazide (HCTZ). Après 2 semaines de wash-out et 4 semaines de placebo, 1 124 patients modérément hypertendus ont reçu de façon aléatoire de l’aliskiren 150 mg/j, de l’HCTZ 12,5 mg/j ou un placebo pendant 3 semaines. Après 3 semaines, les doses des médicaments étaient doublées par titration forcée à 300 mg/j d’aliskiren et 25 mg/j d’HCTZ pendant 23 semaines. De plus, les patients sous placebo au départ recevaient, après la 6 e semaine, soit de l’aliskiren 300 mg/j, soit de l’HCTZ 25 mg/j pendant 20 semaines. En fonction de la réponse tensionnelle, de l’amlodipine 5 mg titrée à 10 mg/j était ajouté à partir de la 12 e ou de la 18 e semaine chez les patients dont la PA restait supérieure à 140/90 mmHg. À la 12 e semaine, l’aliskiren 300 mg/j en monothérapie a davantage réduit la PA que l’hydrochlorothiazide 25 mg/j en monothérapie (-17,4/-12,2 vs –14,7/-10,3 mmHg ; p 0,001), et le contrôle tensionnel était obtenu respectivement chez 60 % contre 50,6 % des patients. À la 26 e semaine, le traitement basé sur l’aliskiren a davantage réduit la pression artérielle que celui basé sur l’hydrochlorothiazide (-20,3/-14,2 vs -18,6/-13 mmHg). Les patients recevant un traitement à base d’aliskiren ont nécessité moins souvent de l’amlodipine que ceux qui recevaient l’hydrochlorothiazide (46,4 vs 53 %). L’aliskiren a été bien toléré. En conclusion, chez les patients hypertendus, l’aliskiren en monothérapie à la dose de 300 mg/j réduit davantage la PA qu’une monothérapie à base d’hydrochlorothiazide 25 mg/j. Une bithérapie par aliskiren et amlodipine réduit davantage la PA qu’une bithérapie par hydrochlorothiazide et amlodipine. S.-A. Yarows (États-Unis) a rapporté les résultats d’un essai combinant l’aliskiren au valsartan sur les paramètres du SRA, évalués dans un sous-groupe de patients appartenant à un grand essai incluant 1 797 patients. Après 4 semaines de placebo, les patients recevaient de façon aléatoire l’aliskiren en monothérapie à la dose de 150 mg/j, le valsartan à la dose de 160 mg/j ou la combinaison aliskiren 150 mg/j + valsartan 160 mg/j pendant 4 semaines, suivies d’une titration forcée doublant la dose initiale durant 4 se-maines supplémentaires. Après 8 semaines de traitement en double-aveugle, la combinaison aliskiren 300 mg/valsartan 320 mg a diminué la PA de façon significativement plus marquée que l’aliskiren 300 mg ou le valsartan 300 mg en monothérapie (baisse de PA additionnelle de 4,2/3,2 mmHg et de 4,4/2,5 mmHg vs aliskiren 300 mg ou valsartan 320 mg respectivement ; p 0,0001). Comme attendu, la concentration de rénine immunoréactive dans le plasma a significativement augmenté après administration d’aliskiren 300 mg (+ 468 %) et de valsartan 320 mg (137,8 %) en raison de l’interruption du rétrocontrôle de l’angiotensine II sur la sécrétion de rénine. La combinaison d’aliskiren et de valsartan a eu un effet synergique sur l’augmentation de la rénine plasmatique (+ 911 %). Malgré l’augmentation de la concentration de rénine plasmatique, l’aliskiren en monothérapie a réduit l’activité rénine plasmatique de 72,6 % alors que le valsartan l’a augmenté significativement (activité enzymatique de la rénine) de 59 %. Malgré l’effet synergique de la combinaison d’aliskiren et de valsartan sur la concentration de rénine plasmatique, l’aliskiren en bithérapie a augmenté l’activité rénine plasmatique de 44 %. Tous les traitements ont également diminué la concentration d’aldostérone, en particulier la combinaison aliskiren-valsartan. L’aliskiren seul ou en combinaison avec le valsartan permet de maintenir une inhibition durable du système rénine-angiotensine chez les patients hypertendus. J. Jordan (Allemagne) a rapporté le résultat d’un essai randomisé en double aveugle réalisé chez des patients obèses et hypertendus résistants à une monothérapie par HCTZ 25 mg/j, évaluant l’efficacité et la tolérance de l’adjonction d’aliskiren comparativement à l’addition d’irbésartan, d’amlodipine ou de placebo. Après 4 semaines de wash-out, 500 patients hypertendus obèses (PAD : 95-110 mmHg et index pondéral > 30 kg/m 2), ont reçu de l’HCTZ 25 mg/j pendant 4 semaines ; 489 patients étaient non-répondeurs à l?HCTZ 25 mg (PAD : 90-110 mmHg) et ont été randomisés pour recevoir de l’aliskiren 150 mg/j, de l’irbésartan 150 mg/j, de l’amlodipine 5 mg/j ou un placebo pendant 4 semaines, puis pendant 8 semaines les doses d’aliskiren, d’irbésartan et d’amlodipine ont été doublées. Après 8 semaines de traitement, la baisse de la PAS était de -15,8 mmHg sous aliskiren + HCTZ, -15,4 mmHg sous irbésartan + HCTZ et de 13,6 mmHg sous amlodipine + HCTZ alors que la baisse de PA sous HCTZ en monothérapie restait égale à -8,6 mmHg. Les différences de PA comparativement au placebo étaient hautement significatives pour les trois combinaisons mais similaires entre elles. Biologiquement, seule la combinaison aliskiren + HCTZ a réduit l’activité rénine plasmatique de 45 % alors qu’elle a augmenté de 537 % sous irbésartan + HCTZ et de 196 % sous amlodipine + HCTZ. L’aliskiren en combinaison avec l’HCTZ a été bien toléré et a permis de contrôler la PA chez les patients obèses, résistants à une monothérapie par HCTZ de façon similaire à celle obtenue sous irbésartan ou sous amlodipine en combinaison avec un diurétique. Vaccination antiangiotensine II Une nouvelle approche thérapeutique originale basée sur une vaccination contre l’angiotensine II chez des patients hypertendus a été rapportée par A.-C. Tissot et coll. (Suisse). En effet, malgré la disponibilité de nombreux médicaments antihypertenseurs, l’objectif tensionnel est rarement atteint chez les patients hypertendus, l’une des raisons étant probablement la non-observance du traitement. Des débuts difficiles Les tentatives d’immunisation contre le SRA ont débuté il y a environ 25 ans. La première approche a été une immunisation active contre la rénine obtenue chez le singe et le rat. Chez ces animaux, l’immunisation contre la rénine entraîne une baisse de la PA et une forte sensibilité à la déplétion sodée. Les animaux développent aussi une maladie immunologique intrarénale et cette voie d’immunisation a été abandonnée. Des alternatives successives ont tenté d’immuniser des animaux puis des sujets sains contre l’angiotensine I et plus récemment contre l’angiotensine II. La tentative d’immunisation contre l’angiotensine I s’est soldée par un échec caractérisé par l’apparition d’anticorps qui n’avaient pas d’efficacité tensionnelle ni biologique. Une étude en cours prometteuse
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