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Cardiologie interventionnelle

Publié le  Lecture 21 mins

TCT 2005 : Transcatheter Cardiovascular Therapeutics

G. SCHOUKROUN, hôpital Cochin, Paris

Washington est au cœur de l’actualité. Ici, le monde change, les aspirations s’élèvent, les mouvements se dessinent en de grands élans de géopolitique internationale. Et à quelques centaines de mètres du Parlement et de la Maison Blanche, au centre même de la capitale fédérale, le Conventional Center accueille chaque année la plus importante manifestation de cardiologie interventionnelle : la cardiologie au cœur du monde, c’est cela le TCT. La version 2005 (21-26 octobre) ne perd rien de son esprit d’innovation. Les cas spectaculaires y côtoient les dernières publications, et les plus grands noms de la cardiologie interventionnelle font le point sur leur pratique riche d’enseignements. Nous dévoilerons ici les résultats attendus des grandes études, les dernières réflexions sur les stents actifs, les futures perspectives en matière de traitement percutané des lésions vasculaires périphériques et valvulaires, les mises aux point sur la partie médicale du traitement, les progrès de l’imagerie. La course aux stents actifs (DES) est ralentie, l’angioplastie périphérique prend son envol, le scanner fait rêver et 2006 est proclamée avant l’heure « année de la valve ». On a déjà hâte d’y être.

