



Publié le
Lecture 13 mins
Comment détecter les plaques d'athérosclérose vulnérables ?
F. HYAFIL et L.-J. FELDMAN, Hôpital Bichat, Paris

Malgré les progrès thérapeutiques récents, les complications de l’athérosclérose demeurent la première cause de mortalité dans les pays occidentaux. Il est d’un intérêt clinique majeur de détecter les plaques d’athérome vulnérables, à haut risque évolutif.
La coronarographie est l’examen de référence pour détecter les plaques d’athérosclérose sténosantes, ayant un retentissement hémodynamique sur le flux artériel. Cependant, les études anatomopathologiques de patients décédés d’infarctus du myocarde ont montré que 70 % des plaques d’athérome coronaires en regard des thrombus artériels (plaques « coupables ») ne présentaient pas de sténoses serrées de la lumière artérielle. Ces données ont été confirmées par des études rétrospectives retrouvant une faible proportion de sténoses coronaires serrées au niveau des futures plaques d’athérosclérose coupables sur les coronarographies précédant un événement coronarien aigu. L’étude du degré de sténose artérielle engendré par les plaques d’athérome aide à définir les indications de revascularisation coronaire mais ne permet pas de prédire le risque d’événement coronarien aigu. Les syndromes coronariens aigus sont associés dans la majorité des cas à la rupture ou l’érosion d’une plaque d’athérome avec formation d’un thrombus au contact du sous-endothélium. Les mécanismes aboutissant à la rupture d’une plaque d’athérosclérose et à la formation d’un thrombus intracoronaire restent encore mal compris. Devant l’absence de modèle animal pertinent de rupture spontanée de plaque, les recherches se sont concentrées sur l’étude anatomopathologique des plaques d’athérosclérose rompues. La comparaison des plaques d’athérome « coupables », compliquées d’une thrombose artérielle, avec des plaques « stables » a permis de définir les principales caractéristiques histologiques et biologiques des plaques d’athérome coupables. Les plaques d’athérosclérose ayant le même aspect histologique et biologique que les plaques coupables sont considérées comme des « plaques vulnérables », susceptibles de se rompre et d’engendrer une thrombose coronaire aiguë. Il serait d’un intérêt clinique majeur de détecter ces plaques d’athérosclérose vulnérables, à haut risque évolutif. Techniques invasives de détection L’essor de la coronarographie a favorisé le développement de sondes intracoronaires d’imagerie. Le principal avantage de l’imagerie invasive de la paroi artérielle est son excellente résolution spatiale. De nombreuses techniques d’imagerie basées essentiellement sur les propriétés d’absorption et de réfraction des ondes spectrales ou des ultrasons, ont été testées pour tenter de détecter les plaques d’athérosclérose vulnérables (figure 1). D’autres techniques se sont intéressées à la mesure de la température (thermographie), aux propriétés mécaniques (élastographie) ou à la composition moléculaire (spectrométrie du proche infrarouge) des plaques d’athérosclérose. Les approches les plus prometteuses sont actuellement la tomographie par cohérence optique (TCO) et l’histologie virtuelle. Figure 1. Imagerie intra-coronaire d’une plaque d’athérosclérose vulnérable par tomographie par cohérence optique (A) et par échographie (B). La tomographie par cohérence optique permet de visualiser la fine chape fibreuse (flèches noires) recouvrant le noyau lipidique (LC) avec une très bonne résolution spatiale mais avec une pénétration limitée dans l’épaisseur de la plaque d’athérosclérose. L’échographie endocoronaire de la même plaque d’athérosclérose retrouve une paroi artérielle hypoéchogène mais avec une résolution spatiale et un contraste inférieurs à la tomographie par cohérence optique. GW, artéfact lié au guide d’échographie. Adapté de MacNeill et al. Tomographie par cohérence optique La TCO étudie la réfraction des ondes optiques dans les plaques d’athérosclérose. L’utilisation de longueurs d’ondes très courtes permet d’obtenir une excellente résolution spatiale (environ 10 µm) mais avec une pénétration limitée dans la paroi artérielle (1 à 2 mm). Cette technique peut être comparée à l’échographie endocoronaire de haute résolution. La TCO permet cependant une meilleure évaluation de la composition lipidique (signal faible) ou fibreuse (signal intense) des plaques d’athérosclérose. Dans une étude préliminaire, l’épaisseur de la chape fibreuse a été mesurée in vivo dans les plaques d’athérosclérose coronaires rompues. La majorité des plaques rompues avait une épaisseur de chape fibreuse inférieure à 50 µm, confirmant les résultats des études anatomopathologiques antérieures qui avaient établi le seuil de 60 µm. Enfin, la présence d’une l’hétérogénéité du signal dans les plaques permettrait d’identifier une infiltration par des macrophages dans la chape fibreuse. Ces résultats restent cependant à confirmer in vivo. Les principales limitations de la TCO sont la nécessité de perfuser l’artère coronaire avec du sérum physiologique durant l’acquisition des images ainsi que le coût d’acquisition de la source de lumière laser. Histologie virtuelle Les images d’histologie virtuelle sont obtenues par un post-traitement des images d’échographie endocoronaire. Les images d’échographie endocoronaire sont reconstruites