Déploiement du stent. DES : l’âge de raison Les données à 3 ans des études CYPHER et TAXUS, les nombreuses observations et les études de nouveaux concurrents, permettent de confirmer l’efficacité et la sécurité des DES actuellement disponibles sur le marché, ainsi que d’amener une réflexion très large sur les propriétés mécaniques et biologiques des plates-formes actuelles et à venir. Le profil global du système actif, subtilement balancé entre les propriétés physiques du stent et les propriétés biomécaniques du médicament et de son système de relargage, fait l’objet d’une réflexion intense : les nouveaux produits à l’étude se positionnent difficilement sur le marché et problèmes posés ne sont pas encore résolus. Définitions - TVR : target vessel revascularisation : taux de revascularisation supplémentaire du vaisseau cible et traité. - TLR : target lesion revascularisation : taux de revascularisation supplémentaire de la lésion cible, et traitée. - TVF : target vessel failure : taux d’échec de revascularisation du vaisseau cible. - MACE : major adverse cardiac event : événements cardiaques majeurs indésirables au décours de la procédure (définis dans l’étude ; en général : décès, IDM, AVC, troubles du rythme, etc.). - Late loss : perte tardive endoluminale mesurée à distance. - DS : diamètre de la sténose résiduelle. Stents actifs (DES) versus stent nu (BMS) : 3 ans de données Les données recueillies par les quatre grandes études réalisées depuis 3 ans pour le sirolimus (RAVEL, SIRIUS, E-SIRIUS et C-SIRIUS) ou pour le paclitaxel (TAXUS II, III, IV, V et VI), permettent de comparer les stents Cypher et Taxus au BMS avec un suivi conséquent. La diminution du late loss, du TVF (cf. définitions), du TLR et des MACE est connue et reste stable avec le temps. La comparaison entre le SES (Cypher : sirolimus eluting stent) et le PES (Taxus : paclitaxel eluting stent) par métaanalyse (Kastrati et coll.) ou dans les essais cliniques réalisés (SYRTAX, ISAR-diabète) penche en faveur du SES qu’il s’agisse de réduire le TLR, le late loss ou la resténose angiographique. En revanche, les résultats de ces deux moutures sont équivalents en termes de bénéfice sur la mortalité, et même équivalents à ceux des stents nus. Le risque de thrombose de stent n’augmente pas au bout des trois années, et reste statistiquement similaire à celui d’un stent nu (1,5 % pour le SES, 1,5 % pour le PES et 1,6 % pour le BMS). Les grands résultats à venir pour Taxus et Cypher concerneront les études menées sur les lésions ou les patients les plus complexes, avec respectivement l’étude SYNTAX, qui compare les résultats obtenus par DES et ceux de la chirurgie coronaire chez les patients pluritronculaires, et l’étude COMBAT sur les lésions du tronc commun. La thrombose de stent La définition de la thrombose de stent est une occlusion angiographiquement contrôlée d’un stent actif ou tout décès non attribué à une cause extracardiaque chez un patient porteur d’un stent actif. On distingue la thrombose aiguë des 24 premières heures, subaiguë des trente premiers jours et tardive au-delà. Ong (JACC 2005) décrit la thrombose comme le plus souvent précoce, et survenant dans les 11 premiers jours. Du point de vue anatomopathologique, la thrombose de stent actif est favorisée par une augmentation de la formation de fibrine accompagnée d’une inflammation chronique, ainsi qu’un retard d’endothélialisation (un peu plus marqué dans l’étude TAXUS d’après des études chez l’animal). La mortalité est catastrophique en cas de thrombose aiguë de stent : de 25 à 50 % selon les séries. Les critères de risque de thrombose de stent actif sont corrélés à un défaut d’expansion du stent lors du gonflage, au traitement de lésions complexes (bifurcations), à des procédures difficiles pouvant altérer la surface du polymère lors du franchissement d’une lésion, au diabète et à l’insuffisance rénale, à l’arrêt des antiagrégants ou de la bithérapie antiagrégante (notamment le clopidogrel). Doit-on prolonger la bithérapie aspirine + clopidogrel au-delà des durées recommandées ? Jusqu’à quand ? La question est pour le moment en suspens. Mécaniquement, la préparation par prédilatation ou rotablator d’une lésion complexe est fortement recommandée, ainsi que le contrôle par IVUS postprocédure en cas de doute sur le bon déploiement de l’endoprothèse. La dysfonction endothéliale Hofma, Serruys et coll. ont observé en pratique une atteinte tardive de la fonction vasomotrice en cas d’implantation de stent actif au sirolimus, avec test à l’acétylcholine fortement positif provoquant des spasmes coronaires diffus ou localisés. Cette tendance au dysfonctionnement local de la fonction endothéliale, qui pourrait avoir des répercussions cliniques avec l’apparition de symptômes douloureux et favoriser l’athérosclérose, doit être vérifiée dans de plus larges séries. La pratique courante : 54 % de stents actifs En dépit des indications limitées et des recommandations restrictives de la Société européenne de cardiologie, les lésions coronaires significatives sont très largement traitées avec des stents actifs, comme le rapporte une étude de l’Evanston hospital menée sur 486 patients entre 2003 et 2004 : 683 lésions ont ainsi été traitées avec, dans 54 % des cas, l’implantation d’un stent actif. Dans 21 % des cas, il s’agissait d’un infarctus du myocarde en phase aiguë ; dans 20 % des cas, d’une atteinte pluritronculaire (bifurcations : 10 %, pontages veineux : 11 %, resténose intrastent 10 %, tronc commun 10 %). Très peu de complications ont suivi : 1,5 % de resténose, 0,7 % de thrombose. On voit ici que des lésions complexes ont été traitées avec des DES, bien au-delà des recommandations en vigueur. Mais ces indications débordantes n’ont pas été sanctionnées par un taux de complications à son tour outrancier. Cette étude, qui se veut un reflet de la pratique courante, ouvre de façon un peu polémique le débat de nouvelles indications plus larges et plus permissives sur les bases de l’efficacité et de l’innocuité des stents actifs. Les essais attendus ENDEAVOR III Après des essais de faisabilité, Endeavor (figure 1), composé du stent nu Driver « recouvert » d’ABT 578, zotarolimus analogue à sirolimus, drogue délivrée par polymère, avait été comparé au Driver dans l’étude ENDEAVOR II, avec des résultats surprenants en termes de late loss élevé de façon inattendue pour un stent actif. Le but de l’étude était pourtant atteint puisqu’il montrait alors la supériorité d’Endeavor sur Driver en termes angiographiques et cliniques. Les études en attente, ENDEAVOR III et ENDEAVOR IV, devaient comparer directement les résultats d’Endeavor opposé respectivement au Cypher et au Taxus Express avec une recherche de non-infériorité en termes de late loss. Les résultats cliniques à 9 mois et angiographiques à 8 mois d’ENDEAVOR III étaient présentés au TCT 2005. Le face à face avec Cypher était attendu, et peut-être, redouté. Figure 1. Stent ENDEAVOR. Au total, 436 patients ont été inclus dans cette étude, avec des lésions de 14 à 27 mm de longueur dans des artères de 2,5 à 3,5 mm de diamètre. Les lésions complexes de bifurcation, à forte tortuosité ou à calcifications importantes ont été exclues ; 327 patients ont été traités avec un stent Endeavor, 109 avec un stent Cypher dans une randomisation en 3 contre 1. Les caractéristiques cliniques et angiographiques étaient comparables entre les deux groupes. Le succès de la procédure a été mesuré à 98,1 contre 91,2 % avec un avantage pour Endeavor. Du point de vue clinique, les résultats proposés ne relevaient pas de différence significative entre les deux stents en termes de TLR, de TVF, ni de MACE. Cependant, l’étude comparée du late loss est en défaveur d’Endeavor avec 0,34 contre 0,13 pour Cypher. Le but principal de l’étude n’est donc pas atteint. Ces résultats sont comparables aux résultats précédents d’ENDEAVOR II en termes de late loss intrastent et intrasegment, de TLR et de TVF. L’étude clinique et angiographique sur des lésions plus complexes aurait-elle apporté d’autres résultats ? L’inclusion des patients a commencé pour ENDEAVOR IV, qui nous apportera peut-être d’autres enseignements. JUPITER II Le stent actif Janus se compose d’un carbostent Tecnic habillé de tacrolimus. C’est le système de relargage du composant actif qui fait ici son originalité, puisque la drogue est emmagasinée dans de petits réservoirs incrustés dans le stent et relarguée par diffusion directe, sans intermédiaire de polymère. Cette drogue se distingue, en outre, en laboratoire par sa grande sélectivité d’action sur les cellules musculaires, épargnant les cellules endothéliales. Les résultats cliniques de JUPITER II (figure 2) ayant été dévoilés à l’ESC, il restait à prendre note des résultats angiographiques. Figure 2. Étude Jupiter II : suivi de 6 mois. Late loss au bord proximal, intrastent et au bord distal. L’étude menée en double aveugle incluait 166 patients porteurs de lésions de novo dans les deux groupes, et comparait le stent actif Janus au stent Tecnic, avec suivi clinique et angiographique à 6 mois. Les lésions étaient 20 mm de longueur, et de diamètre compris entre 2,70 et 4 mm. Le résultat attendu était une diminution du late loss dans le stent Janus. Les lésions étaient traitées par stenting direct. Les deux groupes présentaient des caractéristiques identiques. Le taux de succès de la procédure a été de 99 % dans les deux groupes. Les données cliniques n’ont pas montré statistiquement de supériorité significative en termes de TLR ni de MACE pour le Janus. Le late loss mesuré, communiqué au TCT, est de 0,40 pour Janus, contre 0,44 pour Tecnic, d’où l’absence de supériorité significative du Janus, malgré un résultat légèrement meilleur que celui qui était escompté au début de l’étude. C’est, bien sûr, le late loss très minime du Tecnic, qu’il faut souligner ici, et qui montre l’excellent résultat du stent nu. Le tacrolimus ou son système de diffusion peinent à améliorer le

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