en analysant la vitesse et l’intensité de la réfraction des ondes ultrasonores. L’histologie virtuelle est basée sur l’analyse spectrale des ondes réfractées par les plaques. En fonction des caractéristiques spectrales de ces ondes, le contenu des plaques est codé à l’aide de différentes couleurs en tissu fibreux, lipidique ou calcifié. Après avoir été validées ex vivo, les premières études sont actuellement réalisées in vivo. Elles devraient aider à confirmer l’intérêt de l’histologie virtuelle pour l’identification de certaines caractéristiques des plaques vulnérables telle que la présence d’un volumineux noyau lipidique. Les techniques d’imagerie invasive permettent d’obtenir une imagerie de haute résolution capable en particulier d’identifier la rupture des plaques et de détecter les caractéristiques de ces plaques rompues in vivo. Cependant, ces techniques restent complexes et coûteuses. De plus, aucune ne propose actuellement de critères précis et reproductibles de vulnérabilité de la plaque. Techniques non invasives de détection L’imagerie non invasive des artères coronaires nécessite des résolutions spatiale et temporelle élevées du fait de la petite taille des artères et de leur mouvement au cours du cycle cardiaque. Les progrès récents des techniques d’imagerie non invasive utilisées en pratique clinique courante, tels le scanner et l’imagerie par résonance magnétique (IRM), autorisent maintenant leur application à l’étude des plaques d’athérosclérose coronaires. La médecine nucléaire permet également, mais avec une moins bonne résolution spatiale, d’étudier les activités biologiques au sein des plaques d’athérosclérose à l’aide de molécules marquées avec des traceurs radioactifs. Imagerie par résonance magnétique L’IRM multicontraste, en analysant un tissu avec différentes séquences IRM, permet de déterminer sa composition en lipides et en eau. Elle constitue donc une technique d’imagerie non invasive prometteuse pour détecter la présence d’un volumineux noyau lipidique et d’une fine chape fibreuse, caractéristique des plaques d’athérosclérose vulnérables. Des études récentes d’imagerie des artères carotides ont montré une bonne corrélation entre l’IRM de ces plaques et les données histologiques, ainsi qu’une diminution du contenu lipidique des plaques sous statines. Malgré des progrès constants, cette technique nécessite toujours des temps d’acquisition prolongés et son utilisation pour l’imagerie des plaques d’athérosclérose coronaires reste limitée par les mouvements respiratoires et cardiaques. De manière similaire aux traceurs utilisés en médecine nucléaire, des agents de contraste IRM ciblant des molécules ou des cellules propres aux plaques vulnérables sont développés pour associer à une imagerie « anatomique » l’identification des activités biologiques avec une haute résolution spatiale. • Une première classe de ces nouveaux agents de contraste pour l’IRM est basée sur des molécules paramagnétiques telles que le gadolinium. L’accumulation de molécules de gadolinium dans un tissu raccourcit le temps de relaxation T1 des protons et donc augmente le signal IRM sur des séquences pondérées en T1. La spécificité de ces agents de contraste est obtenue en liant une ou plusieurs molécules de gadolinium à un ligand ayant une forte affinité pour une activité biologique ou un type cellulaire, marqueurs de vulnérabilité. L’agent de contraste se lie ainsi à son récepteur et entraîne une augmentation de l’intensité du signal IRM dans les régions vulnérables de la plaque. Certaines molécules appartenant à cette nouvelle génération d’agents de contraste sont actuellement testées chez l’animal pour la détection de l’activité protéolytique ou de thrombus en utilisant un ligand ciblant des enzymes dégradant la matrice extracellulaire, ou la fibrine, respectivement. • Une autre classe d’agents de contraste IRM est basée sur des molécules superparamagnétiques telles que des nanoparticules de fer. Ces particules de fer, à forte concentration, entraînent des perturbations du champ magnétique détectables en IRM sous la forme d’artefacts noirs, ou effet T2*. Une importante infiltration par des macrophages est fréquemment retrouvée dans la chape fibreuse et le cœur lipidique des plaques vulnérables. Les macrophages pourraient favoriser la rupture des plaques d’athérosclérose en secrétant des enzymes protéolytiques et accélérer la formation d’un thrombus en déposant dans les plaques des molécules procoagulantes. Les USPIO ( Ultrasmall Superparamagnetic Particles of Iron Oxide) sont des nanoparticules d’oxyde de fer recouvertes de sucres mesurant environ 20 nm de diamètre et captées de façon préférentielle par les macrophages. Les USPIO, après une injection intraveineuse, se concentrent dans les régions riches en macrophages et permettent de détecter des plaques d’athérosclérose riches en macrophages dans l’aorte chez le lapin hypercholestérolémique et dans les artères carotides chez l’homme. Malheureusement, le meilleur délai pour la détection des USPIO dans les
Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.
pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.
Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :
Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :
Articles sur le même thème
Pagination
- Page précédente
- Page 2
- Page suivante